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Le pois jaune, nouvelle protéine tendance


Paris, France | AFP | mardi 25/02/2020 - Le "poulet cultivé", imitation de volaille proposée par la start-up zurichoise Planted Chicken, est réalisé à base de protéines de pois jaune. Le "burger végétal" de l'entreprise américaine Beyond Meat aussi, même s'il est teinté de jus de betterave.

Longtemps réservés à l'alimentation animale et parents pauvres de la gastronomie et de l'agriculture, les pois jaunes redeviennent tendance dans les champs, car très recherchés par les industriels de l'agroalimentaire et la "foodtech", sous l'effet de la mode végane et du développement des alternatives à la viande.
Ce pois qui ressemble un peu au pois chiche, en plus petit, est récolté sec et dur en juillet en France - alors que le pois vert est récolté frais en mai-juin. Et il revient de loin.
En 2019, la France en a cultivé 154.000 hectares, selon les déclarations de surface faites pour les demandes de subventions de la politique agricole commune européenne (PAC). Au creux de la vague, en 1981, il était tombé à 75.000 hectares, exclusivement réservés alors à l'alimentation animale.
"Il y a de plus en plus d'industriels qui extraient la protéine de pois pour les fausses viandes de synthèse", explique à l'AFP Judith Burstin, généticienne de l'institut de recherche Inrae Dijon, qui a piloté les équipes ayant séquencé le génome du pois en 2019.
Sans OGM, sans gluten, ces pois jaunes sont au croisement des deux révolutions, alimentaire et climatique, souligne Mme Burstin: avec 23% de protéines en moyenne, ils sont l'une des alternatives possibles à la viande. La plante, une légumineuse, a aussi la particularité de capter l'azote de l'air pour nourrir le sol, permettant ainsi une réduction des engrais chimiques. Et ils ont la particularité de satisfaire plusieurs débouchés en même temps, alimentation animale et humaine.
 

- "Mauvaises terres" -

 
Le premier producteur et exportateur mondial de pois jaunes est le Canada avec 3,6 millions de tonnes en 2018 sur les 15,7 millions de tonnes produites dans le monde cette année-là. 
En France, les rendements agronomiques ne sont pas très bons. "Normal, on leur réserve souvent les mauvaises terres", remarque Jean-Paul La Campagne, de l'interprofession des protéines végétales Terres Univia.
Mais les perspectives sont alléchantes, d'autant que le pois jaune vise un autre débouché, l'aquaculture et l'alimentation des truites, "une filière en devenir en France pour contrebalancer le saumon d'importation", explique à l'AFP Antoine Henrion, président de Terres Univia.  
Du coup, la profession espère obtenir un relèvement des aides européennes spécifiques aux protéagineux (actuellement à 187 euros par hectare) avec le futur plan protéines annoncé par le président Emmanuel Macron, mais qui tarde à se concrétiser.
En France, sur les 621.000 tonnes de pois jaunes récoltées en 2019-2020, l'organisme parapublic de gestion des marchés FranceAgriMer estime à 140.000 tonnes le volume absorbé par les industriels pour l'alimentation humaine par extraction de la protéine. Avec essentiellement deux sociétés, Sotexpro, basée dans la Marne, spécialisée dans la texturation de protéines, et Roquette, dans le Nord.
Ce dernier, un groupe familial qui s'affiche comme le leader mondial des ingrédients d'origine végétale, entend obtenir le même statut dans le secteur de la protéine végétale.
"Le groupe a lourdement investi depuis cinq ans sur ce marché des protéines végétales, plus d'un demi-milliard d'euros", souligne Jean-Philippe Azoulay, vice-président de la branche pois et nouvelles protéines du groupe, lors d'un entretien avec l'AFP.
Roquette a investi sur son site historique de Vic-sur-Aisne, en France, et aux Pays-Bas, pour des protéines de spécialité, mais surtout au Canada dans la construction d'une usine au Manitoba qui doit entrer en production cette année et "représente plus de la moitié du plan d'investissement" du groupe dans les protéines végétales.
"Ça va être la plus grosse usine au niveau mondial de tout le marché du pois et ça va augmenter de façon très significative la capacité de Roquette", explique M. Azoulay, se refusant toutefois à en dire plus sur le volume de production prévu.
Roquette compte ainsi honorer un contrat pluriannuel avec Beyond Meat. Mais l'entreprise voit déjà plus loin, avec une "spécialité à base de féverole, une autre légumineuse: "les industriels mettent de la protéine dans beaucoup de produits, l'ensemble du marché est en croissance à deux chiffres", conclut M. Azoulay.

le Mardi 25 Février 2020 à 06:25 | Lu 611 fois