Tahiti Infos

[PHOTOS] 4750 joueurs de ukulele s'emparent du record du monde


PAPEETE, le 11 avril 2015 – « Te mata nei au » chantonne Maiana, une quinquagénaire joviale venue de Papara, à l’autre bout de Tahiti. Ce samedi après-midi, une bonne partie des Tahitiens a convergé vers Papeete.

L’enjeu était d’importance : ils voulaient battre le record du monde du ukulele, détenu par… les Anglais. Les British avaient réuni 2370 musiciens en juillet 2014. Impensable pour les Polynésiens de ne pas pulvériser ce record, et ils se bousculaient autour de To’ata dès 13h… Même si les Américains s’attaqueront au record dès la semaine prochaine, le 18 avril, à Los Angeles. Mais ils auront du pain sur la planche, avec presque 5000 personnes présentes (et 3000 de plus à l'extérieur), dont 4750 officiellement comptées par les témoins et l'huissier.

>> La vidéo du record partagée par la Maison de la culture :

Malgré quelques averses, énormément de queues et une heure de retard (le temps d'arriver à remplir le moindre espace légalement utilisable de Toa'ata), rien n'a arrêté la foule de musiciens. C'est que l'attente était musicale, familiale et colorée puisque presque tous les ukulelistes sont venus en tenues locales. Les 3000 personnes qui ont dû rester à l’extérieur de l’enceinte faute de place ont pu jouer et chanter en même temps que ceux à l'intérieur grâce à un écran géant aménagé pour eux.

« Je suis né avec un ukulele dans les mains, alors ça me touche le cœur de les voir tous jouer ensemble » s’émeut Emile Ariipeu, un caméraman devenu le chef d’orchestre de l’événement : la tentative de record du monde est organisée par sa chaîne, TNTV, et a été relayée en direct pendant une heure et demie.

Dans le public, Franck Tiaahu est venu avec plusieurs dizaines de collègues de sa banque : « dans notre entreprise, on prend des cours deux fois par semaine depuis plus d’un mois, et même tous les jours depuis une semaine, ça va, on est au point ! » sourit-il.

DSC_1045
  • DSC_1045
  • DSC_1050
  • DSC_1055
  • DSC_1062
  • DSC_1064
Des centaines de participants des îles

Certains sont même venus en avion des archipels éloignés, comme les Marquises, les Tuamotu ou les Australes. 120 sont venus de Moorea avec le ferry, qui s'était transformé à l'aller en bateau de répétition, et au retour en bringue flottante. Teiva Teriivahine, lui, a joué au milieu d’une quarantaine d’habitants de Bora Bora : « la chanson du record, c’est la nôtre, c’est un peu grâce à Bora Bora qu’on va gagner » se félicite-t-il.

« Ça montre que les gens ont besoin de partage : on a choisi de jouer des grands classiques de bringues et des familles, et on a des milliers de musiciens qui sont tous synchro » a analysé la star locale Andy Tupaia, qui a accompagné à la voix plusieurs des chansons du programme.

« Il n’y a pas une famille polynésienne où on ne trouve pas un ukulele qui traîne, c’est l’instrument sur lequel on pleure son chagrin » a déclaré le président de la Polynésie française Edouard Fritch, avant de monter sur scène pour jouer aux côtés des stars tahitiennes et hawaiennes qui ont assuré le show aux intermittences, tandis que de nombreuses personnalités politiques grattaient aussi les quatre cordes de leurs ukulele, mélangées au public et souvent en famille.

Le président a admis avoir commencé à apprendre l'instrument il y a quelques mois, comme finalement beaucoup des participants. Le record aura donné assez de motivation à de nombreux musiciens en herbe pour se lancer, et l'organisation avait prévu assez de ressources pédagogiques pour faciliter ce travail. Patricia, qui a commencé à apprendre le ukulele un mois avant le record et a pratiqué tous les jours, a « eu l'impression de progresser de quatre mois » le soir du record, emportée par l'énergie de la foule.

