Paris, France | AFP | vendredi 02/12/2022 - 04:29 UTC-10 | 680 mots
par Cédric SIMON
L'Assemblée nationale a adopté vendredi des mesures pour mieux protéger les propriétaires contre les squatteurs et les loyers impayés, malgré l'opposition de la gauche et d'associations inquiètes de voir les expulsions exploser dans un contexte social délicat.
La proposition de loi, portée par les groupes Renaissance et Horizons (majorité présidentielle) et soutenue par la droite et le RN, a été votée en première lecture avec 40 voix contre 13. Elle doit désormais être examinée par le Sénat.
Son rapporteur, le macroniste Guillaume Kasbarian, a martelé que l'objectif était de protéger avant tout des "petits propriétaires qui ne roulent pas sur l'or", parfois confrontés à des années de procédures judiciaires pour retrouver l'usage de leur bien.
Sans convaincre la gauche, vent debout contre une loi "anti-locataires" et la "criminalisation de tous les mal-logés". Comme plusieurs acteurs associatifs, elle reproche au texte le risque de mettre à la rue des locataires fragilisés par l'inflation et l'explosion des prix de l'énergie.
- Sanctions triplées -
L'une des mesures emblématiques triple les sanctions encourues par les squatteurs, jusqu'à 3 ans de prison et 45.000 euros d'amende.
Le texte précise que le squat peut aussi concerner les résidences secondaires et des logements inoccupés contenant des meubles, pour lesquels la procédure d'expulsion express pourrait être utilisée.
Pour couvrir juridiquement tous les cas de figure, et plus seulement "la violation de domicile", la proposition de loi crée aussi un délit d'occupation sans droit ni titre.
"Cela comprend les locaux à usage économique", s'est réjouie la députée LR Annie Genevard, qui a bataillé pour. Après de longs débats, il ne lui a par contre pas été accordé de pouvoir assimiler le squat à un "vol", face notamment aux réticences juridiques du garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti.
Le gouvernement est intervenu plusieurs fois pour essayer de faire modifier le texte, appelant notamment à mieux distinguer les cas des squatteurs de celui des locataires "mauvais payeurs". Et M. Dupond-Moretti a estimé que certains passages devraient être "affinés" à la faveur de "la navette parlementaire" avec le Sénat.
Les députés ont par ailleurs alourdi les sanctions contre les personnes se faisant passer pour des propriétaires afin de louer des biens qui ne leur appartiennent pas.
"Bombe sociale"
Pour les loyers impayés, le texte accélère les procédures judiciaires dans les litiges locatifs, en incluant notamment de manière systématique dans les contrats de bail une "clause de résiliation de plein droit".
Activer cette clause permettrait à un propriétaire d'obtenir la résiliation du bail sans avoir à engager une action en justice, et de pouvoir ainsi obtenir plus rapidement une expulsion.
Le texte prévoit que le juge pourra suspendre cette clause, mais à condition que le locataire le demande.
La droite et l'extrême droite, favorables à la proposition de loi, auraient souhaité en durcir certaines dispositions.
Actuellement, "les honnêtes gens qui respectent les lois trinquent pendant que les squatteurs profitent", a estimé le député RN Aurélien Lopez-Liguori.
"On parle énormément des squatteurs, mais la plupart des gens qui vont être impactés sont des gens qui sont entrés régulièrement dans un logement et qui se retrouvent dans une procédure d'expulsion à cause d'impayés de loyers", a fustigé de son côté le député LFI William Martinet, disant craindre une "bombe sociale".
"Il va y avoir de plus en plus de locataires en difficulté de paiement, vous allez voir au début de l'année 2023 avec l'augmentation du prix de l'énergie", a lui aussi mis en garde le député communiste Stéphane Peu.
Pour mieux protéger les propriétaires, la gauche a appelé à "mettre en œuvre la garantie universelle des loyers".
Plusieurs associations, comme la Fondation Abbé-Pierre, Droit au Logement (DAL), le Secours Catholique ou encore la Ligue des droits de l'Homme, ont aussi pointé les risques pour les plus fragiles.
Pour la Défenseure des droits, Claire Hédon, la réforme proposée manque d'"équilibre": "Le renforcement de la pénalisation de l'occupation illicite, ou l'assouplissement des procédures d'expulsion en raison de loyers impayés, ne sont ni nécessaires, ni proportionnés".
