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Fillon sur la tombe de Tjibaou, comme Rocard et Jospin

NOUMEA, 18 juillet 2010 (AFP) - François Fillon a placé dimanche sa visite en Nouvelle-Calédonie dans les pas de ses prédécesseurs socialistes Michel Rocard et Lionel Jospin en se rendant comme eux sur la tombe du leader indépendantiste Jean-Marie Tjibaou, une première pour un haut responsable de droite.


Fillon sur la tombe de Tjibaou, comme Rocard et Jospin
Lors d'une tournée très symbolique de plusieurs fiefs indépendantistes de l'archipel, François Fillon est allé dans la tribu Tiendenite (nord-est) dont était membre l'ex-homme fort du Front de libération nationale kanak et socialiste (FLNKS), assassiné en 1989 par un extrémiste de son camp.

Accompagné de l'épouse du défunt, Marie-Claude, il a été accueilli sur place par l'un des fils de Jean-Marie Tjibaou, Emmanuel. Après un accueil fait de danses et d'échange d'offrandes, il a planté un pin à côté de la sépulture. "Je sais les souffrances qui ont marqué ce territoire", a dit le Premier ministre aux membres de la tribu de cette zone montagneuse.

A quelques centaines de mètres de là, dix de ses membres, dont deux frères de Jean-Marie Tjibaou, ont trouvé la mort en 1984 dans une embuscade tendue par des colons, l'un des épisodes les plus sanglants de l'histoire contemporaine de la Nouvelle-Calédonie. Cinq ans plus tard, le chef du FLNKS était à son tour assassiné par un extrémiste kanak à Ouvéa.

L'action de Michel Rocard en 1988 avait permis de trouver la voie d'une sortie de crise. Et depuis 1998 et les accords de Nouméa, l'archipel est engagé dans un processus de décolonisation par étapes devant déboucher sur un référendum d'autodétermination entre 2014 et 2018.

Venu sur l'île sans annonces ni promesses, François Fillon se veut seulement "le notaire" de ces accords. Ce qui fait dire à un indépendantiste qu'il n'a "pas encore fait ses preuves" dans le dossier calédonien, se contentant de "confirmer ce que les autres Premiers ministres ont signé".

Allant sans cesse répétant que "le respect du processus est pour le gouvernement un engagement essentiel", François Fillon estime qu'il reviendra "aux Calédoniens et à eux seuls" de déterminer l'avenir de l'île, indépendance ou accord d'association restant à définir.

"Dites à votre grand chef de l'Elysée de ne pas avoir peur des kanaks!", lui lance en forme de boutade un dignitaire local, Pascal Shiazé, sur l'île de Lifou (Ouest).

"Non seulement nous n'avons pas peur du peuple kanak mais nous avons pour lui beaucoup de tendresse", lui répond un François Fillon tout sourire, visiblement apaisé depuis le début de son séjour à 18.000 km de Paris, loin des soubresauts qui agitent l'exécutif depuis plusieurs semaines.

Devant les élus de l'assemblée de la province des îles Loyauté à Lifou, il affiche son "optimisme": "alors qu'elle a pu être à un moment au bord d'un affrontement terrible", l'île "est aujourd'hui un véritable laboratoire de la coexistence pacifique entre des cultures différentes".

Ne pas sortir des clous du processus engagé tout en montrant un visage avenant aux populations locales "permet de ne fermer aucune porte et de montrer qu'il n'y a pas de sectarisme, que l'Etat est impartial dans cette affaire", décrypte un membre de l'entourage du Premier ministre.

Samedi, François Fillon a présidé à la première levée officielle des deux drapeaux côte à côte, le tricolore et le kanak. Lundi il achèvera sa visite par le centre culturel Tjibaou, dernier des grands travaux de François Mitterrand.

Rédigé par Par Raphaël HERMANO le Dimanche 18 Juillet 2010 à 08:25 | Lu 477 fois