Tahiti, le 11 juin 2025 – Les représentants de la société civile ont tranché ce mercredi en émettant un avis défavorable au projet de loi du Pays du ministre Cédric Mercadal relatif à la création d'Établissements publics de santé (EPS). Le Cesec estime que ce texte, bien que “pertinent dans ses objectifs”, est “précipité au regard des prérequis à remplir”, notamment en matière de structuration budgétaire, d'analyse capacitaire, de gouvernance, de cadre statutaire pour le personnel, ou de revalorisation des dispensaires.
Le Cesec reconnaît que ce projet de loi du Pays visant à créer des Établissements publics de santé (EPS) “repose sur des objectifs pertinents” mais qu'il ne peut “pas être adopté en l'état”, considérant qu'il manque d'éléments chiffrés, qu'il est mal ficelé, et qu'il ratisse trop large.
Le ministre de la Santé, Cédric Mercadal, propose en effet une réforme du système de santé polynésien en créant ces fameux EPS afin de structurer l'organisation hospitalière autour d'un cadre juridique spécifique qui est aujourd'hui trop “généraliste et inadapté”. Cela cause une rigidité administrative et une inefficacité dans la gestion des structures de santé. Un système à bout de souffle qu'il faut donc adapter aux réalités locales en tenant compte de la prévalence des maladies chroniques comme le diabète ou les maladies cardiovasculaires, du vieillissement de la population, des technologies médicales qui évoluent sans cesse, et d’une fragmentation de l’offre entre les secteurs privé et public.
Recentrer les missions du CHPF
En créant cette nouvelle catégorie d'établissements, avec trois types d'EPS ayant chacun un rôle défini, le ministre entend ainsi corriger ces insuffisances structurelles et améliorer la gouvernance. D'abord, le vaisseau amiral qu'est le CHPF sera l'établissement hospitalier central, dernier recours pour les pathologies graves. Les établissements périphériques (hôpitaux de Taravao, Uturoa et Nuku Hiva) seront axés autour des soins courants en hospitalisation ou en ambulatoire, et enfin, les établissements de santé spécialisés comme le pôle de santé mentale et l'Institut du cancer centrés sur leurs activités spécifiques.
Pour le Cesec, il est primordial de revoir au préalable les missions du CHPF déjà en proie à de grandes difficultés conjoncturelles et structurelles en les recentrant sur les soins aigus et en confiant les soins de longue durée ou la prise en charge de patients en convalescence aux établissements périphériques. Des établissements périphériques dont le rôle doit par ailleurs être renforcé pour éviter une concentration excessive des soins au CHPF qui est déjà saturé. Idem pour les dispensaires qui doivent être valorisés.
“Je ne peux pas donner un blanc-seing sans chiffres”
Les représentants de la société civile pointent surtout du doigt la précipitation de cette réforme au regard des prérequis nécessaires à sa bonne mise en œuvre. Avec en premier lieu, une analyse capacitaire approfondie intégrant le taux de fréquentation qui fait défaut. “On a très peu de chiffres et c'est bien pour ça que nous avons beaucoup insisté sur cette analyse”, a répondu la rapporteure, Maiana Bambridge interpellée par Christophe Plée sur les éléments chiffrés mis à disposition de la commission. Des données pourtant disponibles, selon Florence Drollet, mais qui n'ont pas été transmises. “Je ne peux pas donner un blanc-seing sans chiffres”, a abondé Mere Trouillet qui s'interroge par ailleurs sur la volonté affichée du ministre de mutualiser les coûts.
