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Vaccinations : Déploiement de la phase 2, y compris dans les îles


Tahiti, le 1er mars 2021 - Forte d’une promesse d’approvisionnement suffisamment régulière, la phase 2 de la campagne de vaccination visant les 60 ans et plus a officiellement démarré ce lundi, avec un changement stratégique majeur sur les îles, censées attendre initialement la mise sur le marché de vaccins moins contraignants. Quinze centres vont ainsi ouvrir leurs portes progressivement dans tous les archipels, à commencer par les Raromatai.     
 
"J’ai hâte de me faire vacciner comme tout le monde, il faudra bien ça pour pouvoir voyager à un moment donné." Yvon, 69 ans, attend son tour depuis des semaines. Ce jour est venu lundi, avec le lancement officiel de la phase 2 qui devrait lui permettre, à lui, comme à toutes les personnes de 60 ans et plus, mais aussi au personnel médico-social ou social, ainsi qu'aux "professions essentielles au fonctionnement du Pays"professions de la sécurité intérieure, des transports et de l’éducation–, de décrocher un rendez-vous dans un centre de vaccination à Tahiti et Moorea, mais aussi dans les îles.
 
Quinze centres répartis dans tous les archipels vont ainsi ouvrir leur porte progressivement, à commencer par les Raromatai dès cette semaine. Un changement stratégique important, alors que le déploiement du dispositif dans les îles était initialement soumis à l'autorisation de mise sur le marché (AMM) d'autres vaccins que Pfizer/BioNTech. Pour des questions de conservation et de maîtrise de la chaîne du froid notamment.
 
"Ce n’est pas tant le transport qui est compliqué, c’est surtout qu’il ne soit pas trop secoué. Or, les études qui ont permis la mise sur le marché de ce vaccin-là ne s’étaient pas encore penchées sur sa stabilité dans différentes situations et dans différents moyens de transports, précise Pierrick Adam, responsable de la campagne de vaccination. Ces études-là commencent à arriver. On a aujourd’hui la sécurité de pouvoir dire qu’on peut passer de -80 degrés à un congélateur moins puissant, à -15 degrés, pendant deux semaines."
 
2 340 doses attendues par semaine en mars
 
Reste cependant la problématique de la décongélation, toujours soumise à cinq jours d’utilisation. "On n’a pas encore les études qui permettent de dire qu’on peut étendre à dix jours, ce qui serait vraiment confortable. Moderna, par exemple, permet cette conservation à 30 jours dans un frigo. Pfizer n’en est pas encore là", poursuit le responsable. N’ayant pas la main sur les livraisons des autres marques, les autorités ont décidé de déployer le dispositif dans les archipels via un système de "dotation hebdomadaire" par île, en fonction de leurs capacités d’ouvertures et de leur population. "On ne peut plus attendre les autres vaccins. (…) On va intégrer tout le monde. L’idée, c’est de ne pas gâcher des doses, il faut que l’on voie large, que chaque commune et chaque île puisse recalibrer la stratégie d’un point de vue plus local, en priorisant les personnes les plus à risque", indique Pierrick Adam.
 
Contrairement à Tahiti et Moorea, tout le monde est éligible à la vaccination dans les îles à partir de 18 ans et plus, avec une priorisation bien-sûr sur les 60 ans et plus, les personnes vulnérables et les professions essentielles.
 
Interrogé sur la visibilité sur les approvisionnements, le responsable indique qu’une livraison de 2 340 doses est arrivée samedi et devrait être suivie d’une livraison équivalente chaque semaine jusqu’à la fin du mois de mars. En attendant d’avoir cette assurance de recevoir la "denrée précieuse" de "façon assez fréquente", les autorités sanitaires reconnaissent une "petite baisse de régime" de la campagne ces derniers jours. Question de précaution. "On ne pouvait pas lancer la phase 2 pour se retrouver en rupture de stock, car contrairement à la phase 1 qui compte environ 7 000 personnes, en phase 2 on compte 30 000 personnes uniquement sur Tahiti et Moorea."
 
Si les dernières livraisons permettent de "satisfaire les cadences actuelles", le responsable espère "évidemment (…) que les doses vont arriver, mais on n’est jamais sûr de rien." Rappelons qu’à ce jour 6 773 personnes ont reçu la première dose et 3 324 personnes les deux doses de vaccin).
 

​Eliane Lehartel, 68 ans : "J’étais contre ce vaccin jusqu’à ce que je perde un ami"

Vous êtes contente d’avoir enfin reçu la première dose du vaccin ?
Il y a quelques mois, voire encore en janvier, j’étais contre les vaccins. Et quand j’ai perdu un ami proche, âgé de 78 ans, qui n’avait pas de pathologie particulière, qui a été foudroyé et emporté en moins de cinq jours par la Covid, là j’ai commencé à avoir peur, vraiment. On a donc commencé à faire vacciner notre mère, 88 ans, la semaine dernière. Elle aussi elle était hésitante. Et quand on a appris que la seconde phase allait commencer, on s’est inscrit, mon frère et moi, d’abord pour se protéger soi-même et pour pouvoir protéger les plus anciens. On ne pouvait même plus aller les voir, on ne pouvait plus rien faire. Je me suis dit que j’allais faire confiance à ce vaccin.
 
Vous êtes soulagés aujourd’hui ?
Oui. Je n’ai pris que la première dose, je serais vraiment vacciné la semaine prochaine. Je suis soulagée parce que j’ai pleinement confiance maintenant dans ce vaccin. On est obligé de toute façon. Et après réflexion, je me dis qu’on fait partie de ces générations qui ont grandi avec le vaccin. J’ai eu le BCG, le vaccin contre le tétanos, j’ai eu une dizaine de vaccins. C’est vrai que celui-là était un peu rapide, mais si ça peut me protéger et protéger les autres, allons-y, faisons confiance et, peut-être, dans les temps à venir, on pourra enfin s’embrasser et vivre normalement.
 
Est-ce que vous avez un message à faire passer ?
Je voudrais en profiter pour remercier les jeunes. Parce que ceux qui souffrent le plus de privation, c’est eux. Ils ne peuvent plus faire du sport ensemble, ni aller en boîte. Beaucoup d’entre eux vont perdre leur emploi. Moi, j’ai 68 ans. Je suis à la retraite. Ce n’est pas une privation pour moi de rester confiner, mais je pense à mes neveux, à tous les jeunes de ce pays qui se sacrifient pour que nous, nous restions en vie. À tous ces jeunes, je dis māuruuru pour votre sacrifice. Et quand votre tour viendra, faites-vous vacciner pour protéger vos proches, parce que si vous avez la capacité d’encaisser le choc, vos parents ou vos grands-parents ne l’auront peut-être pas.
 

Rédigé par Esther Cunéo le Lundi 1 Mars 2021 à 18:29 | Lu 2868 fois