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​La grogne couve aux Affaires sociales


Isabelle Sachet a organisé une assemblée des agents de la DSFE, vendredi après-midi à la mairie de Pirae.
Isabelle Sachet a organisé une assemblée des agents de la DSFE, vendredi après-midi à la mairie de Pirae.
PIRAE, le 4 octobre 2019 - Isabelle Sachet a organisé une assemblée générale des agents de la DSFE, vendredi pour rétablir la cohésion d'un service des affaires sociales en proie à des problèmes d'effectifs. Une réunion bipartite est voulue sous huitaine par les syndicats pour établir un plan de recrutement pluriannuel faute de quoi le dépôt d'un préavis de grève est envisagé.

S’ils ont l'impression rassurante d’avoir été écoutés par Isabelle Sachet, les agents de la Direction des solidarités, de la famille et de l’égalité (DSFE, ex-DAS) sont sortis avec un sentiment partagé de l’assemblée générale organisée vendredi à la mairie de Pirae. Interrogé sous couvert de l’anonymat, plusieurs agents nous ont fait part d’une satisfaction qui peine à occulter les problèmes rencontrés au quotidien dans l’exercice de leurs missions. En cause : le manque d’agents de terrain.

Au surplus, malgré une pétition de soutien à leur ancienne directrice, signée fin septembre par 130 des 200 agents du service, Valérie Hong-Kiou a été nommée le 1er octobre par arrêté en conseil des ministres, pour assurer l’intérim en remplacement de Christiane Ah-Scha à la tête de la DSFE. Le ministère justifie cette mesure par une "perte de confiance" entre la ministre et son ancienne directrice. Dans la pétition, les agents défendaient "son engagement sincère, quotidien et bienveillant à [leur égard] et [à celui] de tous les usagers de la DSFE". Le courrier insistait surtout sur le manque de moyens humains qui handicape le service social dans la conduite de ses missions, notamment les nouvelles, confiées à effectif égal.

"Stress professionnel", "mal-être des agents", "risque de burn out" : une lettre adressée au président Fritch mi-septembre affichait déjà les difficultés des agents de terrain à faire face au surcroît de travail engendré par le transfert à la DSFE, en 2019, des missions du service social de la CPS et par la mise en œuvre du nouveau dispositif Aidant Feti’i : "Cela vient accentuer l’épuisement professionnel dans une institution déjà en carence de poste techniques et administratifs, malgré les 12 assistants socio-éducatifs recrutés en 2019 et dédiés à la protection de l’enfance." Les agents évoquent aussi "la recrudescence des incidents" avec les usagers : "Les demandes d'aides sont considérées comme un dû par certaines familles qui acceptent difficilement l'application des procédures, le délai de traitement et parfois nos décisions, éclairées par les rapports d'enquêtes sociales."

Menace de grève

Dans le même temps, les agents dénoncent "des postes qui ne sont pas pourvus parce que des dossiers restent bloqués dans les ministères. Nous avons des candidats, des postes vacants et on n’arrive pas à recruter pour des raisons qui nous échappent". Six postes de travailleurs sociaux seraient vacants à la DSFE.Et c’est sans compter avec le constat d'audit conduit en 2017 par la Direction de la modernisation et des réformes de l’administration sur le fonctionnement de la DSFE qui évaluait son besoin en travailleurs sociaux à 80 agents de terrain en plus des 95 déjà en poste.

C’est donc sur fond de surmenage et de grogne au sein du service administratif que la réunion a été convoquée à la hâte mardi, avec un caractère "obligatoire", trois jours avant sa tenue.  

"Je leur ai parlé de cohésion, a expliqué Isabelle Sachet à l’issue. Nous sommes une famille. (…) Cette réunion était nécessaire. Je leur ai dit que j’avais déjà prévu de les recevoir bientôt. Je pense que nous avons réussi cette après-midi à mettre de la cohésion dans cette belle équipe de la DSFE. Je continue à leur dire que je les soutiens. Je sais ce que c’est que de travailler en milieu social défavorisé. (…)."

Ce point de vue n’est pas partagé par les délégués syndicaux. De leur propre aveu, l’assemblée de vendredi après-midi, à la mairie de Pirae, laisse l’impression d’un ouvrage de communication fait de "promesses floues".
"On nous a fait des promesses dont rien n’assure qu’elle seront tenues", a souligné Claudine Laugrost, la responsable de la subdivision des archipels et déléguée A Tia i Mua à la commission administrative paritaire de la DSFE. "Je pense qu’il est plus qu’urgent que notre ministre rencontre maintenant les syndicats en comité restreint, pour établir des protocoles d’accord. (…) Si la ministre ne rencontre pas les syndicats d’ici très peu, je pense que nous serons obligés d’adresser un préavis."

Cette réunion de travail bipartite est d’ailleurs souhaitée sous huitaine par la syndicaliste, faute de quoi "ce sera un préavis de grève", menace Claudine Laugrost. "S’il faut en venir là nous le ferons ; mais ce n’est pas ce que nous souhaitons." Les partenaires sociaux souhaitent aboutir à un planning pluriannuel de recrutement en accord avec le ministère de tutelle de la DSFE, et figer cet accord dans une feuille de route.

Le timing est rêvé en période de concertation budgétaire pour l’exercice 2020. "S’ils veulent me voir à nouveau, il n’y a pas de souci. Ma porte est ouverte", assure Isabelle Sachet.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Vendredi 4 Octobre 2019 à 17:49 | Lu 4408 fois