En effet, le projet de loi du Pays prévoit de créer un groupement hospitalier de la Polynésie française (GHPF) comme socle de la coopération entre les EPS et le secteur privé pour optimiser les ressources. “On mutualise les coûts en créant un nouvel organisme”, s'est ainsi étonnée Mere Trouillet. Dans son avis, le Cesec estime que le pilotage de ce nouveau groupement est “flou” et s'inquiète également de “l'absence de cadre financier et administratif clairement défini”. À ce titre, le Cesec dénonce la “gestion chaotique de la commande du cyclotron et du TEP-scan” qui “illustre parfaitement un exemple type de dysfonctionnement”. Un cyclotron qui manque à l'appel et un TEP-scan pour détecter les cancers de la prostate qui doit être opérationnel le 18 juin prochain. “Comment on détecte les autres cancers ? On nous parle de 1000 cas diagnostiqués par an. On pourrait investir dans cet appareil”, a lancé Raymonde Raoulx.
La difficile cohabitation entre structures publiques et privées
Sur la gouvernance des EPS qui se fera autour d'un conseil de surveillance avec des directeurs nommés en conseil des ministres, l'institution émet là encore plusieurs réserves. Elle préconise davantage de concertation et une procédure de nomination qui soit “moins politisée”. Bémol également sur la cohabitation entre les structures publiques et privées qui pourrait “se transformer en concurrence” si elle était mal encadrée. “Donnez-moi un exemple où public et privé arrivent à fonctionner ensemble. Moi, je n'en vois pas. Le raisonnement n'est pas le même. Un établissement privé, c'est fait pour gagner de l'argent. S'il en perd, il ferme. Même pour la formation professionnelle on a essayé de le faire et ça ne marche pas”, a alerté Christophe Plée.
Enfin, le Cesec insiste sur la nécessité d'améliorer le recrutement et la fidélisation des professionnels de santé en créant un statut spécifique et en revalorisant leurs salaires pour stopper l'hémorragie des départs fréquents de nombreux médecins et soignants. C'est pourquoi 31 conseillers ont opté pour un avis défavorable, “tant que les prérequis essentiels ne sont pas levés”. Cinq se sont abstenus. Le seul à s'être opposé à cet avis est Thierry Mosser qui aurait préféré un “avis favorable sous réserve expresse”. “Le message n'est pas le même”, a-t-il lancé, estimant que ce projet de loi avait “au moins le mérite de fixer un cap”. Car contrairement à Vaitea Le Gayic ou Atonia Teriinohorai qui qualifient ce texte de “coquille vide”, Thierry Mosser y voit “un cadre qu'il faut remplir”. La balle est désormais dans les mains de l'assemblée qui devra d'abord examiner ce projet de texte en commission.
Le Cesec reconnaît que ce projet de loi du Pays visant à créer des Établissements publics de santé (EPS) “repose sur des objectifs pertinents” mais qu'il ne peut “pas être adopté en l'état”, considérant qu'il manque d'éléments chiffrés, qu'il est mal ficelé, et qu'il ratisse trop large.
Le ministre de la Santé, Cédric Mercadal, propose en effet une réforme du système de santé polynésien en créant ces fameux EPS afin de structurer l'organisation hospitalière autour d'un cadre juridique spécifique qui est aujourd'hui trop “généraliste et inadapté”. Cela cause une rigidité administrative et une inefficacité dans la gestion des structures de santé. Un système à bout de souffle qu'il faut donc adapter aux réalités locales en tenant compte de la prévalence des maladies chroniques comme le diabète ou les maladies cardiovasculaires, du vieillissement de la population, des technologies médicales qui évoluent sans cesse, et d’une fragmentation de l’offre entre les secteurs privé et public.
Recentrer les missions du CHPF
En créant cette nouvelle catégorie d'établissements, avec trois types d'EPS ayant chacun un rôle défini, le ministre entend ainsi corriger ces insuffisances structurelles et améliorer la gouvernance. D'abord, le vaisseau amiral qu'est le CHPF sera l'établissement hospitalier central, dernier recours pour les pathologies graves. Les établissements périphériques (hôpitaux de Taravao, Uturoa et Nuku Hiva) seront axés autour des soins courants en hospitalisation ou en ambulatoire, et enfin, les établissements de santé spécialisés comme le pôle de santé mentale et l'Institut du cancer centrés sur leurs activités spécifiques.
