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​Plongez dans les bleus d’Aqua Obscura


Ben Thouard a conçu ce nouveau livre comme une œuvre d’art (Photo : Anne-Charlotte Lehartel).
Ben Thouard a conçu ce nouveau livre comme une œuvre d’art (Photo : Anne-Charlotte Lehartel).
Tahiti, le 14 octobre 2025 – Pour son troisième livre pensé comme une exposition, le photographe Ben Thouard pousse son art encore plus loin pour nous entraîner dans les profondeurs et les détails de l’océan. Vagues, bulles, mousses, il joue avec les matières comme avec le regard du public. Un pari artistique et technique qui l’a conduit à opter pour une impression sur mesure en bleu et blanc.

 
Après Surface en 2018 et Turbulences en 2021, Ben Thouard continue de surprendre avec la sortie de son troisième livre : Aqua Obscura. Rien qu’à sa couverture, l’ouvrage intrigue entre les bulles semblables à des méduses, les nuances de bleu intenses et ce choix de titre en latin. “C’est un clin d’œil à la camera obscura (chambre noire, NDLR), qui est l’ancêtre de l’appareil photo, en association avec mon univers aquatique. C’est aussi une façon de plonger vers les profondeurs en allant plus dans le détail, parfois avec un côté abstrait”, explique-t-il.


​“Brouiller les pistes”


Connu pour ses photos sous-marines, le photographe de Vairao pousse son art encore un peu plus loin en explorant la matière. “Le but, c’était de proposer quelque chose de différent par rapport à ce que j’avais déjà fait. J’ai voulu travailler sur les textures, les mouvements et les jeux de lumière avec des bulles, des mousses, des flous filés. Ça permet de laisser vivre la photo et d’avoir plusieurs interprétations et points de vue sur l’image. C’est la magie de la photo : on a un instant figé ou presque, mais on arrive à interroger le public. Quand on est déstabilisé ou bouleversé, j’adore cette sensation. J’aime brouiller les pistes : est-ce qu’on est toujours sous l’eau ou pas ?”, s’amuse l’artiste, qui a également opté pour un papier texturé.
 
Pas de numérotation, ni de texte en dehors de l’introduction, des formats de photos variés parfois entrecoupés d’espaces blancs, mais aussi des jeux d’illusion et d’assemblage : si la mise en page de ce nouveau livre peut dérouter, elle s’articule comme une exposition où le moindre détail a été pensé pour ne pas “distraire” le regard, ni “devancer” l’interprétation du public. “Il y a le contenu avec les photos, mais aussi l’objet en lui-même et la manière de le présenter. C’est toute la différence avec des photos publiées sur Instagram. C’est le côté fun du livre qui permet de jouer avec l’œil du lecteur”, remarque Ben Thouard.


​Impression sur mesure


Mais Aqua Obscura a un autre secret, une tonalité bien à lui : il est imprimé uniquement avec des encres bleues. “Après Turbulences, j’ai voulu travailler sur un livre en noir et blanc pour me concentrer sur la lumière et la matière de l’eau. Mais ça aurait été dommage de passer à côté de la beauté et de la clarté exceptionnelles des bleus en Polynésie... Alors que les impressions classiques se font en CMJN (cyan, magenta, jaune, noir, NDLR), là on a une richesse dans la palette des bleus qui est unique. C’était un pari : on a dû développer un profil colorimétrique sur mesure pour ce livre. Je me suis déplacé en France pour l’impression avec une super équipe. Ce n’est pas du noir et blanc, c’est du bleu et blanc.”
 
Quatre années de travail entre Tahiti, Hawai’i et le Portugal sont condensées en 85 photos qui font aussi l’objet d’une exposition jusqu’à fin octobre à la galerie Blin plus Blin, à Paris, où a eu lieu le lancement du livre le 25 septembre dernier. L’ouvrage est disponible en ligne sur le site de l’artiste au tarif de 65 euros, à retrouver début décembre en librairie au Fenua. Une exposition est également en projet à Tahiti.

Une photo primée

“Ocean photographer of the year” en 2022, Ben Thouard a remporté le mois dernier un nouveau prix attribué par le magazine Oceanographic, cette fois-ci en catégorie “aventure”. La photo primée figure en double page dans son nouveau livre. Elle n’a pas été prise à Teahupo’o, où le photographe a ses habitudes, mais sur une autre vague mythique, à Nazaré. “J’avais soumis une dizaine de photos, mais c’est celle-là, une de mes préférées, qui a tapé dans l’œil du jury. C’est hyper gratifiant et c’est une belle récompense d’avoir été choisi parmi des centaines ou des milliers de photos”, confie l’artiste, qui se souvient précisément de cet instant : “C’était un moment particulier, j’avais shooté tout l’après-midi depuis la plage. Ces rangées de vagues énormes, le vent qui souffle l’écume et ce jet-ski qui navigue au milieu de ce chaos, on se rend compte de l’immensité du spot et de l’urgence d’en sortir. C’est intense !” 


Rédigé par Anne-Charlotte Lehartel le Mardi 14 Octobre 2025 à 15:36 | Lu 1082 fois