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​Marchés publics : La réforme bloquée


​Marchés publics : La réforme bloquée
Tahiti, le 8 mars 2021 - Le relèvement temporaire de 8 à 15 millions de Fcfp du seuil de dispense de procédures pour les marchés publics de travaux n’est toujours pas promulgué, quatre mois après l’adoption par l’assemblée de la loi du Pays.
 
La mesure avait été présentée à Tarahoi dans le sillage des textes adoptés pour remédier aux conséquences de l’épidémie de covid-19 et vise à “favoriser la passation des marchés publics de travaux afin de relancer l’activité économique dans le secteur du BTP". Mais, quatre mois après son adoption, le 19 novembre dernier, la loi du Pays portant relèvement temporaire du seuil de dispense de procédures pour les marchés publics de travaux n’est toujours pas en vigueur, faute de promulgation.
En cause : un recours engagé contre ce texte devant le Conseil d’État. La haute juridiction a en effet été saisie le 27 décembre d’une requête sommaire demandant l’annulation de ses articles 1er et 2. L’article 1er fixe le relèvement à 15 millions hors taxes du seuil de dispense de procédures pour les marchés publics de travaux, tandis que l’article 2 impose à l’autorité compétente la publication mensuelle d’un état récapitulatif de tous les marchés d’une valeur de 8 à 15 millions de Fcfp conclus au cours du mois échu.
Pour l’entreprise plaignante, si la dispense d’appel d’offres pour les marchés de moins de 15 millions porte atteinte au principe d’égal accès à la commande publique, cette règlementation soulève un problème d’intelligibilité dans la mesure où des seuils et conditions très différentes s’appliquent aux marchés de même nature de l’État au fenua. Ces derniers sont en effet dispensés jusqu’au 21 juillet prochain de publicité et mise en concurrence préalables jusqu’à une valeur seuil de 8,3 millions de Fcfp (70 000 euros).
 
Désistement, mais pas de promulgation

La promulgation du texte a donc été mise en attente jusqu’à l’issue de cette procédure de contestation, nous explique-t-on au gouvernement. “Pour l’instant, on ne bouge pas.” Mais cette saisine n’a toujours pas été étoffée d’un mémoire complémentaire. Et elle ne le sera jamais. Le 26 février dernier, soit un mois avant la fin du délai imparti au plaignant pour compléter sa saisine au Conseil d’État, un avis de désistement “pur et simple” a été transmis à la juridiction administrative, mettant un terme à la procédure de contestation. Un fait de procédure qui devrait être notifié sous peu à la Polynésie française –s’il ne l’est déjà– et depuis lequel plus rien ne s’oppose désormais à la promulgation de ce texte.

Le relèvement temporaire à 15 millions de Fcfp du seuil de dispense de procédures pour les marchés publics de travaux sera dès promulgation applicable pour deux ans. La disposition concerne tous les acheteurs publics relevant du champ d’application du Code polynésien des marchés publics : le Pays, ses établissements publics, les communes, leurs établissements publics et groupements.
Mais si ce texte vise à rendre accessibles plus rapidement à toutes les entreprises du secteur, au premier rang desquelles les plus modestes, les marchés de travaux publics, il sera sans effet sur le problème majeur qui se pose aux petites sociétés : celui des délais de paiement ou de mandatement. “On relève les seuils pour “fluidifier” la passation des marchés, mais ce qui intéresse les petites entreprises c’est un paiement plus rapide des travaux”, nous explique cet entrepreneur du BTP, alors que les délais de règlement peuvent atteindre de trois à six mois dans certains cas. “Là, on risque de voir l’acheteur public adopter une politique de petits lots en faveur des sociétés avec lesquelles il travaille déjà et qui ont une trésorerie suffisante pour amortir les délais de paiement.” Le vice se cache souvent au creux des vertus les plus louables.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Lundi 8 Mars 2021 à 16:37 | Lu 1525 fois