La FNAIM, qui représente les professionnels de l'immobilier, avait salué en revanche une "amorce de rééquilibrage des droits" entre propriétaires et locataires.
par Cédric SIMON
L'Assemblée nationale a adopté vendredi des mesures pour mieux protéger les propriétaires contre les squatteurs et les loyers impayés, malgré l'opposition de la gauche et d'associations inquiètes de voir les expulsions exploser dans un contexte social délicat.
La proposition de loi, portée par les groupes Renaissance et Horizons (majorité présidentielle) et soutenue par la droite et le RN, a été votée en première lecture avec 40 voix contre 13. Elle doit désormais être examinée par le Sénat.
Son rapporteur, le macroniste Guillaume Kasbarian, a martelé que l'objectif était de protéger avant tout des "petits propriétaires qui ne roulent pas sur l'or", parfois confrontés à des années de procédures judiciaires pour retrouver l'usage de leur bien.
Sans convaincre la gauche, vent debout contre une loi "anti-locataires" et la "criminalisation de tous les mal-logés". Comme plusieurs acteurs associatifs, elle reproche au texte le risque de mettre à la rue des locataires fragilisés par l'inflation et l'explosion des prix de l'énergie.
- Sanctions triplées -
L'une des mesures emblématiques triple les sanctions encourues par les squatteurs, jusqu'à 3 ans de prison et 45.000 euros d'amende.
Le texte précise que le squat peut aussi concerner les résidences secondaires et des logements inoccupés contenant des meubles, pour lesquels la procédure d'expulsion express pourrait être utilisée.
Pour couvrir juridiquement tous les cas de figure, et plus seulement "la violation de domicile", la proposition de loi crée aussi un délit d'occupation sans droit ni titre.
"Cela comprend les locaux à usage économique", s'est réjouie la députée LR Annie Genevard, qui a bataillé pour. Après de longs débats, il ne lui a par contre pas été accordé de pouvoir assimiler le squat à un "vol", face notamment aux réticences juridiques du garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti.
Le gouvernement est intervenu plusieurs fois pour essayer de faire modifier le texte, appelant notamment à mieux distinguer les cas des squatteurs de celui des locataires "mauvais payeurs". Et M. Dupond-Moretti a estimé que certains passages devraient être "affinés" à la faveur de "la navette parlementaire" avec le Sénat.
Les députés ont par ailleurs alourdi les sanctions contre les personnes se faisant passer pour des propriétaires afin de louer des biens qui ne leur appartiennent pas.
"Bombe sociale"
Pour les loyers impayés, le texte accélère les procédures judiciaires dans les litiges locatifs, en incluant notamment de manière systématique dans les contrats de bail une "clause de résiliation de plein droit".
Activer cette clause permettrait à un propriétaire d'obtenir la résiliation du bail sans avoir à engager une action en justice, et de pouvoir ainsi obtenir plus rapidement une expulsion.
Le texte prévoit que le juge pourra suspendre cette clause, mais à condition que le locataire le demande.
La droite et l'extrême droite, favorables à la proposition de loi, auraient souhaité en durcir certaines dispositions.
Actuellement, "les honnêtes gens qui respectent les lois trinquent pendant que les squatteurs profitent", a estimé le député RN Aurélien Lopez-Liguori.
"On parle énormément des squatteurs, mais la plupart des gens qui vont être impactés sont des gens qui sont entrés régulièrement dans un logement et qui se retrouvent dans une procédure d'expulsion à cause d'impayés de loyers", a fustigé de son côté le député LFI William Martinet, disant craindre une "bombe sociale".
"Il va y avoir de plus en plus de locataires en difficulté de paiement, vous allez voir au début de l'année 2023 avec l'augmentation du prix de l'énergie", a lui aussi mis en garde le député communiste Stéphane Peu.
Pour mieux protéger les propriétaires, la gauche a appelé à "mettre en œuvre la garantie universelle des loyers".
Plusieurs associations, comme la Fondation Abbé-Pierre, Droit au Logement (DAL), le Secours Catholique ou encore la Ligue des droits de l'Homme, ont aussi pointé les risques pour les plus fragiles.
Pour la Défenseure des droits, Claire Hédon, la réforme proposée manque d'"équilibre": "Le renforcement de la pénalisation de l'occupation illicite, ou l'assouplissement des procédures d'expulsion en raison de loyers impayés, ne sont ni nécessaires, ni proportionnés".
La FNAIM, qui représente les professionnels de l'immobilier, avait salué en revanche une "amorce de rééquilibrage des droits" entre propriétaires et locataires.