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Assassinat pour le trésor des "postiches": Fourniret interrogé sur son passé au début de son procès


Versailles, France | AFP | mardi 13/11/2018 - Le procès du tueur en série Michel Fourniret, qui comparaît aux côtés de son ex-femme Monique Olivier, jugé pour l'assassinat de la femme d'un ex-codétenu en 1988 afin de lui voler le trésor du "gang des postiches", s'est ouvert mardi devant la cour d'assises des Yvelines.

L'"ogre des Ardennes ", 76 ans, a commencé, la voix éraillée, par décliner son identité et son ancienne profession, "artisan", avant son incarcération en 2003 pour le meurtre de sept jeunes filles ou femmes. Puis d'évoquer laconiquement son enfance et sa vie de famille, souvent réticent à répondre aux questions du président.
"Lorsqu'il s'agit d'actes inexcusables, rien n'est à dire", a-t-il indiqué, avant que le président ne le coupe pour revenir aux éléments de personnalité. "Je ne saurais vous dire", a répondu à plusieurs reprises Fourniret aux questions sur son enfance ou ses relations avec les trois femmes qu'il a eues, invoquant une mémoire défaillante.
Barbe et cheveux blancs, visage émacié, l'accusé s'est pourtant dit à l'entame du procès prêt à répondre aux questions, malgré un problème apparent d'audition. Son avocat Grégory Vavasseur avait souligné avant le procès les problèmes de mémoire de son client, dus à l'âge.
"Je ne pense pas que Michel Fourniret soit diminué intellectuellement" ni "qu'il ait baissé la garde", a estimé Me Richard Delgenes, avocat de Monique Olivier, lors d'une suspension d'audience. "Il a vieilli, mais il est toujours aussi alerte et quand il s'agit de ne pas répondre aux questions ou d'y répondre à sa façon il est toujours présent", a-t-il souligné.
 

- "Pervers absolu" -

 
Me Didier Seban, à la fois avocat du mari et de l'amant de la victime, tous deux présents sur le banc des parties civiles, a aussi estimé le couple criminel "attentif, présent au procès" mais tous deux, sont "enfermés dans leur monde aujourd'hui".
"Michel Fourniret est un pervers absolu, il voudra s'amuser avec les victimes, avec la cour d'assises", estime l'avocat. "On peut peut-être espérer plus de Monique Olivier qui elle, affiche dans les expertises une certaine honte par rapport à ce qu'elle a commis", mais "plus (la honte) d'être mise en cause publiquement qu'un véritable remords", a-t-il poursuivi. 
Condamnés à la perpétuité en 2008, les accusés, tous deux de noir vêtus, sont jugés pour le seul crime crapuleux imputé au tueur en série: l'assassinat de Farida Hammiche, 30 ans au moment de sa disparition.
Elle était l'épouse d'un ex-codétenu de Fourniret, le braqueur Jean-Pierre Hellegouarch, partie civile au procès aux côtés de deux sœurs et d'un amant de la victime. Morte étranglée et frappée à coups de baïonnette près de Clairefontaine (Yvelines), selon les aveux de Fourniret, son corps aurait été enterré non loin de là, dans un terrain vague, mais n'a jamais été retrouvé.
En mars 1988, alors que Fourniret a été libéré, Farida Hammiche le contacte, à la demande de son mari, pour qu'il l'aide à déterrer, contre rétribution, un trésor enfoui dans un cimetière du Val-d'Oise. Hellegouarch, toujours en prison, a en effet eu vent de l'emplacement d'une caisse à outils renfermant ce trésor par un ancien codétenu, un Italien qui s'était évadé de prison avec un membre du "gang des postiches" et avait recueilli ses confidences.
L'enquête a établi que cette caisse recelait 20 kg de lingots et pièces d'or, une partie du magot amassé par cette célèbre entreprise criminelle spécialisée dans les braquages de banques et qui opéra à Paris entre 1981 et 1986.
Le trésor une fois déterré, Fourniret n'aurait alors rien reçu en échange ou pas assez à son goût. Il décide donc "de se servir lui-même", comme il l'avoue aux enquêteurs.
Il attire la femme dans un guet-apens et la tue avant de faire disparaître son corps pour récupérer le magot, qui lui servira entre autres à acheter le château de Sautou dans les Ardennes où l'on retrouvera deux de ses victimes enterrées. 
Farida Hammiche fait partie des huit femmes que le tueur a reconnu en 2004 avoir tuées. Il en a récemment avoué deux autres.

Fourniret impute la responsabilité de tous ses crimes à sa première femme

"Elle a eu des vies avant. Irréversible, le résultat": à son procès, Michel Fourniret a de nouveau expliqué mardi son parcours criminel par le traumatisme causé chez lui par le fait que sa première femme n'était pas vierge lorsqu'il l'a épousée.
Interrogé sur sa première relation amoureuse par Didier Seban, avocat notamment de Jean-Pierre Hellegouarch, le veuf de Farida Hammiche, Michel Fourniret a répété les explications données lors des enquêtes. Selon ses aveux de l'époque, il "devait chasser au moins deux vierges par an", une obsession née du fait que sa première femme, qu'il pensait vierge, ne l'était pas au moment de leur mariage.
"Si je n'avais pas épousé une femme qui manquait un peu d'inexpérience, ça ne serait pas arrivé", a-t-il froidement répété mardi, avant de poursuivre à la troisième personne.
"Mettez-vous dans la peau d'un gamin puis d'un adolescent qui fait l'armée, ne sort pas en permission, lit, écrit beaucoup, et qui arrive au mariage pas peu fier de se marier puceau", a-t-il asséné, bras croisés, fixant l'avocat dans les yeux.
"Ce type-là, ce connard, épouse puceau une dame de 7 ans, 3 mois et 18 jours son aînée, mais qui manquait par trop d'inexpérience", s'est-il emporté.
Cette réalité, "c'est comme un obus explosif dans votre tête. Pigé, mec ?", a-t-il lancé à Me Seban, élevant subitement la voix. "Je pige", lui a tranquillement rétorqué l'avocat.
Condamné en 2008 à perpétuité pour le meurtre de sept jeunes filles ou femmes, Fourniret a qualifié cette condamnation de "pas totalement infondée".
Concernant sa santé, il a indiqué que "physiquement ça va, moralement, ça peut aller". "Il est exact que je ne suis pas handicapé par une grande maladie", a-t-il ajouté. Il a toutefois régulièrement évoqué ses problèmes d'audition et une mémoire en partie défaillante au cours de cette première matinée d'audience.
Le président Didier Safar a rappelé qu'en détention, Michel Fourniret ne sortait jamais en promenade, ne participait à aucune activité et ne recevait aucune visite.
"A quoi occupez-vous votre temps ?", a-t-il demandé. "Des parties d'échec sans partenaire autre que le jeu, et puis la lecture, l'écriture", a répondu Fourniret. Le président du tribunal a également souligné que l'accusé refusait toute rencontre avec le service psychiatrique.

le Mardi 13 Novembre 2018 à 05:10 | Lu 393 fois