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OPH : le rapport accablant de la Chambre des comptes


En mai 2011, le ministre du logement Louis Frébault,  se rendait à Paea, sur le site du lotissement social Pofatu. Les 12 logements attribués en 2011 par l’OPH sont là.  (Photo : Ministère du logement).
En mai 2011, le ministre du logement Louis Frébault, se rendait à Paea, sur le site du lotissement social Pofatu. Les 12 logements attribués en 2011 par l’OPH sont là. (Photo : Ministère du logement).
PAPEETE, lundi 7 janvier 2013. La Chambre territoriale des comptes (CTC) a publié, le 27 décembre dernier, son dernier rapport définitif sur l’OPH. L’Office polynésien de l’habitat y apparaît comme un établissement fragile, en sureffectif notable et incapable de mener à bien ses missions. L’avenir est sombre et c’est la population qui en pâtit. Le rapport définitif de 63 pages sur l’OPH que vient de rendre public la Chambre territoriale des comptes est un écho à celui, plus général, publié en novembre dernier sur la politique du logement de la Polynésie française. Dans les deux cas forcément, on y retrouve des objectifs rarement ou jamais atteints, une situation financière déséquilibrée, une véritable inquiétude pour l’avenir. Dans le cas de l’OPH, dix ans après un précédent rapport de la Chambre en 2002 reconnaissant «les efforts de professionnalisation des pratiques», la CTC écrit en décembre 2012 que : «le bilan établi par le présent rapport est moins optimiste, l’avenir de l’Office paraissant, à tous égards, incertain et préoccupant».

Ainsi la production de logements sociaux n’est pas atteinte au regard des besoins. «De 2002 à 2011, la moyenne annuelle de logements groupés livrés a été de 72 et celle de fare sociaux de 259». Plus grave, le Contrat de projets (2008-2013) prévoyait 17 opérations de construction, mais actuellement 12 sont encore dans la phase étude. Dans le même temps, le parc social géré par l’OPH vieillit mal «faute d’entretien suffisant». Selon la CTC environ 38% du parc nécessite «de lourdes opérations de maintenance et d’entretien pour être remis à un niveau décent». Or, les conditions économiques générales en Polynésie française font que les besoins en logements sociaux continuent d’augmenter. En 2011, officiellement, 2 854 demandes validées de logements ou fare restaient en attente, avec environ 450 nouvelles demandes déposées chaque année.

Pour la gestion de l’établissement OPH, la Chambre territoriale des comptes n’est pas plus sereine. «A de rares exceptions près, il n’y a pas eu de progrès durables et complets dans la gestion de l’OPH depuis 10 ans, notamment dans les domaines du management, de la qualité des comptes ou du recouvrement». L’Office connaît donc une situation financière dégradée qui serait insoutenable sans les subventions massives du Pays. En dépit de ces coups de pouce, l’OPH a publié en 2009, 2010 et 2011 des résultats négatifs. Respectivement – 123 millions de Fcfp, - 547 millions et – 399 millions de Fcfp. Les causes de ce management raté depuis dix ans : la rotation des équipes dirigeantes (11 présidents du conseil d’administration et 9 directeurs généraux en 10 ans) ; l’incapacité à organiser efficacement la production de fare sociaux ou la vente de fare commerciaux, ni à produire en quantité suffisante des logements sociaux groupés ; un recouvrement des loyers et charge très insuffisant. Aussi, la Chambre conclut sur l’avenir de plus en plus préoccupant de l’OPH qui a besoin d’une redéfinition de son rôle et de ses moyens. «Toutes les questions structurelles encore non résolues qui relèvent en grande partie de la Collectivité de la Polynésie française et non de l’OPH, contribuent en effet à obscurcir l’avenir de l’office».

pfr201214.pdf PFR201214.pdf  (4.41 Mo)

OPH : le rapport accablant de la Chambre des comptes
Un parc vétuste faute d’entretien

Le maintien en état du parc social est une mission qui incombe à l’OPH comme à tout gestionnaire de logements sociaux. A cette fin, le gestionnaire du parc social perçoit habituellement les loyers et les charges versés par les locataires du parc social, parfois complétés par des subventions pour l’amélioration du confort des logements. Ce mode opératoire n’a pas été celui qu’a utilisé la Polynésie française, qui lui a préféré des prises en charge budgétaires, par voie de subventions, «censées pallier les conséquences de la grande mansuétude de l’Office face aux impayés de loyers et de charges». Les charges locatives sont réellement apparues sur les quittances des loyers, seulement au milieu des années 2000 ! Sans ressources propres pour financer ces travaux de maintenance : «le maintien en état du parc social a été largement sous-estimé. Pour la collectivité de la Polynésie française, cet objectif n’a pas été considéré comme prioritaire, laissant la question du financement des charges locatives non réglée de manière pérenne. L’OPH a donc géré l’entretien et le maintien en état du parc social, sans perspective financière». Le degré de vétusté du parc ancien est très élevé, ce qui est paradoxal pour un ensemble d’immeubles de moins de 40 ans.

En fin d'année 2011, l'OPH en grève en raison des restructurations en cours.
En fin d'année 2011, l'OPH en grève en raison des restructurations en cours.
EN CHIFFRES

L’OPH, c’est en 2011, 2 788 logements groupés et parcelles.
En dix ans, entre 2002 et 2011, l’OPH a construit 720 logements sociaux en habitat groupé, soit une production moyenne de 72 logements par an. Au total, l’OPH a produit 3 395 logements ou fare sociaux entre 2002 et 2011 alors qu’il lui aurait fallu produire au moins 4 500 logements.
En 2010, le taux de recouvrement global des loyers et charges s’est redressé à 78,5 %, mais cela reste insuffisant : en effet, le niveau des impayés du parc social atteint un total de 2 milliards de Fcfp en 2011. Enfin, la gestion du personnel de l’OPH est également problématique : alors que depuis 2007 un dispositif incitatif de départ volontaire est mis en place, l’établissement accueille des agents venus d’autres établissements ou SEM du Pays dissous qui n’ont pas les qualifications requises ! Et cela se poursuit aujourd’hui : en octobre 2012, 47 agents du FDA (Fonds de développement des archipels) ont intégré l’OPH. Conséquence : une subvention de 178 millions de Fcfp a été budgétée pour ce transfert de personnel. Pour cette année : «une subvention de fonctionnement de 320 millions de Fcfp sera inscrite au budget 2013».

Rédigé par Mireille Loubet le Lundi 7 Janvier 2013 à 11:41 | Lu 118364 fois