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Pour un nouvel hôpital à Taravao


À travers Marania Penanhoat, Laurent Bonnamy, Henri Loquet et leurs confrères, ce sont plusieurs générations de professionnels de santé qui se mobilisent.
À travers Marania Penanhoat, Laurent Bonnamy, Henri Loquet et leurs confrères, ce sont plusieurs générations de professionnels de santé qui se mobilisent.
Tahiti, le 11 mai 2025 – Quinze médecins de la Presqu’île ont co-signé un courrier adressé le mois dernier au président de la Polynésie française et au ministre de la Santé. Ils y plaident la nécessité d’un renforcement de l’offre hospitalière à Taravao. Un “projet d’intérêt public” qu’ils souhaitent soutenir “activement”, au même titre que la communauté de communes Terehēamanu.

 
Avec des plans dans les cartons depuis de nombreuses années, le projet de nouvel hôpital au sud de Tahiti peine à se concrétiser. Dans un courrier adressé au mois d’avril au président de la Polynésie française, Moetai Brotherson, et au ministre de la Santé, Cédric Mercadal, quinze médecins libéraux et du service public soulignent qu’il “devient indispensable d’envisager une modernisation profonde ou la construction d’un nouvel établissement hospitalier structurant pour notre région”.

Prêts à “soutenir activement ce projet d’intérêt public” et à participer à la “constitution d’un comité de pilotage intercommunal et interinstitutionnel”, les professionnels de santé listent cinq priorités : un service d’urgences performant accessible 24h/24 ; une maternité de proximité pour répondre aux besoins des familles ; un plateau technique moderne (imagerie, blocs opératoires, chimiothérapie) ; une unité de télémédecine en lien avec le centre hospitalier de la Polynésie française (CHPF) ; et une capacité d’hospitalisation adaptée aux besoins avec des lits supplémentaires.
 

Des besoins croissants


“On a besoin d’une structure hospitalière digne de ce nom. On est 55.000 habitants de Papara à Hitia’a o te ra et la population vieillit”, rappelle Henri Loquet, médecin généraliste depuis une quarantaine d’années à Taravao. “On a de plus en plus de patients pour lesquels on a besoin d’un rapport avec l’hôpital, car la population a de plus en plus de problèmes de santé avec des maladies chroniques, cardiovasculaires et des cancers. Ce suivi se fait souvent avec le Taaone, car l’hôpital de Taravao n’est pas doté de certains moyens, comme un scanner. Ça permettrait de désengorger le CHPF et les cliniques en ville”, poursuit Marania Penanhoat, médecin généraliste de 34 ans.

L’hôpital de Taravao a enregistré une augmentation des activités de l’ordre de 30% en un an. Malgré des améliorations apportées ces dernières années (unité de chimiothérapie, hélistation, centre de santé et de prévention, dépôt de sang, travaux de rénovation), une partie des locaux reste vétuste, les ressources humaines sont à flux tendu et certains services manquent toujours à l’appel.

Unique gynécologue du secteur depuis 2006, Laurent Bonnamy continue de dresser le même constat : “On a de plus en plus de population et de demandes pour accoucher à la Presqu’île. En théorie, on a aujourd’hui à peu près 1.200 accouchements par an à prévoir. Les patientes ont de plus en plus de soucis à se rendre dans les lieux d’accouchement centralisés en ville. Depuis une bonne quinzaine d’années, je signale aux autorités ce phénomène. On avait même fait une pétition avec 1.000 patientes... Je pense qu’on arrive vraiment à un point de rupture et de saturation. Le moment est venu de prendre la décision d’avoir une structure dédiée à Taravao”.
 

“Ne pas perdre de temps”


La communauté de communes Terehēamanu (Papara, Teva i Uta, Taiarapu-Est, Taiarapu-Ouest et Hitia’a o te Ra) se mobilise aux côtés des médecins. “Le développement de la Presqu’île ne peut pas se faire sans la création d’un nouvel hôpital”, défend son président, Tearii Alpha. “Nous nous sommes déjà réunis avec les élus, les professionnels de santé et la directrice de l’hôpital, et nous allons nous réunir à nouveau pour aboutir à un projet écrit qui sera présenté au Pays et à l’État, pour les convaincre qu’ils ne sont pas tout seuls (...). Il ne faut pas perdre de temps, car avant d’inaugurer un hôpital, il peut se passer une décennie ! Le nouveau Schéma d’organisation sanitaire est attendu, mais il ne peut que conforter le projet d’hôpital à Taravao”, ajoute-t-il.

Le représentant des communes du sud de Tahiti est favorable à une mutualisation des moyens publics et privés pour venir à bout de ce projet qui pourrait atteindre près de 30 milliards de francs. Une piste évoquée en décembre dernier par le ministre de la Santé en marge du conseil des ministres délocalisé à Taiarapu-Est, lors duquel le représentant du gouvernement avait annoncé un appel à manifestation d’intérêt au premier semestre 2025 pour préciser les contours de cette approche.
 

Rédigé par Anne-Charlotte Lehartel le Dimanche 11 Mai 2025 à 16:24 | Lu 4158 fois