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Zones franches : les syndicats ne veulent pas qu’on touche au Code du travail


Cyril Le Gayic, secrétaire général de la CSIP souhaite la création de contrats exceptionnels d’insertion professionnelle en alternance réservés aux zones franches, durant la seule phase de construction.
Cyril Le Gayic, secrétaire général de la CSIP souhaite la création de contrats exceptionnels d’insertion professionnelle en alternance réservés aux zones franches, durant la seule phase de construction.
PAPEETE, le 6 août 2014. Le texte du projet de loi de Pays sur la zone franche du Mahana Beach à Punaauia, présenté mardi soir lors d'une réunion tripartite (gouvernement, syndicats, patronat) a fait réagir les organisations syndicales. Les syndicats ne sont pas opposés aux zones franches, au contraire, mais pas dans les dispositions prévues par le gouvernement. «On ne touche pas au code du travail, aux conventions collectives existantes, on ne modifie pas la base réglementaire du Smig. En revanche, nous ne sommes pas opposés à la création d’un contrat exceptionnel d’insertion et de formation professionnelle sur les grands chantiers». A la CSIP, le secrétaire général Cyril Le Gayic insiste sur le fait que ce sont les centrales syndicales elles-mêmes qui ont proposé au gouvernement Flosse la création de zones franches. «Le principe selon ce qui a été avancé pendant ces réunions par A Ti’a i Mua et la CSTP/FO était la mise en place d’un contrat d’insertion professionnelle en alternance».

Des contrats qui seraient proposés aux plus de 12 000 chômeurs inscrits sur le territoire afin qu’ils puissent, pendant la durée des grands chantiers (3 à 5 ans) travailler et se qualifier dans les métiers du BTP ou de l’industrie. Les syndicats estiment que les 2/3 au moins des chômeurs polynésiens actuels pourraient être concernés. Ces contrats d’insertion professionnelle exceptionnels de 169 heures par mois, auraient pu être payés 120 675 Fcfp, avec 135 heures travaillées et le reste en formation. Des contrats exceptionnels qui ne pourraient être mis en place que sur les zones franches (Tahiti Mahana Beach, Moorea Mahana Beach et Outumaoro), réservés aux secteurs du BTP et de l’industrie, et seulement durant la phase de construction de ces complexes touristiques et hôteliers. Une fois les complexes construits, la phase d'exploitation laisserait la place dans les trois secteurs aux conditions normales du droit du travail polynésien.

Aussi, à la lecture du projet de loi du Pays présenté par le gouvernement mardi soir, la stupeur l’a emporté chez les représentants syndicaux. Et pas seulement. «Quand le directeur du travail a dit le droit, ça a jeté un froid (…) Nous ne nous opposons pas systématiquement aux projets du gouvernement mais il faut quand même construire quelque chose de solide. On ne veut pas comme à Nouméa donner de l’emploi pendant quelques années à des milliers de personnes et puis plus rien après» précise Cyril Le Gayic. Dès mardi soir, le gouvernement a été prévenu : si le texte est présenté sans modification à l’Assemblée territoriale, des recours seront déposés ce qui retarderait l’ouverture du chantier du Mahana Beach à Punaauia. De quoi ralentir la marche forcée du président qui prévoit un lancement des travaux en octobre/novembre.


Sur le même sujet, lire également la réaction du syndicat A Ti'a i Mua, en CLIQUANT ICI


Réaction du syndicat de la fonction publique : avec un Smig à 108 000 Fcfp nets, on ne vit pas, on survit

Le SFP s’inquiète des projets sociaux gouvernementaux dans un long communiqué, Vadim Toumaniantz, le secrétaire général du syndicat s'est livré à une analyse. Il indique en préambule que l'instauration sur la zone franche du Mahana Beach, fixe un salaire mensuel minimum de développement à 120 000 Fcfp brut (soit 108000 FCFP net). «Ce "sous-SMIG" accroîtra ainsi les inégalités déjà très fortes existant entre riches et pauvres. En abaissant le salaire des personnes les plus vulnérables, on accentuera le développement d’une classe de personnes en grande précarité… mais travaillant (...) Sur l’autel de l’argent et du capitalisme rien n’est jamais assez. Si encore les mesures prises visaient à réduire les écarts entre riches et pauvres et à rééquilibrer notre société… Mais là, les mesures sont uniquement destinées à appauvrir et rendre encore plus vulnérables des personnes déjà en grande difficulté. Car, ne nous faisons pas d’illusion, aujourd’hui avec un SMIG, on ne vit pas ! On survit !».

Le SFP remarque encore que le Pays prendra à sa charge de nombreux investissements (viabilisation, remblais etc.). Par conséquent, les promoteurs verront leurs avantages accrus et donc leur rentabilité progresser sur le dos des plus démunis, et de l’ensemble des contribuables polynésiens. Le syndicat pose donc une question centrale : "les propositions gouvernementales ont au moins l’audace de soulever indirectement une question de fond importante : dans quel type de société souhaitons-nous vivre ? Voulons-nous nous soumettre à un capitalisme outrancier qui n’a que faire des travailleurs, un capitalisme pour lequel « la main d’œuvre » n’est qu’un intrant parmi d’autres, c'est-à-dire corvéable, malléable et interchangeable à souhait ?". Le syndicat de la fonction publique s'inquiète, enfin, de la limite de ces zones franches et de leurs dispositions spéciales. "Qui nous garantirait qu’elles ne soient que transitoires et géographiquement limitées au projet Mahana Beach ? Nous avons été tellement habitués à ces aménagements dit «transitoires», qui durent finalement depuis des décennies !"


Pour lire le communiqué du SFP dans son intégralité, CLIQUER ICI

Rédigé par Mireille Loubet le Mercredi 6 Août 2014 à 17:45 | Lu 2281 fois