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En Guadeloupe, se laver les mains pour lutter contre le coronavirus est parfois compliqué


Pointe-à-Pitre, France | AFP | vendredi 19/03/2020 - La consigne est claire: pour éviter de contracter le coronavirus, il faut se laver les mains régulièrement. Mais en Guadeloupe, les coupures d'eau récurrentes dans plusieurs communes, liées à la vétusté du réseau, compliquent sérieusement la chose.

"Cela fait 23 jours que je n'ai pas d'eau", témoigne Mésance Gervais, un habitant de Capesterre-Belle-Eau (sud-est de Basse-terre), qui vit non loin de l'Allée Dumanoir, avenue connue pour ses hauts palmiers qui bordent la route.
"C'est pareil pour tout le voisinage. Je commence à m'inquiéter car il ne pleut pas et ma citerne est presque à sec. Et vu la progression du virus sur l'île, j'ai un peu peur", explique le Capesterrien, qui dit avoir interpellé les élus de la commune sur le sujet. Sans réponse.
Une situation qui devient inquiétante, alors que la Guadeloupe vient de dépasser le seuil épidémique en comptabilisant jeudi 45 cas avérés de personnes atteintes par le Covid-19. La veille, le territoire comptait 33 cas confirmés.
En Guadeloupe, les défaillances de la distribution d'eau potable ne sont pas une nouveauté du fait de la vétusté du réseau d'adduction. Le réseau perd la majeure partie de son rendement avant que l'eau n'arrive au robinet. Résultat: depuis plusieurs années de nombreuses communes sont concernées par les tours d'eau dits "solidaires", qui permettent d'alimenter un quartier en eau quand un autre en est privé.
Lors de son déplacement en Guadeloupe en septembre 2018, Emmanuel Macron, interpellé sur ce problème, avait déploré la mauvaise gestion du réseau par les opérateurs et collectivités.
Il y a deux ans, les élus locaux avaient promis de mettre fin aux tours d'eau en janvier 2020 et d'instaurer une structure unique de gestion de l'eau, capable de régler les problèmes d'alimentation et de financement des régies. Mais les négociations stagnent et, élections municipales oblige, tout est encore en stand by.
Alors les citoyens restent rompus à l'exercice. "Chez nous, à Sainte-Anne, les tours d'eau sont respectés. Nous avons fait du sport dans le jardin avec les enfants, et avant la coupure à 18H00, nous avons pu prendre notre douche", raconte Maeva Barret, une habitante. 
 

- Coupures "intolérables" -

 
Restent les coupures intempestives. "Là, nous avons eu une coupure de plusieurs heures. Le problème c'est que nous avons deux infirmières à la maison qui, quand elles rentrent, doivent se laver et se désinfecter et faire des machines pour leurs vêtements", souligne Armand Hallot, autre habitant de la commune de Sainte-Anne.
"Le Siaeag (Syndicat intercommunal en eau et assainissement de la Guadeloupe, ndlr) ne répond pas, donc on ne sait pas vraiment si cela va durer ou pas", déplore-t-il.
"Les bureaux sont fermés en raison du confinement, en effet", indique Jean-Claude Pioche, qui assure la présidence du Siaeag et de ses régies. "Mais nos prestataires privés sont sur le terrain pour gérer les aléas du réseau".
Pour l'heure, une fuite sur la commune de Petit-Bourg n'a pas été encore repérée. "Nous avons aussi toujours un problème de remplissage du réservoir qui alimente Saint-François et la Désirade", souligne Jean-Claude Pioche.
Face à la situation, le préfet de région Philippe Gustin a pris jeudi un arrêté pour "se substituer aux communes défaillantes, des communes dans le périmètre du Siaeag, touchées par des coupures d'eau encore plus intolérables avec cette crise sanitaire". 
Concrètement, la préfecture entend installer des citernes d'eau non potable dans les communes "pour que les gens puisse avoir accès à l'eau pour se laver", indique l'arrêté.
Cette décision concernent les communes de Sainte-Anne, Petit Bourg, Le Gosier, la Désirade, Saint-François et Capesterre-Belle-Eau, afin de pallier "la carence des maires" à assurer la "salubrité publique". 

le Vendredi 20 Mars 2020 à 06:24 | Lu 356 fois