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Macron chez Trudeau avant un G7 ébranlé par la guerre commerciale


Ottawa, Canada | AFP | mercredi 06/06/2018 - président français Emmanuel Macron et le Premier ministre canadien Justin Trudeau se retrouvent mercredi à Ottawa pour resserrer leurs liens, juste avant un sommet du G7 au Québec qui s'annonce fracturé par la guerre commerciale déclenchée par Donald Trump. 

Ces dirigeants de la même génération (40 et 46 ans) se retrouvent à 16H00 (20H00 GMT) au Parlement fédéral d'Ottawa pour une séance de travail à deux, suivie d'un entretien élargi avec cinq ministres, avant de retrouver leurs épouses Brigitte Macron et Sophie Grégoire Trudeau pour un dîner privé dans un cadre typiquement canadien: un chalet en bois, au bord d'un lac.
Les deux dirigeants libéraux tiendront jeudi matin une conférence de presse commune.
"En général, MM. Trudeau et Macron veulent renforcer le multilatéralisme et faire progresser le commerce progressiste" dans un contexte de retour du protectionnisme, a remarqué à l'AFP le bureau du Premier ministre canadien.
Ils devraient notamment revenir sur la décision de Donald Trump d'imposer à tous les fournisseurs des Etats-Unis de lourdes taxes sur les importations d'acier et d'aluminium, y compris à l'Europe, au Canada et au Japon, ses plus proches alliés. 
En réponse, tous ont décidé de saisir l'OMC et annoncé des mesures de représailles, comme également la Chine et la Russie.
Les deux quadragénaires ont pour point commun d'avoir tenté, en vain, d'amadouer le président américain pour le convaincre de renoncer à son projet. 
 

- Grande déception -

 
L'Europe et le Canada avaient dans un premier temps obtenu un sursis mais à leur grande déception, Donald Trump leur a finalement appliqué les mêmes taxes qu'aux autres. 
Depuis vendredi, Européens et Canadiens ont durci le ton face à Washington.
Emmanuel Macron s'est refusé à dévoiler l'ambiance de sa conversation téléphonique de jeudi soir avec Donald Trump, que Washington a jugée "terrible" selon la presse américaine. 
Mais il a assuré qu'il "aura de nouveau au G7 une discussion utile et franche avec le président Trump". "Cela n'enlève rien à l'amitié que nous avons l'un pour l'autre et à l'amitié qui lie nos deux pays", a-t-il souligné.
Justin Trudeau avait lui aussi joué la carte de la cordialité avec son grand voisin et assurait en mars que le président américain lui avait promis d'épargner les Canadiens. Il est passé à l'attaque en annonçant des taxes de 16,6 milliards de dollars canadiens (11 milliards d'euros) sur des produits américains.
Autre pomme de discorde entre Ottawa et Washington, l'avenir de l'accord de libre-échange nord-américain (Aléna) qui lie Canada, Etats-Unis et Mexique : Washington envisage désormais des négociations séparées, ce qui freinerait fortement l'économie canadienne, selon le FMI. Mais Ottawa y a opposé une fin de non-recevoir "pour l'instant".
Leur front commun face à Washington devrait resserrer les liens entre MM. Macron et Trudeau avant le sommet du G7. Lors de la précédente rencontre des sept principales puissances industrielles mondiales, il y a un an à Taormine (Sicile), leur prise de contact avait été si chaleureuse que les réseaux sociaux avaient plaisanté sur leur "bromance", ou "amitié virile" comme le préconise l'Office québécois de la langue française.
Le président français se rendra ensuite à Montréal pour rencontrer le Premier ministre québécois Philippe Couillard, avec qui il devrait notamment parler francophonie, intelligence artificielle et échanges commerciaux et culturels. 
 

- "G6 + 1" -

 
Il poursuivra ensuite vers La Malbaie, petite ville à 140 km de Québec surplombant le fleuve Saint-Laurent, où se déroule vendredi et samedi, dans un grand hôtel ultra-sécurisé, le sommet des sept pays les plus industrialisés (Allemagne, Canada, Etats-Unis, France, Royaume-Uni, Italie et Japon). Le Canada, pays hôte du G7 cette année, cèdera la place à la France l'an prochain.
Le sommet risque aussi de refléter l'isolement de Washington sur plusieurs autres fronts, comme le  multilatéralisme et la lutte contre le réchauffement climatique. 
Les Européens sont également irrités et inquiets de la décision américaine de sortir de l'accord sur le nucléaire iranien, en faisant pression sur leurs entreprises pour qu'elles quittent l'Iran, comme vient de le décider le constructeur automobile français PSA.
Les six ne sont pas prêts à tout pour préserver une unité de façade. "Le défi est d'essayer de préserver une forme d'unité à l'intérieur du G7 et vis-à-vis de l'extérieur, mais il ne faut pas hésiter à exprimer de manière ferme et forte les intérêts de la France et de l'Europe", a averti l'Elysée.
"On ne peut pas présumer des résultats finaux du G7 mais on recherche à dégager des consensus", a relevé le bureau de M. Trudeau.
Au-delà des thèmes officiels prévus (croissance inclusive, avenir du travail et du commerce, paix et sécurité, égalité femmes-hommes, changement climatique), la difficulté pour les dirigeants du G7 sera de tomber d'accord sur un communiqué final avec les Etats-Unis. 
Déjà lors du précédent G7 à Taormine, les Etats-Unis avaient refusé de signer la déclaration finale pour cause de retrait de l'accord de Paris sur le climat. Ils ont aussi refusé de signer la déclaration finale de la réunion annuelle de l'OCDE, la semaine dernière à Paris, rejetant les négociations multilatérales jugées inefficaces. 
Le G7 Finances, tenu en fin de semaine dernière, n'a pas non plus donné lieu à une déclaration commune, prenant des airs de "G6 + 1", selon le ministre français des Finances Bruno Le Maire.

le Mercredi 6 Juin 2018 à 04:52 | Lu 357 fois