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L'éducation bienveillante comme lutte contre la violence


La devise de l'association PAT : parent autrement à Tahiti est : "Changeons le monde, en nous, pour eux ".Crédit PAT.
La devise de l'association PAT : parent autrement à Tahiti est : "Changeons le monde, en nous, pour eux ".Crédit PAT.
Papeete, le 23 octobre 2018 - La violence au sein des familles est très fréquente. Il peut s’agir de violences conjugales (qui concernent une femme sur dix) ou de violences éducatives, parfois également nommées ordinaires. Celles-ci se manifestent par des violences verbales (moqueries méprisantes, insultes…), des violences psychologiques (chantage, culpabilisation…), des violences physiques (fessée, tape sur la main…). Les châtiments corporels sont liés à notre culture et peuvent être considérés comme un type d’éducation normal. Malheureusement, ces petites violences intrafamiliales peuvent aller crescendo car elles sont inefficaces.

Chaque année les faits divers donnent un minuscule aperçu de l’ampleur des dégâts de ces violences. En effet, chaque jour, deux enfants meurent sous les coups de leurs parents. Le 20 novembre, journée des droits des enfants, des actions seront menées afin de sensibiliser et mobiliser chacun de nous afin que cela cesse.

LE PARENT EST UN MODELE DE REFERENCE POUR L'ENFANT

Depuis quelques années, on constate un mouvement (https://oveo.org) promouvant une loi contre les châtiments corporels adoptée actuellement par 53 pays. En France une proposition de loi a été faite en février 2018, et vient d’être reformulée le 17 octobre dernier. Les parents ont un rôle indéniable dans l'éducation de leurs enfants en ce qui concerne la violence. Le point clé est de bien prendre conscience que le parent est un modèle de référence pour l'enfant, ainsi que tous les adultes de son environnement. Entre autres car les enfants apprennent en imitant. Chaque parole et chaque geste sont importants car l'enfant ne fait pas de tri et cautionnera les actes de sa figure d’attachement. Un enfant humilié quotidiennement ("Tu n’es qu’un idiot", "Tu ne sais qu’embêter les autres", etc.), ou dont on tire les oreilles, dira très souvent que son parent a fait ça pour son bien.
En niant, les dégâts occasionnés par de telles pratiques, les enfants victimes protègent inconsciemment leur bourreau par amour et risquent de le perpétuer. Les enfants passent également beaucoup de temps avec leur enseignant(e). Certes l'éducation scolaire est différente de l'éducation familiale, mais le point commun réside dans le fait que l'adulte reste un modèle pour l'enfant. Il guide l’enfant dans ses apprentissages en montrant l’exemple.
D’après les études en neurosciences affectives et sociales, le cerveau n’est complètement mature que vers l’âge de 25 ans. Les jeunes enfants sont dominés par leur cerveau archaïque qui gère les émotions. Lorsque le tout-petit ressent du bien-être son cerveau est déjà capable de stimuler la sécrétion d’ocytocine. Cette hormone favorisera la maturation de son cerveau. Un bébé heureux sera donc un bébé (puis un enfant) qui se développera bien et pourra mieux gérer ses émotions (gérer ses pleurs, se calmer, être attentif…).

LA VIOLENCE INCITE LA VIOLENCE

L’éducation bienveillante, en s’appuyant sur des données scientifiques, donne des outils aux adultes afin de les guider dans l’accueil des sentiments, l’écoute active, la médiation, les alternatives à la punition, les encouragements, l’amour inconditionnel… Par ailleurs, il faut savoir que les paroles, la façon de dire les choses, l’intonation, et tout notre comportement ont un impact sur l'enfant. Si l'enfant ressent trop de stress ou de peur, il peut y avoir des conséquences sur le cerveau. L’hormone du stress (cortisol) peut devenir néfaste. La violence incite la violence. Lorsque nous avons un comportement agressif l’autre ressent l’envie de se défendre et la première réponse qu’il trouve (instinctivement?) est de faire de même (je suis insulté€ alors j’insulte, on me tape je tape.) Alors on doit apprendre à trouver une meilleure réaction permettant à la fois de se protéger et ne pas laisser passer l’agression. J’utilise le terme apprendre car notre éducation (transmise depuis des générations) est ancrée en nous. Changer un comportement avec lequel nous nous sommes construits est assez difficile. Toutefois comme j’aime à penser : quand on veut on peut ! "Crier sur son enfant c’est le marquer pour longtemps" (Fondation pour l’enfance, campagne 2018). Alors comment agir ? Il existe beaucoup de petites astuces simples à mettre en place afin de gérer notre comportement face aux enfants. La première étape est de prendre conscience justement de notre façon de nous comporter avec eux. Exemple : il est fréquent d’entendre un parent dire ce genre de phrases " arrête de faire ton bébé lala sinon tu n’auras pas de dessert " (on exprime ici une menace), " Maui ! tu es insupportable, file dans ta chambre " (on pose une étiquette : il est toujours comme ça, alors on l’isole)…

L’ENFANT A BESOIN D’UN CADRE

Ensuite, il faut essayer de comprendre ce que vit l’enfant et mettre des mots sur ses émotions. Nommer les émotions ressenties par l’enfant lui permettra de se sentir écouté, pris en considération ; il pourra ensuite mettre lui-même des mots sur ses émotions et ses sentiments. Cela développera son empathie, sa capacité à faire attention aux autres. Prendre du recul pour parvenir à se contrôler et parler calmement au maximum et avec les mots justes en tant qu’adulte. Les punitions sont inappropriées car n’apprennent rien à l’enfant qui du coup recommencera et se fera disputer à nouveau… Le message que l’on veut lui transmettre sera plus efficace si on explique les choses calmement. Enfin, il est essentiel de leur donner confiance en eux en les valorisant. Toutefois, la bienveillance ne va pas à l’encontre de l’autorité parentale, qui nécessite une certaine fermeté. L’enfant a besoin d’un cadre, il veut connaître les limites de ce cadre pour être rassuré. Alors il est important de savoir dire " stop " à son enfant.

CLEMENTINE SABLIER

L’association PAT : parent autrement à Tahiti (page facebook du même nom).

le Mardi 23 Octobre 2018 à 11:38 | Lu 3478 fois