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Macron installe le CNR, déjà contesté, voire boycotté


Ludovic MARIN / POOL / AFP
Ludovic MARIN / POOL / AFP
Paris, France | AFP | mercredi 07/09/2022 - Emmanuel Macron installe jeudi le controversé Conseil national de la refondation (CNR), censé élaborer "une manière nouvelle de débattre" mais déjà boycotté par les oppositions et en l'absence de son allié Edouard Philippe.

"Nous devons aujourd'hui inventer quelque chose de nouveau, une manière nouvelle de débattre. Pas une nouvelle institution", a esquissé le chef de l'Etat dans une vidéo diffusée mercredi devant le congrès de la Mutualité française.

"Engager un dialogue constructif", "résoudre les difficultés quotidiennes des Français", "remettre de la confiance" dans le débat public: L'Elysée marque une "volonté d'inscrire cette démarche dans la durée" et promet de premiers résultats dès 2023 sur l'école ou la santé.  

Outre ces deux thèmes, le plein emploi, le bien-vieillir et la transition écologique seront au menu des discussions.

Une cinquantaine de participants représentatifs "des forces vives de la Nation" dans le social, l'économie, la politique, l'associatif, la santé, l'environnement, sont attendus jeudi de 09H30 à 18H00 au Centre national du rugby à Marcoussis, dans l'Essonne.

"Ce sera très interactif, et donc pas du tout dans une méthode descendante", a promis l'Elysée, alors qu'Emmanuel Macron est accusé de présider le pays de manière très verticale.

"Confusion des genres" 

Dans son discours à l'occasion des journées parlementaires de Renaissance (ex-LREM), la Première ministre Elisabeth Borne a loué une "démarche de dialogue" qu'elle a qualifié de "globale, cohérente".

Cette réunion s'inscrit dans la suite de deux initiatives ayant marqué le premier quinquennat: le Grand débat, lancé début 2019 pour sortir de la crise des "gilets jaunes", puis la Convention citoyenne pour le climat, conclue en juin 2020.

Pour François Bayrou, président du MoDem et patron du Haut commissariat au plan, qui doit piloter le CNR, il s'agit de "prendre le temps nécessaire pour conduire du constat à une idée de l'avenir".

Mais il admet que la tâche s'annonce "très difficile". "Qui peut dire avant son lancement que cette méthode n'est pas la bonne ou fonctionnera de manière certaine ?", renchérit un conseiller de l'exécutif. 

Si les responsables de huit associations d'élus seront finalement présents, il manquera les principaux leaders des partis politiques d'opposition, ainsi que les dirigeants de la CGT et de FO. Seuls trois syndicats - la CFDT, la CFTC et l'Unsa - feront le déplacement. 

Absent remarqué aussi, l'ancien Premier ministre Edouard Philippe, qui sera au Québec mais se fera représenter.

Gérard Larcher, le président LR du Sénat, dominé par la droite, où le gouvernement fonde l'espoir de bâtir des compromis en l'absence de majorité absolue à l'Assemblée, a refusé de venir, estimant que "la confusion des genres entre démocratie participative et démocratie représentative ne fera pas avancer les choses". 

Il a rappelé sur France Inter que "la démocratie représentative" c'est le Parlement, et qu'il existe déjà un "forum de la société civile" avec le Conseil économique, social et environnemental (Cese).

"Boulet" 

Même constat à gauche et à l'extrême droite : Alexis Corbière (LFI) dénonce un "bazar" pour "esquiver le parlement", Marine Le Pen (RN) un "gadget", quand Olivier Faure (PS) n'y voit "aucun intérêt".

L'ex-président François Hollande, jamais avare de piques envers son successeur, doute aussi de la nécessité d'un "nouveau +machin+", en reprenant à son compte une formule du général de Gaulle à propos de l'ONU.

L'exécutif veut croire que les absents changeront bientôt d'avis. "Je prends le pari avec vous qu'à l'heure des conclusions, tout le monde sera autour de la table", a lancé mercredi le porte-parole du gouvernement Olivier Véran devant quelques journalistes.  

Emmanuel Macron introduira la réunion, avant d'échanger sur les attentes des participants, qui écouteront aussi de courts exposés de la présidente du Haut-Conseil pour le climat, Corinne Le Quéré, du Premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, et du gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau.

Dans l'après-midi, la Première ministre Elisabeth Borne pilotera une réunion pour déterminer les chantiers et établir leur mise en oeuvre dans la durée.

Pour le constitutionnaliste Benjamin Morel, le CNR est devenu "un boulet" pour le président depuis qu'il n'a obtenu qu'une majorité relative aux législatives. 

Avec une majorité absolue, "l'outil aurait pu être intéressant en termes de légitimation" des réformes, estime-t-il. Mais aujourd'hui ça crée plutôt un "déficit de légitimité", a-t-il expliqué sur FranceInfoTV.

le Mercredi 7 Septembre 2022 à 06:04 | Lu 368 fois