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Loi martiale en Ukraine : la Russie met en garde contre tout acte "irréfléchi"


Moscou, Russie | AFP | mardi 27/11/2018 - La Russie a mis en garde mardi l'Ukraine contre tout acte "irréfléchi" après la décision de Kiev d'instaurer la loi martiale en réponse à l'arraisonnement de trois navires ukrainiens par Moscou, Vladimir Poutine demandant à Angela Merkel de faire pression sur les autorités ukrainiennes.

Il s'agit de la première confrontation ouverte entre Moscou et Kiev depuis l'annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée par la Russie en 2014 et l'éclatement d'un conflit armé dans l'est de l'Ukraine entre forces ukrainiennes et séparatistes prorusses qui a fait depuis plus de 10.000 morts.
En réponse, le Parlement ukrainien a voté lundi l'introduction de la loi martiale dans les régions frontalières de l'Ukraine après la capture dimanche par la Russie de trois navires ukrainiens au large de la Crimée, les 24 marins à leurs bords ayant été faits prisonniers.
Le président ukrainien Petro Porochenko a expliqué cette initiative, sans précédent depuis l'indépendance de cette ex-république soviétique en 1991, par "la menace extrêmement élevée" d'une offensive terrestre russe. 
La Russie assure avoir agi "en stricte conformité avec le droit international" et accuse pour sa part les navires ukrainiens - deux vedettes et un remorqueur - d'être entrés illégalement dans les eaux territoriales russes au large de la Crimée, un acte qualifié de "provocation".
Le président russe a fait part de sa "sérieuse préoccupation" concernant l'instauration de la loi martiale en Ukraine, au cours d'un entretien téléphonique dans la nuit de lundi à mardi avec la chancelière allemande Angela Merkel et dénoncé "une violation grossière des normes du droit international" par Kiev.
 

- "Campagne électorale" -

 
Vladimir Poutine a "dit espérer que Berlin pourra influer sur les autorités ukrainiennes afin de les dissuader d'actes ultérieurs irréfléchis", selon un communiqué du Kremlin.
Aux yeux du président russe, "il est évident que tout cela a été fait en lien avec la campagne électorale en Ukraine" où l'élection présidentielle est prévue pour le printemps 2019.
L'incident intervient également à quelques jours du sommet du G20 en Argentine où Vladimir Poutine devrait s'entretenir avec son homologue américain Donald Trump. 
La diplomatie russe a de son côté accusé Kiev de chercher à "créer un prétexte pour renforcer les sanctions" de l'UE et de Washington contre la Russie, déjà en place depuis 2014.
La question de nouvelles sanctions européennes sera à l'étude à l'occasion d'une réunion en décembre, a annoncé mardi la ministre autrichienne des Affaires étrangères dont le pays assure la présidence tournante de l'UE.
La loi martiale, qui entrera en vigueur mercredi matin en Ukraine dans une dizaine de régions frontalières, notamment de la Russie, du Bélarus et à proximité de la mer d'Azov, va permettre pendant un mois aux autorités ukrainiennes de mobiliser ses citoyens, de réguler l'activité des médias et de limiter les rassemblements publics.
"C'est potentiellement dangereux puisque de telles actions pourraient aboutir à une escalade des tensions", notamment dans le Donbass, dans l'Est séparatiste de l'Ukraine, a souligné mardi le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.
L'incident entre des gardes-côtes russes et les navires ukrainiens est survenu en mer Noire dimanche soir lorsque ces derniers tentaient de pénétrer dans le détroit de Kertch pour entrer dans la mer d'Azov, cruciale pour les exportations de céréales ou d'acier produits dans l'est de l'Ukraine.
Il a fait six blessés parmi les Ukrainiens selon Kiev, dont trois ont été hospitalisés.
 

- "Provocation" -

 
Les marins capturés doivent être présentés mardi et mercredi devant un juge à Simféropol, en Crimée, qui pourrait ordonner leur placement en détention provisoire, a dit à l'AFP la déléguée pour les droits de l'Homme de la péninsule, Lioudmila Lioubina.
Lundi soir, des médias russes ont diffusé des extraits vidéo d'interrogatoires de marins capturés dans lesquels un homme présenté comme un capitaine affirme notamment que les déplacements de son navire étaient une "provocation", répétant la version de faits avancée par Moscou.
Le commandant de la marine ukrainienne, Igor Vorontchenko, a qualifié ces déclarations de "mensonges" proférés, selon lui, "sous pression".
Pour sa part, le Service de sécurité ukrainien (SBU), les services de renseignement, a admis mardi dans un communiqué que certains de ses "officiers" se trouvaient à bord des navires arraisonnés par les gardes-côtes russes.
L'incident a suscité un tollé en Ukraine et chez ses alliés occidentaux, l'ambassadrice américaine à l'ONU, Nikki Haley, ayant notamment dénoncé lundi une action "illégale" de la Russie au cours d'une réunion d'urgence du Conseil de sécurité.
"La France en appelle aux parties pour qu'elles favorisent un apaisement de la situation et que chacun fasse preuve de retenue", a quant à lui déclaré mardi le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian à l'issue d'un entretien avec son homologue russe Sergueï Lavrov à Paris.
Ces incidents ne sont que la dernière étape d'une lente montée des tensions autour du détroit de Kertch qui sépare la péninsule de Crimée du territoire russe.
La Russie revendique le contrôle de ce détroit, unique passage maritime entre la mer Noire et celle d'Azov. 

le Mardi 27 Novembre 2018 à 06:14 | Lu 280 fois