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Les yeux dans le ciel se font très précis, une aubaine pour les amis de la Terre


San Francisco, Etats-Unis | AFP | jeudi 12/09/2018 - Dans l'État brésilien de Para, chaque semaine, les autorités reçoivent des alertes montrant quels morceaux de la forêt amazonienne ont été abattus, hectare par hectare, photos à l'appui.

Les photos sont prises tous les jours à 10h30 du matin par des satellites américains, et fournissent un niveau de détail de trois à cinq mètres au sol. Un algorithme détecte automatiquement les endroits déboisés. Les autorités envoient ensuite des agents vérifier... et, peut-être, interpeller les coupables avant qu'ils n'aient achevé leur méfait.
"Avant, ça nous prenait six jours, ou deux mois, ou trois mois", explique à l'AFP Iara Musse Felix, la patronne de la société SCCON, qui commercialise ces alertes auprès des régions. "Maintenant on a des images quotidiennes".
Cette révolution dans la surveillance des forêts, et de l'ensemble de la Terre, vient de la constellation de satellites de la société Planet.
Fondée à San Francisco en 2010 par trois anciens de la Nasa, elle l'une des sociétés à la pointe de la révolution des nanosatellites, faciles à produire et à remplacer, avec une durée de vie comprise entre trois et cinq ans.
Ce modèle économique du "jetable" est radicalement opposé à l'industrie aérospatiale traditionnelle, qui produit de gros satellites certes très sophistiqués et puissants, mais nécessitant des années de travail et des centaines de millions de dollars.
Planet a placé près de 298 satellites en orbite depuis 2013, dont la moitié l'an dernier. Elle en a 150 en activité aujourd'hui, dont 130 nanosatellites. Les autres sont retombés vers la Terre et ont brûlé en rentrant dans l'atmosphère. 
 

- 30 cm de longueur -

 
Ces petits objets de 5 kg, baptisés "Dove" (colombe), sont fabriqués à la chaîne dans le centre de San Francisco, dans de nouveaux locaux présentés mardi à la presse par Planet à l'occasion du Sommet mondial pour l'action climatique.
"Un seul technicien peut assembler trois Dove par jour", explique le directeur de la fabrication de Planet, Chester Gillmore, 33 ans, dont cinq chez Planet. "Avec seulement dix outils". La société assure pouvoir en fabriquer jusqu'à 40 par semaine.
Ici, pas de "salle propre", on rentre sans formalité. Les composants électroniques, standards, arrivent d'un côté de la salle et sont testés, puis assemblés. Le Dove est de format "Cubesat 3u", un cylindre long de 30 cm, avec une caméra à l'intérieur, et deux panneaux solaires qui se déplieront sur les côtés en orbite.
Six Doves terminés attendent dans un meuble à roulettes d'être envoyés en Inde pour être chargés à bord de la fusée qui les placera en orbite, à environ 500 km d'altitude.
"On ne cesse d'améliorer les satellites", explique à l'AFP le cofondateur Robbie Schingler, ancien de la Nasa. "On récupère les dernières puces et technologies d'autres secteurs comme l'automobile ou l'électronique grand public, et on les adapte à l'espace".
Le résultat est une image quotidienne de chaque kilomètre carré de la Terre, accessible sur internet.
La société ne dégage pas encore de bénéfice, mais les applications futures sont nombreuses pour toutes les organisations qui veulent surveiller le globe quotidiennement, par exemple l'état des cultures au niveau planétaire, pour constater l'incidence d'une sécheresse.
Un autre projet financé par la fondation du milliardaire Paul Allen, cofondateur de Microsoft, consiste à surveiller le corail de cinq atolls. Les caméras des nanosatellites permettent de mieux voir s'ils blanchissent, meurent ou se développent.
Quant à la forêt amazonienne, les défricheurs illégaux savent que chaque jour, à 10h30 du matin, des "colombes" les prennent sur le fait.

le Vendredi 14 Septembre 2018 à 05:00 | Lu 424 fois