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Les trésors polynésiens de la Pandora


PAPEETE, le 5 octobre 2018 - Depuis 1791, la Pandora repose sous l’eau, le long de la grande barrière de corail en Australie. Ce navire qui était venu à Tahiti chercher les mutins de la Bounty a fini ses jours au fond de l’océan emportant avec lui des trésors récupérés dans les différents territoires visités. Parmi les 6 000 objets sortis de l’eau, près de 300 appartiennent à la Polynésie.

"Mes recherches portent sur des penu, des hameçons, des lames d’herminette…", rapporte Jasmin Guenther, doctorante en ethnologie. Elle mène actuellement une thèse pour l‘université James Cook de Townsville en Australie et pour l’université Aarhus du Danemark sur les objets polynésiens découverts dans l’épave de la Pandora.

Elle poursuit : "tout ce qui était fabriqué à base de tressage, de tapa et autres matières périssables a disparu, il ne reste que les matières dures qui ont pu résister à une immersion longue de deux siècles : la pierre, les coquillages, les os et certains bois."

Jasmin Guenther a été missionnée pour cataloguer les objets conservés au Museum of Tropical Queensland de Townsville en Australie. Elle est basée sur site mais a pu, en plus, effectuer plusieurs séjours en Polynésie française.

L’idée de ces déplacements ? "Faire connaître et mieux comprendre ce trésor dont certains ont découvert l’existence en 2017 lorsque je suis venue pour la première fois à Tahiti et, en échange, compléter la description de ce même trésor via des personnes en Polynésie et des experts des cultures matérielles d’Océanie."

Un costume de deuilleur ?

Malgré les efforts de la doctorante et des autres chercheurs, certains objets restent mystérieux. D’autres se laissent appréhender. Après les fouilles, l’équipe de recherche au Museum of Tropical Queensland pourrait avoir identifié un costume de deuilleur. "On n’en est pas sûrs, mais si c’est le cas, c’est très intéressant car le voyage de la Pandora n’était pas un voyage d'exploration ou collection. Les costumes ont été des objets précieux et aujourd’hui il n’existe dans le monde que très peu de costumes de deuilleur complet, par exemple au Pitt Rivers Museum à Oxford et au Bishop Museum à Hawaii ! "

La chercheuse espère terminer sa thèse en septembre 2019 mais, à cette date, le travail sera loin d’être terminé. "J’espère que des Polynésiens prendront la relève. Car, il restera toujours des choses à faire. Et puis, il reste des trésors immergés, on pense que moins de la moitié de l’épave de la Pandora a été excavée."

Il faut dire que l’épave n’est pas très accessible. Les plongées sur le site, du fait de la météorologie et des courants, ne sont possibles que quelques mois dans l’année. Ensuite, sur place, les conditions sont difficiles et coûteuses. Au total, onze expéditions ont été organisées. D’autres seront lancées si des financements sont trouvés.

Naufrage en 1791

La Pandora est était une frégate de la Marine royale britannique. Elle a été envoyée dans les eaux nord-américaines pendant la guerre d’indépendance des États-Unis mais c’est surtout pour sa traque des mutins de la Bounty qu’elle est connue.

"Le capitaine Bligh, en rentrant en Angleterre, a raconté la mutinerie. Pour donner un exemple, la Marine royale britannique a lancé la Pandora à la recherche des révoltés", indique Jasmin Guenther. Elle est partie d’Europe en 1790 avec, aux commandes, le capitaine Edward Edwards.

La Pandora a atteint Tahiti le 23 mars 1791, après être passée par le cap Horn. Cinq des hommes de la Bounty embarquèrent volontairement dans les 24 heures, neuf furent arrêtés quelques semaines plus tard. Ils avaient fui dans les montagnes.

Les quatorze hommes furent emprisonnés dans une prison de fortune sur le pont de la Pandora qui quitta Tahiti le 8 mai 1791. À bord, les marins avaient également glissés ce qui devait être des cadeaux ou souvenirs. Pendant trois mois, le navire a traversé le Pacifique à la recherche d’autres mutins. L'équipage a visité les îles de la Société, les Îles Cook, Tokelau, Samoa, Tonga, Rotuma (aujourd’hui une dépendance spéciale des Fidji) et les Îles Salomon. Parfois ils n’ont pas posé pied à terre, se sont seulement arrêtés devant l’ile. Parfois ils ont seulement aperçu comme Vanikoro.

La frégate a finalement pris la direction de l’ouest et du détroit de Torrès. Elle s’échoua le 29 août 1791 sur la grande barrière de corail australienne. "Elle a en fait glissé sous l’eau et a été recouverte par du sable, ce qui a permis la bonne conservation des objets", explique au passage Jasmin Guenther.

Quatre prisonniers et 31 membres d’équipage perdirent la vie. Les autres gagnèrent le Timor puis Batavia sur des chaloupes. Les dix prisonniers furent jugés en Angleterre.

L’épave fut découverte en 1977 et les premières fouilles furent organisées dans les années 1980, 1990. La dernière exploration date de 1999. Plus de 6 000 objets ont été remontés. Ce sont en grande majorité des objets de navigation, de vie à bord (vaisselle, mobilier), de parties de bateau. Ils sont conservés et exposés, en partie, au Museum of Tropical Queensland.


Informations partagées

Jasmin est toujours à la recherche d'informations concernant les objets polynésiens. Elle est joignable par mail : [email protected]

Trésors polynésiens retrouvés dans l'épave de la Pandora.
  • Trésors polynésiens retrouvés dans l'épave de la Pandora.
  • Trésors polynésiens retrouvés dans l'épave de la Pandora.
  • Au musée australien.
  •  Ils sont conservés et exposés, en partie, au Museum of Tropical Queensland.


Rédigé par Delphine Barrais le Vendredi 5 Octobre 2018 à 14:26 | Lu 3603 fois