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L'Etat attaque Google et Apple pour "pratiques commerciales abusives"


Paris, France | AFP | mercredi 14/03/2018 - En plein regain de tensions commerciales transatlantiques, le gouvernement français s'est fâché mercredi contre les géants américains Google et Apple, accusés de profiter de leur position de force sur internet pour écraser la concurrence.

Le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, a annoncé que l'Etat allait assigner en justice ces deux poids lourds de la Silicon Valley pour "pratiques commerciales abusives", exigeant une sanction - symbolique - de deux millions d'euros chacun. 
"Je crois à une économie fondée sur la justice et je vais donc assigner Google et Apple devant le tribunal de commerce de Paris pour pratiques commerciales abusives" vis-à-vis des start-ups françaises, a-t-il expliqué au micro de RTL.
L'annonce du ministre intervient à un moment de tension commerciale avec les Etats-Unis, après la décision de Donald Trump de taxer respectivement à 25% et 10% les importations d'acier et d'aluminium.
Pour les services de Bercy en charge de la concurrence (DGCCRF), "plusieurs clauses des contrats types" des magasins d'application de Google et Apple, Google Play et App Store, caractérisent un "déséquilibre significatif" au détriment des start-ups et autres sociétés qui développent des applications.
Une situation "inacceptable" pour M. Le Maire, qui estime que "Google et Apple, aussi puissants soient-ils, n'ont pas à traiter nos start-ups et nos développeurs de la manière dont ils le font aujourd'hui".
Google France a réagi dans l'après-midi, en assurant que ses pratiques commerciales étaient "conformes à la législation française" et en se disant prêt à "expliquer (sa) position devant les tribunaux".
"Avec plus de 1.000 téléchargements par seconde, Google Play est un excellent moyen pour les développeurs d'applications en Europe, de toutes tailles, dont beaucoup en France, de proposer leurs applications aux utilisateurs du monde entier", a encore estimé le porte-parole de Google France.
La position ultra-dominante des géants américains dans l'accès des particuliers et des entreprises aux services sur internet constitue un sujet d'inquiétude récurrent pour le gouvernement.
Avant Google et Apple, c'est Amazon qui avait été assigné en décembre dernier par Bercy devant le tribunal de commerce de Paris pour "déséquilibre significatif dans les relations commerciales" avec les entreprises qui vendent sur sa plate-forme en France.
Le secrétaire d'Etat au numérique Mounir Mahjoubi a souvent évoqué les "prisons dorées" dans lesquelles se trouveraient les internautes, qui ont bien souvent accès à des services et des contenus de facto filtrés par les géant américains.
 

- Imposer des briques logicielles  -

 
La procédure lancée par le gouvernement rejoint une procédure lancée il y a 18 mois par Nexedi, une PME informatique de la métropole lilloise, qui a attaqué Apple pour pratiques commerciales abusives et doit retrouver le géant à la pomme le 31 mai prochain devant le tribunal de commerce de Paris. 
La PME reproche à Apple de l'obliger à utiliser certaines de ses briques logicielles dans ses applications, si elle veut que celles-ci soient référencées dans l'App Store.
"Nous sommes très heureux et très rassurés que Bruno Le Maire ait réagi" sur cette question, a déclaré son PDG Jean-Paul Smets à l'AFP. "Nous attendons beaucoup de cette procédure, et nous ne sommes pas seuls", a-t-il ajouté.
M. Le Maire avait brandi l'été dernier la menace d'imposer les colosses du numérique sur leur chiffre d'affaires en France en dénonçant leurs pratiques d'optimisation fiscale.
Même si les craintes d'une guerre commerciale se multiplient après les annonces de M. Trump, Bercy dément tout lien entre l'assignation en justice d'Apple et Google et les taxes américaines sur les importations d'acier et d'aluminium. 
La Commission européenne compte présenter à Bruxelles le 21 mars ses premières propositions sur la fiscalité du numérique, qui est aussi au programme d'un sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE les 22 et 23 mars dans la capitale belge.
Apple est également visé en France par une enquête ouverte début janvier pour "obsolescence programmée".
Google de son côté a été condamné fin juin par l'UE à une amende record de 2,42 milliards d'euros, accusé d'abuser de sa position dominante dans la recherche en ligne pour favoriser son service "Google Shopping".

le Jeudi 15 Mars 2018 à 06:41 | Lu 281 fois