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Orientations budgétaires ou programme politique ?


PAPEETE, lundi 12 novembre 2012. Le débat d’orientation budgétaire (DOB) 2013 était au menu de la 5e séance de la session budgétaire des représentants de Polynésie française, ce lundi Entre les différents groupes, le débat a surtout été politique.
Pour ce débat à l’assemblée, le gouvernement d’Oscar Temaru était au grand complet et a dû attendre les représentants retardataires pendant une vingtaine de minutes pour démarrer. Ce débat, qui doit avoir lieu normalement dans les deux mois qui précédent l’examen du budget primitif, arrive un peu tard, puisque ce budget primitif doit être adopté avant la fin de l’année 2012. Il ne reste donc que quelques semaines, or de l’aveu même du vice-président Antony Geros, ce budget 2013 va être très délicat à équilibrer. En effet, la perte de 20 milliards de Fcfp de recettes fiscales en quatre ans ne s’est pas arrêtée, au contraire. Entre le vote du budget primitif 2012 et la réalisation de cette année budgétaire, encore 3 milliards de Fcfp de recettes fiscales ont disparu.

Pour contrer cette fonte inéluctable des recettes fiscales du Pays, le gouvernement d’Oscar Temaru mise sur une réorientation globale de l’économie de la Polynésie française. «Le réveil est brutal et nous impose de penser différemment, de réorienter notre économie sur nos propres ressources» expliquait Antony Geros. La lecture de ce document d’une centaine de pages par les représentants des différents groupes de l’assemblée a été, bien entendu, très différente selon l’appartenance politique, et les joutes oratoires ont été frontales, particulièrement avec le Tahoeraa. Une fois les déclarations de MM. Fritch et Temeharo faites, le président Temaru qui n’est jamais intervenu directement durant la séance a quitté la salle. «Il y a beaucoup de mauvaise foi et surtout aucune proposition de leur part. Moi j’ai un rendez-vous qui m’attend» déclarait le président Temaru aux journalistes venus l’interroger.

Eleanor Parker (Te Mana O Te Mau Motu)

«Ce budget n’est pas un budget comme les autres. Il a vocation à être exécuté par un autre gouvernement. C’est dans ce sens qu’il serait souhaitable de nous entendre sur des objectifs communs et comment les réaliser (…) Le développement endogène c’est bien : faire baisser les importations, pêcher plus de thons, etc. J’adhère à cette vision du gouvernement. Mais nous devons aller plus loin : nous devons vendre et échanger, faire de notre pays une plateforme d’échanges (…) Les élections approchent : il ne faut tomber ni dans la fatalité, ni dans l’utopie».

Philip Schyle (non inscrit)


« Tout un chacun le dira à juste titre : le rapport des orientations budgétaires du gouvernement pour 2013 fleure les élections. Autrement, comment justifier un "plan d'immédiateté" pour 2013, alors que le gouvernement n'en a prévu ni en 2011 ni en 2012 (…) La confiance n'est-elle pas en définitive l'une des clés essentielles pour sortir notre pays de la spirale de crise, dans laquelle il est inexorablement enfoncé depuis plusieurs années. Or, le rapport n'en parle pratiquement pas, hormis la référence à la promotion du capital humain (…) Plus qu'un débat d'orientation budgétaire, c'est un débat de confiance qu'il faudrait engager aujourd'hui».

René Temeharo (Tahoeraa Huiraatira)

«Ce que nous avons bien compris, c’est que 2013 risque d’être pire que 2012, et que vous ne disposez pas des leviers suffisants pour redresser la situation(...) C’est ce que vous appelez, dans un joli vocabulaire, « une trajectoire favorable d’attente » (…) Au-delà de l’immédiateté de certaines mesures, nous avons bien compris que, à l’aube d’une échéance électorale capitale pour le pays, votre principale préoccupation avait été de faire rédiger par nos services, et au besoin en faisant appel à des prestataires extérieurs, les bases de votre futur programme électoral».


Orientations budgétaires ou programme politique ?
Sandra Levy-Agami (non inscrite)

«Le DOB tente de nous faire croire que le prix des hydrocarbures va baisser, que l’électricité également, que la pension pour les femmes aux foyers sera accordée et que le « moni ruau » sera automatique dès 60 ans ! .... Comment le croire ? Après plus d’un an et demi de gouvernance, pourquoi ces mesures n’ont pas été prises avant ? Peut-être par ce que ce ne sont que des promesses électorales non financées. On sent que les élections territoriales approchent à grand pas ».

Orientations budgétaires ou programme politique ?
Rosine Brodien (To Tatou Ai’a)

«Je ne pense pas qu’il soit possible de construire un budget en augmentant les dépenses sans recettes nouvelles (…) La marge de manœuvre dont dispose la collectivité pour, notamment financer et initier ses dépenses d’équipement est indisponible puisque l’épargne nette est redevenue négative de 497 millions Fcfp (…) Et la situation de l’endettement est devenue préoccupante et la capacité d’emprunts relève bientôt du miracle. Encore un plan de relance tué dans l’œuf !»
rosine_brodien_dob.doc Rosine Brodien DOB.doc  (189.5 Ko)

Orientations budgétaires ou programme politique ?
Armelle Merceron (Ia Ora Te Fenua)

«Depuis que vous avez décidé de reprendre le pouvoir vous reconnaissez l’impasse dans laquelle notre pays se trouve puisque vous vous heurtez à la réalité budgétaire et aux exigences des financiers et de l’Etat. Mais hélas en 18 mois (sans instabilité !) vous avez démontré l’inefficacité de votre action : les indicateurs sont toujours aussi désastreux et la confiance des entrepreneurs, des investisseurs, des prêteurs et des ménages polynésiens ne revient pas. Là ou il fallait un traitement puissant, vous avez préféré l’homéopathie ou l’attente … des aides de l’Etat (…) Il me vient à l’esprit, monsieur le président, les accusations particulièrement agressives que vous lanciez aux autonomistes supposés, selon vous, être tenus en laisse par l’Etat colonisateur. Vous, vous êtes mis tout seul le collier avec la laisse».

Orientations budgétaires ou programme politique ?
Victor Maamaatuaiahupatu (UPLD)

«L’économie du pays n’avance pas quand la loi n’est pas adoptée ici. C’est ça la vérité : nous sommes un pays sous-développé. Quand on voit l’histoire de ce pays, certains sont des nantis avec des milliards qui coulent à flot. Et le peuple ? Le peuple est dans les supplications. Rien n’a été développé dans ce pays depuis 30 ans, rien n’a été fait (…) En écoutant le Tahoeraa, c’est comme s’il nous donnait des leçons. Mais qui est devenu riche aujourd’hui ? Cette époque est finie. Il faut faire avancer notre pays désormais ».

Orientations budgétaires ou programme politique ?
Hirohiti Tefaarere (UPLD)

«Quand je lis dans ce rapport que 77% des aides sociales diverses, ce sont des familles nanties qui en profitent, je dis que nous sommes dans l’erreur. Le problème de ce pays, ce sont les organismes que nous avons créés, ce sont des problèmes structurels, d’où les modifications proposées par le pays depuis deux ans (…) Nous nous sommes trompés : la solidarité reste dans les paroles et ne se voit pas dans l’action».

Rédigé par Mireille Loubet le Lundi 12 Novembre 2012 à 14:44 | Lu 734 fois