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Implants mammaires: la justice s'interroge sur l'approvisionnement de PIP en silicone industriel


Implants mammaires: la justice s'interroge sur l'approvisionnement de PIP en silicone industriel
MARSEILLE, 15 mars 2013 (AFP) - Deux anciens cadres du groupe allemand Brenntag ont été entendus récemment à Marseille par la juge chargée de l'affaire PIP, sur les circonstances dans lesquelles l'entreprise varoise s'est fournie en silicone industriel pour fabriquer ses prothèses mammaires frauduleuses, a-t-on appris vendredi de source proche du dossier.

Les implants PIP qui auraient dû contenir du gel Nusil, homologué par les autorités sanitaires, étaient remplis d'un gel maison constitué notamment d'huiles de silicone fournies à PIP par Brenntag, l'un des principaux distributeurs de produits chimiques dans le monde.

En janvier 2012, en plein scandale, le groupe avait indiqué que ses matières premières n'étaient pas destinées à la fabrication d'implants mammaires, mais à diverses applications industrielles; que PIP, comme tous ses clients, en était informé et qu'il lui appartenait d'en faire un usage approprié.

Selon un ancien cadre de Brenntag, entendu comme témoin en février par la juge Annaïck Le Goff dans le cadre d'une information judiciaire ouverte pour blessures et homicides involontaires, le groupe allemand avait cependant une obligation contractuelle d'informer son propre fournisseur (l'américain GE Bayer devenu Momentive) de l'usage que faisaient les clients de leurs silicones.

Une assistance technique de Brenntag dans l'utilisation de certains produits était également prévue, d'après ce témoin, pour qui le groupe "a livré à PIP les moyens de la réalisation d'une copie du Nusil".

Un autre ancien cadre entendu en février a aussi évoqué des obligations contractuelles d'information sur l'emploi des silicones entre le groupe allemand et son fournisseur américain.

"Si un distributeur est face à un client qui développe une activité qui n'entre pas dans le champ de commercialisation du produit, il doit en informer" son fournisseur, a-t-il déclaré lors de son audition, dont l'AFP a pu consulter le procès-verbal.

Pour lui, l'activité de l'usine de La Seyne-sur-Mer imposait de le faire, mais il ignore si Brenntag avait connaissance de cette activité.

Interrogé par l'AFP, a répondu par la négative.

"On n'a jamais eu de visite ou de contact, uniquement des demandes de prix. Personne dans l'entreprise ne savait réellement quel était le process de fabrication de PIP", a déclaré à l'AFP Philippe Muller, directeur général de Brenntag France, qualifiant l'usine varoise de "tout petit client" avec lequel "aucune collaboration technique" ne fut mise en œuvre.

"Cela n'a jamais été le cas avec PIP", a dit M. Muller, niant aussi toute obligation contractuelle d'information de son fournisseur sur l'utilisation des silicones.

"On est tributaire de ce que veut bien nous dire le client, il n'y a pas de base légale en la matière. Ce type d'obligation n'existe que pour les produits réglementés, ce qui n'est pas le cas pour ceux fournis à PIP", a assuré le dirigeant.

Brenntag est visé par une plainte du cabinet d'avocats bordelais Coubris & Courtois, représentant la principale association de victimes de PIP, mais n'est pas mis en cause dans la procédure.

Cinq anciens cadres de PIP, dont son fondateur Jean-Claude Mas, sont mis en examen dans la procédure instruite par la juge Le Goff. Ils doivent comparaître dans un mois à Marseille lors d'un premier procès pour tromperie aggravée.

Rédigé par () le Samedi 16 Mars 2013 à 06:55 | Lu 641 fois