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Nouveau Levothyrox: les effets propres à chaque patient mal évalués en amont


Paris, France | AFP | jeudi 04/04/2019 - L'évaluation faite par le laboratoire Merck pour mettre sur le marché en 2017 la nouvelle version du Levothyrox ne prenait pas suffisamment en compte les variations possibles des effets du médicament d'un patient à un autre, selon une étude parue jeudi.

Ces variations individuelles pourraient expliquer les effets indésirables ressentis avec la nouvelle formule de ce traitement pour la thyroïde dont se sont plaints plusieurs dizaines de milliers de patients, selon cette analyse publiée dans la revue spécialisée Clinical Pharmacokinetics.
Cela pourrait en particulier expliquer que les symptômes rapportés apparaissent contradictoires, relevant tantôt de l'hypothyroïdie tantôt de l'hyperthyroïdie, évoquant des sous et surdosages.
Des plaintes parfois attribuées à un effet "nocebo" (apparition d'effets indésirables d'origine psychologique), au grand dam des patients.
Dans cet "article d'opinion" publié dans la revue, le professeur biostatisticien Didier Condorcet (Toulouse, Inra/Ecole nationale vétérinaire) et des collègues français et britanniques ont repris l'analyse des essais de "bioéquivalence" moyenne réalisés par le laboratoire allemand Merck et mis en ligne par l'Agence du médicament (ANSM) en 2017 par souci de transparence. 
Ce type de tests est recommandé par l'Union européenne et conçu au départ pour pourvoir commercialiser des génériques.
En dépit du fait que les résultats ont été jugés satisfaisants, permettant ainsi de remplacer l'ancienne formule de ce médicament par la nouvelle, les reproches des patients ont afflué en France.
Les chercheurs observent que "plus de 50% des 204 volontaires" sains qui ont participé à cet essai réglementaire se situaient en réalité en dehors de la plage de bioéquivalence, c'est-à-dire en dehors de la norme acceptée basée sur des moyennes statistiques. 
Par conséquent, ils s'interrogent sur "l'aptitude" de ce type d'essai de bioéquivalence moyenne à garantir que nouvelles et anciennes formulations de l'hormone thyroïdienne lévothyroxine soient substituables chez les patients. Le changement d'excipients - le lactose a été remplacé notamment par le mannitol - serait susceptible d'altérer l'absorption du médicament chez certains patients, relèvent-ils.
En mars 2017, à la demande des autorités françaises, une nouvelle formulation de Levothyrox a été homologuée dans le but d'éviter des problèmes de stabilité de l'ancienne formulation.
Le laboratoire Merck a réagi à la parution de cet article en indiquant que dans les autres pays, "les lancements de la nouvelle formule de Lévothyrox, en Suisse et en Turquie, se sont très bien déroulés, sans problématique d'effets secondaires particuliers et sans changement de traitements pour les patients".
Merck ajoute que "des experts indépendants se sont penchés sur ces études (de "bioéquivalence moyenne") et ont conclu à la pertinence et à la rigueur scientifique de l'approche". "L'objectif des études de bioéquivalence est de démontrer que les deux formules se comportent de façon identique dans l'organisme, et n'ont pas pour but d'évaluer leur tolérance."
"La nouvelle formule satisfait plus de 2,5 millions de patients en France (sur 3 millions de patients sous traitement de produit à base de lévothyroxine)", ajoute le laboratoire.

le Jeudi 4 Avril 2019 à 07:29 | Lu 770 fois