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La rencontre entre Edouard Philippe et les "gilets jaunes" proche de tourner court


Paris, France | AFP | vendredi 30/11/2018 - La rencontre prévue vendredi à Matignon entre Edouard Philippe et les "gilets jaunes" est proche de tourner court, l'un des deux seuls interlocuteurs à s'être présentés ayant aussitôt tourné les talons face au refus du Premier ministre de téléviser en direct la réunion.

"J'ai demandé à plusieurs reprises à ce que cet entretien soit filmé et retransmis en direct à la télévision, cela a été refusé", a déclaré à la presse Jason Herbert, l'un des huit membres de la délégation qui avait émergé en début de semaine.
Ni M. Herbert, ni Matignon n'ont révélé l'identité du "gilet jaune" resté en réunion avec Edouard Philippe et le ministre de la Transition écologique François de Rugy. Le jeune homme a évoqué "d'énormes pressions" reçues  par les membres de la délégation, "à 99% de la part d'autres +gilets jaunes+". 
Jason Herbert, chargé de communication dans une médiathèque d'Angoulême, est l'une des figures du mouvement en Charente. Il était arrivé à Matignon vers 14H30, une demi-heure après l'horaire prévu, dans une cour restée longtemps vide du moindre "gilet jaune". Depuis l'annonce du rendez-vous jeudi matin, le cabinet d'Edouard Philippe n'a jamais été en mesure de dire qui et combien de personnes seraient reçues.

- "Enormes pressions" -

 
"Aujourd'hui nous ne sommes que deux, nous avons tous reçu d'énormes pressions. Je parle de menaces d'agression, verbales ou physiques, notre vie est en jeu", a-t-il affirmé, avant de réitérer que la délégation avait été dissoute il y a 48 heures, après avoir rempli sa mission consistant à lancer le dialogue avec le gouvernment.
Dans un communiqué des "gilets jaunes" diffusé en fin de matinée, la rencontre avec Edouard Philippe était qualifiée de "prématurée", au motif que François de Rugy avait évoqué un "entretien futur visant à réunir autour d'une table le Premier ministre et/ou le porte-parole du gouvernement avec les référents gilets jaunes des différents départements".
Jason Herbert a d'ailleurs précisé que le Premier ministre lui avait proposé une nouvelle rencontre la semaine prochaine, en un lieu de son choix.
Ce nouveau couac survient alors que politiques et syndicalistes multiplient les appels à l'exécutif pour qu'il fasse un geste en direction des manifestants.
"À un moment, on ne peut pas gouverner contre le peuple" et il ne faut pas "ajouter des charges aux charges" des Français, a averti vendredi matin François Bayrou, un allié de poids d'Emmanuel Macron.
De Buenos Aires où il participe au G20, le président avait redit jeudi vouloir répondre à "la colère légitime" et "la souffrance d'une partie du peuple" par "des décisions supplémentaires dans les semaines et les mois à venir", mais qui "ne seront jamais des reculs".
Les syndicats reçus dans la matinée par le Premier ministre ont demandé à l'exécutif de nouvelles mesures "immédiates" ou du moins "concrètes" pour répondre à la crise des "gilets jaunes", allant d'une prime transport à la hausse des salaires, en passant par un moratoire sur la taxe carburant. Principale figure présente, le dirigeant de la CFDT Laurent Berger a notamment poussé, comme Force Ouvrière, en faveur d'une prime transport pour les salariés se rendant au travail en voiture.
"On a redit qu'il fallait des mesures concrètes. On ne rentre pas dans un processus (de concertation, ndlr) s'il n'y a pas de marges de manœuvre pour des mesures réelles pour les travailleurs", a affirmé M. Berger à sa sortie de Matignon. 
La quasi-totalité des élus locaux reçus à Matignon jeudi avaient déjà réclamé un nouveau "geste" de l'exécutif, et au-delà de François Bayrou, l'idée d'un moratoire à la hausse des taxes fait débat au sein même de LREM, le parti présidentiel.
 

- Un million de signatures -

 
Le mouvement se prépare pour l'acte III samedi sur les Champs-Elysées et partout en France. Toujours insaisissable pour le pouvoir politique, il avance galvanisé par le soutien des deux tiers des Français et une pétition "pour une baisse des prix du carburant à la pompe" qui a dépassé jeudi le million de signatures.
Dans un geste d'apaisement après deux semaines de crise, le gouvernement a annoncé que les Champs-Élysées seront ouverts aux piétons samedi, comme le demandaient les "gilets jaunes". Un filtrage et des fouilles seront "systématiquement" organisés, a précisé vendredi le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, pour éviter les échauffourées qui ont émaillé la précédente journée d'actions du 24 novembre sur l'une des avenues les plus touristiques au monde.
Signe d'une colère qui ne faiblit pas: à la Réunion, paralysée depuis 14 jours par le mouvement, la ministre des Outre-mer a dû être exfiltrée par son service d'ordre lors d'une rencontre vendredi, au lendemain de l'annonce de mesures qui n'ont pas convaincu les manifestants. Dans les Bouches-du-Rhône, neuf personnes ont été placées en garde à vue vendredi après des heurts dans la nuit à un péage de La Ciotat. 

le Vendredi 30 Novembre 2018 à 05:24 | Lu 523 fois