Pour le Cesec, il est primordial de revoir au préalable les missions du CHPF déjà en proie à de grandes difficultés conjoncturelles et structurelles en les recentrant sur les soins aigus et en confiant les soins de longue durée ou la prise en charge de patients en convalescence aux établissements périphériques. Des établissements périphériques dont le rôle doit par ailleurs être renforcé pour éviter une concentration excessive des soins au CHPF qui est déjà saturé. Idem pour les dispensaires qui doivent être valorisés.
“Je ne peux pas donner un blanc-seing sans chiffres”
Les représentants de la société civile pointent surtout du doigt la précipitation de cette réforme au regard des prérequis nécessaires à sa bonne mise en œuvre. Avec en premier lieu, une analyse capacitaire approfondie intégrant le taux de fréquentation qui fait défaut. “On a très peu de chiffres et c'est bien pour ça que nous avons beaucoup insisté sur cette analyse”, a répondu la rapporteure, Maiana Bambridge interpellée par Christophe Plée sur les éléments chiffrés mis à disposition de la commission. Des données pourtant disponibles, selon Florence Drollet, mais qui n'ont pas été transmises. “Je ne peux pas donner un blanc-seing sans chiffres”, a abondé Mere Trouillet qui s'interroge par ailleurs sur la volonté affichée du ministre de mutualiser les coûts.
En effet, le projet de loi du Pays prévoit de créer un groupement hospitalier de la Polynésie française (GHPF) comme socle de la coopération entre les EPS et le secteur privé pour optimiser les ressources. “On mutualise les coûts en créant un nouvel organisme”, s'est ainsi étonnée Mere Trouillet. Dans son avis, le Cesec estime que le pilotage de ce nouveau groupement est “flou” et s'inquiète également de “l'absence de cadre financier et administratif clairement défini”. À ce titre, le Cesec dénonce la “gestion chaotique de la commande du cyclotron et du TEP-scan” qui “illustre parfaitement un exemple type de dysfonctionnement”. Un cyclotron qui manque à l'appel et un TEP-scan pour détecter les cancers de la prostate qui doit être opérationnel le 18 juin prochain. “Comment on détecte les autres cancers ? On nous parle de 1000 cas diagnostiqués par an. On pourrait investir dans cet appareil”, a lancé Raymonde Raoulx.
La difficile cohabitation entre structures publiques et privées
Sur la gouvernance des EPS qui se fera autour d'un conseil de surveillance avec des directeurs nommés en conseil des ministres, l'institution émet là encore plusieurs réserves. Elle préconise davantage de concertation et une procédure de nomination qui soit “moins politisée”. Bémol également sur la cohabitation entre les structures publiques et privées qui pourrait “se transformer en concurrence” si elle était mal encadrée. “Donnez-moi un exemple où public et privé arrivent à fonctionner ensemble. Moi, je n'en vois pas. Le raisonnement n'est pas le même. Un établissement privé, c'est fait pour gagner de l'argent. S'il en perd, il ferme. Même pour la formation professionnelle on a essayé de le faire et ça ne marche pas”, a alerté Christophe Plée.
Enfin, le Cesec insiste sur la nécessité d'améliorer le recrutement et la fidélisation des professionnels de santé en créant un statut spécifique et en revalorisant leurs salaires pour stopper l'hémorragie des départs fréquents de nombreux médecins et soignants. C'est pourquoi 31 conseillers ont opté pour un avis défavorable, “tant que les prérequis essentiels ne sont pas levés”. Cinq se sont abstenus. Le seul à s'être opposé à cet avis est Thierry Mosser qui aurait préféré un “avis favorable sous réserve expresse”. “Le message n'est pas le même”, a-t-il lancé, estimant que ce projet de loi avait “au moins le mérite de fixer un cap”. Car contrairement à Vaitea Le Gayic ou Atonia Teriinohorai qui qualifient ce texte de “coquille vide”, Thierry Mosser y voit “un cadre qu'il faut remplir”. La balle est désormais dans les mains de l'assemblée qui devra d'abord examiner ce projet de texte en commission.