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Le quota obligatoire de travailleurs handicapés inquiète le patronat


Tahiti, le 5 janvier 2021 - La réévaluation automatique de 2 à 4%, depuis le début de l'année, du quota de travailleurs en situation de handicap qu’ont l’obligation d’employer les entreprises de plus de 25 salariés, sous peine de sanctions pécuniaires, inquiète dans le patronat. Un assouplissement de cette réglementation est à l’étude, indique le ministère du Travail.
 
Ça coince du côté des syndicats patronaux. En Polynésie française, depuis 2007, toute entreprise employant au moins 25 salariés doit en principe embaucher des travailleurs handicapés dans la proportion de 4% de son effectif salarié. Cependant, depuis l’instauration de cette obligation, un abaissement "transitoire" de ce taux à 2% a systématiquement été prorogé, d’année en année, à la demande des partenaires sociaux en proie à des difficultés de recrutement. Il faut savoir que faute de respect, les entreprises s’exposent à une pénalité annuelle confiscatoire au bénéfice du Fonds pour l'insertion professionnelle des travailleurs handicapés (FIPTH).
Cette contrainte pécuniaire annuelle est depuis 2016 fixée à 1 000 fois le SMIG horaire, par travailleur handicapé manquant dans les entreprises contrevenantes. Et selon une estimation faite par le Medef-Pf, cette pénalité a représenté en 2019 un coût annuel de 1,1 million de Fcfp en moyenne dans ses entreprises affiliées.

Il se trouve qu’un aménagement du Code du travail voté en 2018, dans le cadre de l’élargissement de cette réglementation aux services et établissements administratifs du Pays, stipule un rétablissement du taux de 4% à compter du 1er janvier 2021. Une révision adoptée par souci d’uniformisation entre public et privé, dans une période économiquement faste. Mais c’était sans compter avec le Covid-19.

​"Très grande inquiétude"…

Fin octobre dernier, le Medef-Pf a alerté le ministère du Travail, en charge de l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés, de sa "très grande inquiétude" quant à cette perspective. Une intervention est sollicitée depuis lors "dans la plus grande urgence". Le syndicat patronal sollicite "a minima" le maintien du taux de 2% pour quelques années encore et va même jusqu’à suggérer que soit mis en place un moratoire de cette réglementation pour les années 2020 à 2022, histoire de faire face avec une meilleure visibilité aux conséquences de la crise Covid.
Mais la collectivité est entrée dans l’année 2021 sans qu’il ne soit procédé à aucun aménagement de la réglementation. Aujourd’hui, la crainte pour les entreprises est de voir s’ajouter une contrainte financière à une situation déjà économiquement difficile.
 
Renseignements pris auprès du ministère du Travail, la demande exprimée par le syndicat patronal est actuellement à l’étude. Maintien du taux à 2% jusqu’en 2023, voire exonération à titre exceptionnel pour les années 2020 à 2022, les propositions patronales doivent être préalablement soumises à l’approbation du Conseil du handicap. Une demande est actuellement en instance auprès de la ministre de la Famille, Isabelle Sachet, pour inscrire cette requête à l’ordre du jour de la prochaine réunion de cette instance. "En cas de validation de ce principe, la proposition de modification du texte de loi sera proposée à l'assemblée de la Polynésie française", précise-t-on aussi au ministère du Travail.

​… mais l’emploi des handicapés facilité

Selon toute vraisemblance, une telle procédure ne laisse pas espérer l’allègement souhaité de cette réglementation avant la fin du premier semestre de cette année, avec à la clé des contraintes pécuniaires réévaluées à la hausse.
Les entreprises concernées pourront, en attendant, se consoler avec les effets d’un arrêté gouvernemental adopté le 23 octobre dernier. Cet autre texte réglementaire vise à lever ce qui pouvait apparaître jusqu’à présent comme un frein à l’insertion professionnelle des travailleurs handicapés. Il est en effet maintenant possible pour un travailleur en situation de handicap de cumuler l’Allocation aux adultes handicapés (AAH) avec un revenu professionnel. Auparavant impossible, le dilemme entre l’allocation et le revenu salarié pouvait en conduire certains à privilégier l’aide publique au détriment de l’emploi en entreprise. Et cette situation était à l’origine de difficultés de recrutement pour des emplois à temps partiel. Une situation qui conduisait certaines entreprises à se trouver en contravention avec l’obligation d’emploi des travailleurs handicapés et à devoir s’acquitter des pénalités idoines.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 5 Janvier 2021 à 18:39 | Lu 26431 fois