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Chute du gouvernement de Nouvelle-Calédonie sur fond de guerre des droites


Nouméa, France | AFP | mardi 16/12/2014 - Six mois après son installation, le gouvernement de Nouvelle-Calédonie est tombé mardi, nouvel épisode d'une guerre des droites non indépendantistes qui se prolonge depuis une quinzaine d'années.

Cette chute a été entraînée par le départ des "ministres" de Calédonie Ensemble (centre droit), en rétorsion contre un autre parti, le Front pour l'Unité, proche de l'UMP qui s'était opposé à des textes fiscaux.

"Nous ne pouvons accepter le revirement totalement injustifiable et inacceptable du Front pour l'Unité" (FPU), a expliqué Philippe Michel, un des ténors de Calédonie Ensemble (CE).

La démission des trois CE a automatiquement entraîné la chute de tout l'exécutif, composé de onze "ministres": six non-indépendantistes, cinq indépendantistes.

Cette crise est le dernier avatar de la guerre que se livrent depuis une dizaine d'années les leaders de la droite non-indépendantiste, aux profondes inimitiés.

Au lendemain des élections provinciales de mai dernier, les trois principaux mouvements - CE, FPU et l'Union pour la Calédonie dans la France (UCF, également proche de l'UMP) - avaient signé, la mort dans l'âme, un "Contrat de gouvernance solidaire" (CGS) pour garantir la stabilité des institutions.

Les non-indépendantistes avaient remporté 29 sièges - dont 15 pour CE - sur 54 au Congrès, tandis que les indépendantistes kanaks, eux aussi en proie à des divisions, obtenaient 25 élus.

Outre un partage des postes au sommet des institutions, le contrat avait été assorti en août d'un "agenda fiscal partagé", fixant une série de réformes pour rétablir les équilibres budgétaires des collectivités, combler les déficits sociaux, mieux répartir la pression fiscale et relancer la croissance.

Trois nouveaux impôts proposés

Dans ce cadre, la création de trois nouveaux impôts était proposée lundi aux élus du Congrès. Ils ont sonné le glas de la fragile "gouvernance solidaire".

CE n'a pas accepté que le FPU ne vote pas ces textes, adoptés de justesse avec l'aval de l'UCF et d'une partie des indépendantistes.

"Sous l'autorité de Pierre Frogier (sénateur UMP), le FPU a décidé de fossoyer le CGS. Il pratique une politique de la terre brûlée et renie ses engagements", a accusé Philippe Michel, revendiquant pour son parti la présidence du prochain exécutif.

Calédonie Ensemble, dont le leader est le député UDI Philippe Gomès, reproche en outre au FPU de "refuser tout débat" sur la sortie de l'accord de Nouméa, qui prévoit, au plus tard en 2018, la tenue d'un référendum d'autodétermination dans ce territoire en cours de décolonisation.

"Ils préfèrent miser sur un retour providentiel de Nicolas Sarkozy en 2017", dénonce-t-on à CE.

Les responsables du FPU ont donné un autre son de cloche, affirmant que la réforme fiscale "leur avait été imposée".

"Ce package revient à appliquer la politique socialiste de matraquage fiscal (...) destinée à fabriquer du chômage", a déclaré Thierry Santa, secrétaire général du FPU.

Ce parti a accusé CE de "vouloir enterrer la TVA", qui n'est pas en vigueur en Nouvelle-Calédonie, prônant "une fiscalité douce pour ne pas faire fuir les investisseurs".

Présidente du gouvernement déchu, Cynthia Ligeard, pourtant membre du FPU, ne s'est pas exprimée et serait, selon des sources internes, en désaccord avec ces positions.

Lundi devant les élus du Congrès, elle avait déclaré "croire en la réforme possible de la Nouvelle-Calédonie" et appelé chacun "à la responsabilité".

De son côté, Gaël Yanno, président du Congrès et chef de file du troisième parti non-indépendantiste, l'UCF, a jugé "incompréhensible la rupture" provoquée par le FPU.

Dans les rangs indépendantistes, Louis Mapou, chef du groupe UNI (Union nationale pour l'Indépendance) a estimé "regrettable" le vote du FPU, "alors que ces textes traduisent une volonté d'aller de l'avant".

Un nouvel exécutif sera élu dans les quinze jours par les 54 membres du Congrès, au scrutin de liste proportionnel.


Rédigé par () le Lundi 15 Décembre 2014 à 14:22 | Lu 1196 fois