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Pas de répit pour le thon obèse, mal en point, dans l'Atlantique


Dubrovnik, Croatie | AFP | lundi 19/11/2018 - Après avoir sauvé le thon rouge, le secteur de la pêche a échoué lundi à prendre des mesures strictes pour préserver une autre espèce, le thon obèse, dans l'Atlantique, à l'issue de difficiles négociations.

La Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (Cicta, Iccat en anglais) devait acter cet échec en session plénière lundi, dernier jour de sa 21e réunion extraordinaire à Dubrovnik en Croatie.
Une cinquantaine d'Etats et l'Union européenne, des représentants de flottes de pêche et d'ONG, des scientifiques, se sont penchés sur l'avenir du thon obèse. Le constat est partagé: les stocks du Thunnus obesus, ou patudo, sont dans le rouge à cause de la surpêche et de la mortalité importante de thons juvéniles.
Depuis huit jours, plusieurs propositions ont été mises sur la table. La dernière en date, faite par l'Afrique du Sud et amendée, proposait "un programme de rétablissement" du thon obèse jusqu'en 2033.
Ce texte fixait un quota annuel de pêche de 62.500 tonnes de 2019 à 2021. Le quota actuel est de 65.000 tonnes, mais ne concerne que sept parties prenantes, dont le Japon et l'UE, principaux pêcheurs de thons obèses, mais aussi la Chine, la Corée du Sud ou le Ghana.
Les autres pays échappent aux quotas. Résultat, en 2017, le total des prises a frôlé 80.000 tonnes.
Pour y remédier, le texte proposait d'inclure les pays ayant pêché plus de 1.575 tonnes au cours des cinq dernières années dans le nouveau quota. Sous ce régime, le Brésil, Belize, Curaçao, le Guatemala, le Panama ou le Sénégal auraient été soumis à des limites de pêche.
Le nombre des DCP, des radeaux flottants servant d'appât pour les poissons, qui captent beaucoup de jeunes thons, devait passer de 375 par navire en 2019 à 200 en 2022 et leur usage être interdit en janvier et février dans tout l'Atlantique, sauf exception.
 

- "Une mauvaise nouvelle" -

 
Mais dimanche soir, malgré une réunion de travail prolongée, aucun consensus n'a été trouvé sur cette  proposition.
"Une déception", lâchait lundi un participant, résumant un sentiment partagé par d'autres. "C'est un échec, une mauvaise nouvelle", abondait Javier Garat Pérez, secrétaire général de la Confédération espagnole de pêche.
Le thon obèse, apprécié en sashimi, représente un enjeu de plusieurs milliards d'euros pour l'industrie. Mais au niveau de pêche actuel, la probabilité que le stock se reconstitue d'ici 2033 est quasi nulle, à 1%.
Faute de consensus, les conditions actuelles - quota de 65.000 tonnes et moratoire partiel sur les DCP - devraient être reconduites jusqu'à la prochaine réunion de la Cicta, dans un an.
"Ça va encore détériorer le stock qui est dans un état lamentable. Si on n'arrive pas à un consensus l'année prochaine, c'est la catastrophe", a déclaré Yvon Riva, président de l'organisation professionnelle française Orthongel, à l'AFP.
A qui la faute? Chacun était prompt à montrer l'autre du doigt. Pour le représentant d'un État côtier d'Afrique, qui comme d'autres plaident le droit à développer son industrie, les principaux pays pêcheurs n'ont pas joué le jeu.
Javier Garat Pérez a reproché aux Etats asiatiques "d'avoir tenté d'éviter toute mesure pouvant affecter leur flotte de palangriers", quand les Européens "sont prêts à faire des sacrifices".
D'autres relèvent l'opposition de pays sud-américains, qui abritent sous leurs pavillons des navires espagnols.
"La Cicta ne semble pas avoir retenu la leçon du thon rouge", a déploré Orthongel.
En 2007, la perspective de voir l'une des trois espèces de thon rouge (Thunnus thynnus) ajoutée à la liste de l'ONU des espèces menacées avait conduit la Cicta à adopter, après plusieurs années d'atermoiement, des quotas de pêche et des mesures de protection drastiques dans l'Atlantique-Est et en Méditerranée. Ces décisions ont permis aux stocks de se rétablir et, à Dubrovnik, il est question de passer d'un plan de rétablissement des stocks à un plan de gestion.
Les discussions se poursuivaient lundi midi.

le Lundi 19 Novembre 2018 à 03:31 | Lu 386 fois