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Incompréhension et colère pour les acteurs du tourisme à Moorea


Moorea, le 2 février 2021 - Apres la décision du gouvernement central de fermer les frontières pour les voyages touristiques, les acteurs du tourisme, notamment les hôteliers et les propriétaires de pensions de famille, ne décolèrent pas. Ceux-ci estiment en majorité que cette décision n’était pas cruciale au vu de l’efficacité du système des autotests Covid-19 pour les touristes français et étrangers. Cette décision ne viendrait au contraire qu’aggraver une situation économique et touristique déjà très difficile.

Nathalie Perelli, propriétaire de l’hôtel Hibiscus


"Tout dépendra des réservations de nos résidents"
Nous sommes à Moorea depuis 28 ans. C’est la première année qu’on a un tourisme aussi catastrophique en raison de la crise de Covid-19. L’annonce faite vendredi par le gouvernement français est une catastrophe pour nous les hôteliers de la Polynésie française. Dès lundi matin, les annulations sont tombées comme des goutes de pluie. Le salon du tourisme nous sauve un petit peu parce qu’on est très connu de nos résidents et de nos locaux. On a pas mal de réservations mais c’est surtout pour un week-end, un jour férié ou pour des vacances scolaires. C’est très calme pendant la semaine. On s’en est sorti en 2020 parce qu’on a pu faire une performance moyenne pour la période de haute  saison. On s’en sort aussi  parce qu’on n’a pas de crédit. Tout le staff est en réduction de temps de travail, y compris nous (la direction). On a demandé le  PGE (plan garanti par l’état) mais on ne s’en est pas encore servi.  C’est vraiment catastrophique si on reste fermé pour 2 ou 3 mois. Vu qu’on n’a pas de crédit et qu’on a un peu de trésorerie, on pense qu’on va tenir. Mais tout dépendra des réservations de nos résidents.

​Pierre Tessier, pension de famille Fare Edith


"Est-ce qu’ils vont mettre en place des aides ?"
La fermeture des frontières est une décision du gouvernement central. S’ils l’ont décidé, c’est qu’ils ont des idées. On ne peut que subir. Dans ces conditions, parlons aides, économies et de tout ce que les pensions de famille et les petites industries payent au territoire. Il faut payer aussi  les banques. Que le président Macron et le haut-commissaire nous disent comment faire ? Est-ce qu’ils pourront aider tout le monde ? Si oui, ce serait une bonne chose de fermer les frontières. Comment vont-ils aussi faire pour Air Tahiti Nui ? Est-ce qu’ils vont lui donner des milliards pour les transports aériens. C’est la seule compagnie aérienne que nous avons. Qu’elle ne tombe pas à l’eau. Ce qui nous importe aujourd’hui, c’est l’impact de la décision du président Macron  sur note vie actuelle. Si ce dernier peut fermer les frontières, cela voudrait dire qu’il peut ouvrir le portefeuille français. Il ne suffit pas de dire de fermer les frontières et de faire attention. Est-ce qu’ils vont mettre en place des aides au niveau du territoire pour toutes les petites entreprises ? C’est la question qu’il faut poser. On a déjà 4000 emplois de perdu.

​Erick Del Olmo, pension de famille Fare Arana


"La fermeture des frontières n’est absolument pas la bonne décision"
"On n’est pas content de cette décision du gouvernement français parce qu’on vit entre parenthèses depuis l’année dernière. Tous ces gens là ne se rendent pas compte qu’on a des prêts sur le dos. Vu que 80 % de notre clientèle est internationale, on ne pourra plus vivre tout simplement. Fermer et n’avoir plus d’avions sur Tahiti va entrainer, à terme, notre mort. On tient jusqu’à présent, mais pour combien de temps encore ? On a tenu pendant la période du Covid grâce à  la clientèle locale et certaines aides, mais on ne les a pas toutes eues. On n’a pas tous le droit aux aides. A force de pomper sur l’argent personnel, on arrivera à un moment où on n’aura plus rien. A ce moment là, on ne pourra plus tenir. La fermeture des frontières n’est absolument pas la bonne décision. La bonne est celle de laisser tout simplement vivre les gens. Il y a des tests sans arrêt mais ils ne servent à rien car de toute façon, la Covid est là. Rien ne va changer, à part la situation économique qui va être encore pire. Il faudrait que les gouvernements se rapprochent des banques pour que ces dernières nous « aident » en repoussant les aides et les intérêts. Si le gouvernement ne fait rien avec les banques, ca sera la mort assuré pour 80 % des gens qui ont des prêts au niveau commercial."

​Roland Imfeld, pension de famille Linareva Beach Resort


"Ca va être une catastrophe"
"La décision du gouvernement français est injuste. Si cela touche la France métropolitaine, je peux comprendre. Mais pour la Polynésie non. Les mesures qu’on a mises en place au niveau des tests me paraissaient très satisfaisantes. On a vu les résultats. Je ne vois pas pourquoi on devrait changer aujourd’hui. Les statistiques polynésiennes montrent qu’on est arrivé à un niveau tout a fait acceptable.  Si à la limite, les Français n’ont plus le droit de voyager à cause des nouvelles souches de Covid19, pourquoi pas ? L’absence de touristes français va impacter plus ou moins notre pension. Mais si on ferme avec les Etats-Unis et  qu’on a plus d’Américains, on ferme. Ca va être une catastrophe. La clientèle locale ne va  jamais permettre de vivre normalement parce qu’on a des frais fixes, des prêts,… Si les frontières se ferment jusqu’à fin mars, ca devrait le faire pour nous. Au delà, ce n’est pas possible. Les touristes français  représentent  30 % de notre clientèle, 20 % pour les Américains, 20 % pour les résidents et le reste vient des autres pays. Le salon de tourisme virtuel ne nous apporte pas beaucoup parce que les gens qui viennent chez nous sont des habitués. Ca peut aider, mais pas plus que ça."

Rédigé par Toatane Rurua le Mardi 2 Février 2021 à 09:49 | Lu 5678 fois