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​Comptes des partis politiques : Petits partis, petite gestion


Tahiti, le 19 février 2020 – La Commission Nationale des Comptes de Campagne et des Financements Politiques (CNCCFP) a publié le 15 février dernier son « avis annuel sur les comptes des partis et groupements politiques au titre de l'exercice 2018 ». Après s'être penché sur le cas des principaux partis polynésiens, Tahiti Infos se consacre aujourd'hui aux micro-partis, où le respect des obligations comptables en la matière se fait avec des fortunes diverses.
 
Majoritairement constitués autour de la personnalité d'un élu, les micro-partis ont une taille réduite avec le plus souvent un accès aux financements restreint. Un structure simple qui pourrait faciliter la gestion comptable de ce type de formations. Une facilité qui, au regard des constats de la CNCCFP sur les petites formations polynésiennes, apparaît peu évidente à constater.

​Tuihani et Sandras en règle

En janvier 2018, en rupture avec le Tahoeraa et son leader Gaston Flosse, Marcel Tuihani Jr créait sa formation politique, Te Ora Api no Porinetia, peu avant de quitter la présidence de l'Assemblée de Polynésie. Pour sa première année d'exercice, la CNCCFP constate que le jeune parti a collecté plus de 2,2 millions de Fcfp de recettes dont près de 80% provient de dons de personnes physiques. Surtout, la commission constate que le dépôt des comptes s'est fait dans les règles et à temps. Dès avril 2018, l'ancien président de l'Assemblée, avait d'ailleurs procédé, « à la demande de la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques » à plusieurs modifications des statuts de l'association de financement du mouvement « pour les conformer avec les nouvelles dispositions de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 qui est venue modifier à compter du 1er janvier 2018 la loi du 11 mars 1988 ». Un effort de gestion, probablement hérité de son père, Marcel Tuihani, ancien grand argentier du Tahoeraa et qui a claqué la porte du parti orange peu de temps après son fils. Dans la foulée, le parti obtenait 3,69% des suffrages au premier tour des élections territoriales et finissait en quatrième loin derrière les trois grands partis polynésiens. Un score cependant intéressant au regard de la jeunesse du parti qui peut donc s'appuyer sur une gestion financière lancée sur de bons rails.
 
Allié avec le Tahoeraa, le parti Ia Hau Noa de Bruno Sandras, qui avait démissionné du parti orange en 2007 pour s'associer de nouveau avec lui en mars 2018, a également reçu le quitus de la CNCCFP avec un dépôt de ses comptes dans les clous de la réglementation de la commission. Un moindre mal pour une formation qui n'a déclaré aucune recette en 2018 et un exercice déficitaire à hauteur de -788 000 Fcfp.

Tauhiti Nena boxe hors du ring

Tête de liste de E Reo Manahune aux dernières élections territoriales de 2018 et de la liste Papeete To’u Oire aux municipales le mois prochain, Tauhiti Nena s'était déjà attaqué en 2014 à la mairie de Papeete sous la même bannière Papeete To'u Oire non sans avoir bousculé le maire sortant en rattrapant une partie de son retard entre les deux tours. Au terme du second tour de scrutin, il avait ainsi obtenu 38,9% des suffrages exprimés notamment avec le soutien de l’électorat populaire des quartiers défavorisé de la ville mais échouant à 1 200 voix du score de Michel Buillard.

Après cette première tentative prometteuse, Tauhiti Nena avait choisi de s'appuyer sur une formation politique, Tau Hoturau. Fondée en juin 2016, elle a ainsi pour objet « de participer à la vie politique de la Polynésie française », « de contribuer au débat politique » mais aussi « d’étudier, de rechercher et de réaliser les moyens administratifs, techniques et financiers pour les projets de fonctionnement et d’investissement du parti ». Un objectif visiblement difficile à respecter en interne au parti. La formation, éligible aux aides publiques, vient de nouveau d'être sanctionnée, pour le deuxième round consécutif après l'année dernière. Coupable de ne pas avoir déposer ses comptes avant le 30 juin 2019, la formation est ainsi privée une nouvelle fois du bénéfice des aides publiques et ce jusqu'en décembre 2021 ! Une décision sanctionnant l'absence de visibilité sur les recettes et dépenses du parti qui peut perturber le message et le financement d'une action politique en pleine année électorale.

​Te Avei'a et Ai'a api, les partis morts-vivants

C'est sous la bannière de son parti Te Avei'a qu'Antonio Perez avait obtenu près de 2% lors des élections législatives de 2012 dans la 2ème circonscription polynésienne. Représentant à l'Assemblée depuis 2013 au sein des groupes A Tia Porinetia, puis Rassemblement pour une majorité autonomiste puis Tapura Huiraatira, parti dont il a participait à la création en 2016, Perez semble avoir fait le deuil du Te Avei'a. Toujours administrativement vivante, cette formation n'échappe cependant pas au contrôle des comptes par la CNCCFP qui relève dans son rapport rendu public le 15 février que le micro-parti n'a pas déposé ses comptes en 2019. Un oubli qui fait un peu tache pour l'actuel président de la Commission de l’économie, des finances, du budget et de la fonction publique à l'APF mais sans trop de conséquences financières puisque Te Avei'a n'est pas éligible aux aides publiques. Tout juste ses donateurs ne peuvent plus bénéficier de réductions d'impôts accordées par la législation métropolitaine.
 
Plus ancien, le Ai'a Api a été longuement présidé par des leaders dont la gestion des comptes n'a jamais été une spécialité. Emile Vernaudon, inéligible jusqu'en 2021, a ainsi vu sa carrière politique se suspendre au terme de plusieurs affaires de détournement de fonds publics et Clareentz Vernaudon, pourtant président de la Commission de contrôle budgétaire et financier pendant plusieurs année, a eu quelques démêlés de même nature avec la justice. Aussi, c'est donc sans réelle surprise que la CNCCFP a sanctionné le parti Ai'a Api, toujours enregistré comme formation politique en activité, pour non dépôt de ses comptes. Une sanction qui ne troublera pas le jeu politique cette année…

Rédigé par Sébastien Petit le Vendredi 21 Février 2020 à 09:16 | Lu 2481 fois