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Ice, précarité : la jeunesse en déshérence à la barre


PAPEETE, le 7 novembre 2019 - Deux jeunes hommes, âgés de 22 et 24 ans, ont été présentés en comparution immédiate jeudi pour un vol commis avec effraction dans une grande surface de Mahina le 3 novembre. En raison du comportement de l’un des prévenus, un consommateur d’ice qui s’est montré particulièrement agité, l’audience a été très mouvementée.

L’atmosphère était tendue jeudi lors de l’audience de comparution immédiate. Deux jeunes hommes, dont l’un comparaissait libre, ont été présentés devant le tribunal correctionnel pour répondre d’un vol avec effraction commis à Mahina. Le 3 novembre, après avoir passé la matinée à boire du pastis, les deux prévenus étaient entrés dans l’entrepôt d’une grande surface en brisant le cadenas qui se trouvait sur la porte. Les mis en cause, filmés par les caméras de vidéosurveillance, s’étaient emparés de nombreuses canettes de bière, d’un déodorant et d’un savon. Identifiés par les policiers municipaux, ils avaient été interpellés une heure à peine après les faits.

L’affaire paraît malheureusement banale mais la comparution des deux jeunes hommes jeudi a dressé le portrait d’une jeunesse confrontée à l’ice, la précarité et la déshérence.

Tristesse et colère

Le premier prévenu, jugé détenu, est très bien connu de la justice avec neuf condamnations inscrites sur son casier judiciaire. A la barre, le jeune homme, déjà marqué malgré son jeune âge, a expliqué qu’il vivait dans la rue depuis deux ans avec son père, également SDF. Alcoolique, il a déjà été soigné mais n’a pas réussi à se sortir de cette addiction. Il a tout de même réussi à trouver un travail de jardinier qui lui permet notamment de satisfaire sa consommation d’alcool.

Arrivé libre au tribunal, le second prévenu a, dès le début de l’audience, fait preuve d’une extrême nervosité et de troubles anxieux apparents qui laissaient à penser qu’il avait consommé des stupéfiants. Ancien espoir du cyclisme tel que l’a rappelé le président du tribunal, le jeune homme, qui avait arrêté l’école en classe de 5e, semble avoir sombré dans une poly toxicomanie destructrice. Vivant seul avec son père, un ancien policier municipal, il n’exerce aucune activité et confesse une consommation d’ice ancienne et fréquente. Alors qu’il s’était montré peu prolixe face aux questions des magistrats, le prévenu a complètement perdu pied lors des réquisitions du procureur de la République. Les gendarmes, qui devaient initialement escorter son co-prévenu, ont dû se rapprocher de lui en constatant qu’il tremblait, pleurait et se montrait menaçant. Le représentant du ministère public a tenté d’établir le dialogue avec le jeune homme en évoquant l’évidence de sa “tristesse” et de sa “colère”.

Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné le jeune sans-abri à trois mois de prison ferme afin qu’il puisse suivre une formation pour sortir de la rue et “construire sa vie”. Son co-prévenu, lui aussi jugé en état de récidive légale, a écopé de trois mois de prison avec sursis, 180 heures de TIG et obligations de soins, de formation et de travail. Lorsque qu’il est sorti du tribunal, le jeune homme était attendu par son père, un vieil homme qui a fustigé son comportement et ses fréquentations.

Rédigé par Garance Colbert le Jeudi 7 Novembre 2019 à 16:50 | Lu 3254 fois