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Nouvelle-Calédonie: un deuxième référendum, et après?


Nouméa, France | AFP | lundi 05/10/2020 - La nette progression des indépendantistes au deuxième référendum sur l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie, remporté dimanche par les pro-français à 53,26%, les place en position de force pour discuter de l'après accord de Nouméa.

Voici les conséquences politiques et les principaux enseignements qu'on peut tirer de ce scrutin.

QUID DU TROISIEME REFERENDUM ?
Comme l'a rappelé Emmanuel Macron dans une déclaration solennelle dimanche après le résultat, "un troisième référendum est possible". L'accord de Nouméa (1998), qui a mis en oeuvre un processus de décolonisation inédit dans l'histoire de France, prévoit en effet la possibilité, à partir du sixième mois (avril 2021) suivant le scrutin, qu'un troisième et dernier référendum puisse être organisé "à la demande écrite du tiers des membres du Congrès" (18 sur 54).

A compter de cette demande, l'Etat a 18 mois pour organiser le scrutin. Mais l'ex-Premier ministre Edouard Philippe et les forces politiques calédoniennes ont convenu que ce nouveau scrutin ne pourrait avoir lieu "entre le milieu du mois de septembre 2021 et la fin du mois d'août 2022", pour éviter que cette consultation ne se télescope avec les élections présidentielle et législatives en France. 

La question restera inchangée: "Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante?"

Les indépendantistes ont d'ores et déjà annoncé qu'ils demanderaient le 3e scrutin, tout en se disant ouverts au dialogue. 

En face, les non indépendantistes voudraient à tout prix l'éviter, craignant un nouveau recul de leurs positions. Pour Sonia Backès, présidente de la province Sud, "aller au troisième référendum, sans dialoguer, sans chercher une solution commune, sans avancer les uns vers les autres, va générer un réel risque de crispation, voire de guerre civile". 

LE RETOUR DE L'ETAT TRES ATTENDU
Emmanuel Macron a annoncé dimanche que le gouvernement français allait prendre "des initiatives" dans les prochains jours pour "bâtir un nouveau projet" pour sortir de l'accord de Nouméa, qui s'achève fin 2022 avec un possible dernier référendum et laisse dans le flou le statut du territoire et son avenir politique.

Le Premier ministre Jean Castex a confirmé dans un communiqué qu'il allait réunir "prochainement" tous les acteurs de Nouvelle-Calédonie "disposés à travailler ensemble à la poursuite du processus de dialogue et de paix à l’œuvre depuis 30 ans". Une manière de reprendre la main sur un dossier dont s'était emparé avec succès son prédécesseur. 

Indépendantistes et non indépendantistes ont tous regretté le manque d'implication de la parole de l'Etat au cours du deuxième référendum. "L'Etat nous a complètement lâché, il n'y a plus de son, plus d'image" depuis l'arrivée de Jean Castex, a regretté Roch Wamytan, président (UC-FLNKS) du Congrès. Un avis que partage le président loyaliste du gouvernement Thierry Santa (Avenir en Confiance, droite): "Le nouveau gouvernement s'est très peu impliqué. C'est un reproche que nous faisons à l'Etat: un manque d'implication et un manque de positionnement".  

"Le président a annoncé des initiatives prochaines et nous a exhortés au dialogue, ce qui est le minimum syndical", a estimé Philippe Michel (Calédonie Ensemble, droite modérée).

UN CONSENSUS SUR QUOI?
Tous les acteurs politiques calédoniens se disent prêts à se mettre autour de la table dès à présent. Mais il va falloir concilier les antagonismes, ce qui s'annonce comme une tache ardue. 

Pour Roch Wamytan, il faudra discuter de deux points fondamentaux: "la place du peuple kanak car c'est lui qui est colonisé, et le lien à la France que nous questionnons depuis 167 ans". 

Aux yeux du FLNKS, la pleine souveraineté est la seule option possible après l'accord de Nouméa. Mais pour Thierry Santa, "si on se remet autour de la table, ce n'est pas pour discuter de l'indépendance, mais pour prendre en compte la volonté exprimée par le résultat du référendum". 

Sonia Backès a mis en avant deux thèmes prioritaires: l'ouverture de la citoyenneté, qui pour le moment exclut toute personne arrivée sur le Caillou après novembre 1998, et des garanties sur la propriétés privée. 

Le député Philippe Gomès, leader de Calédonie ensemble, veut lui "conjuguer +souveraineté+ et +République+ au lieu de les opposer", et se dit même "prêt à construire un consensus pour un +oui+ collectif sur un avenir partagé où chacun aurait sa place".

Rédigé par RB le Lundi 5 Octobre 2020 à 04:37 | Lu 469 fois