DSC_1067
  • DSC_1067
  • DSC_1069
  • DSC_1070
  • DSC_1076
  • DSC_1079
Deux tentatives pour un record

A 17h, les présentateurs ont entamé la tentative de record. Toute la place s'est mise à vibrer à la mélodie de « Bora Bora », une chanson d’Eddy Lund. Les débutants fixaient les écrans géants, sur lesquels les quatre accords défilaient en temps réel. Mais à la fin de la chanson, la foule est devenue silencieuse, sentant que quelque chose n'allait pas. Et effectivement l'annonce est tombée : le record n'a pas pu être validé. La chanson avait été trop courte, et les musiciens ont chanté trop fort alors que « c’est le ukulele qui doit dominer. »

La place a alors recommencé à jouer, en murmurant les paroles, pendant les cinq minutes réglementaires. Des grands gestes des deux présentateurs (Maite Mai, qui présente généralement le journal de TNTV, et Rai, présentateur sur la chaîne) ont fait comprendre à la foule que les cinq minutes étaient passées et que le défi était relevé. L'énergie contenue a alors explosé et tous les musiciens ont terminé la chanson à pleins poumons. Ils ont enchaîné sur la chanson Porinetia ("Polynésie") de Bobby, en hommage à la victoire symbolique mais oh combien importante de tout un peuple. Même les vigiles ont chanté en riant, au milieu de quelques drapeaux polynésiens brandis dans un patriotisme bon enfant.

Quelques minutes plus tard, l'huissier de justice, Me Jean-Pierre Elie, est monté sur scène pour valider le record : 4750 Polynésiens ont joué simultanément. Nous avons fait presque deux fois mieux que les Anglais. Ce nombre sera officiellement soumis au livre Guinness des records.

« C’est un instrument qui vient à la base de Braga, au Portugal, mais les Polynésiens se le sont approprié : on est presque 5000 aujourd’hui, faute de place, mais si les Américains nous battent, on sera 10 000 à Pater en aout ! » a conclu, en forme de promesse, le ministre de la culture Heremoana Maamaatuaiahutapu.

DSC_1099
  • DSC_1099
  • DSC_1104
  • DSC_1107
  • DSC_1109
  • DSC_1143

DSC_1115
  • DSC_1115
  • DSC_1125
  • DSC_1146
  • DSC_1153
  • DSC_1112

DSC_1159
  • DSC_1159
  • DSC_1161
  • DSC_1163
  • DSC_1164
  • DSC_1168

DSC_1169
  • DSC_1169
  • DSC_1170
  • DSC_1172
  • DSC_1173
  • DSC_1175

Daniel et un ami
Daniel et un ami
« Je suis venu avec tout le monde pour le record, on était au milieu de la fosse. C’était sympa, malgré les retards, mais on commence à fatiguer… Quand on a réussi j’étais heureux, c’était pour ça que je suis venu, pour battre les Anglais. La prochaine fois, ce sont les américains. S’ils nous battent, je reviendrai, peut-être avec mes enfants ! »

Ku’ulei entourée de son père et de Kelvin
Ku’ulei entourée de son père et de Kelvin
« C’était magnifique cette après-midi. Jouer à 5000 personnes… pourtant j’ai trouvé ça familial comme ambiance. Là on estbien, la culture polynésienne est une culture très belle, et le record est battu.

C’était notre sortie familiale. Toute la famille joue du ukulele, on fait souvent la bringue ! »

Lorène et Aurélien
Lorène et Aurélien
« Ça fait un an et demi que je suis à Tahiti, an pour Aurélien. On savait jouer du ukulele avant de venir. Ce qui nous a attiré c’est ce grand rassemblement de ukuleles. Et on a appris un chant en tahitien, Bora Bora. Pour les autres, on a improvisé… On a suivi sur l’écran, copié sur les autres. Ce que j’ai adoré c’est l’harmonie de tout le monde qui joue en même temps, les couleurs, comment tout le monde était habillé. C’était magnifique. Vive Tahiti et vive la Polynésie ! »

Une photo prise par drone avant que la place To'ata ne soit totalement remplie :

(crédit : Maison de la culture)

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Samedi 11 Avril 2015 à 20:48 | Lu 10450 fois