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Affaire Mai - Marlier : les dessous d’un trafic mafieux


PAPEETE, le 3 juillet 2018 - Le procureur de la République a rendu son réquisitoire définitif dans le cadre du trafic d’ice organisé par le guide touristique Yannick Mai et Moerani Marlier. Le magistrat demande le renvoi devant le tribunal correctionnel de 12 individus. L’audience devrait avoir lieu à la fin du mois d’août prochain.

Après l’affaire « Kikilove », la filière d’importation d’ice dirigée par Yannick Mai et Moerani Marlier est l’une des plus importantes démantelées ces dernières années en Polynésie française. Pour avoir importé et écoulé plus de cinq kilos d’ice, les deux hommes ainsi que dix autres mis en examen devraient comparaître devant le tribunal correctionnel dans la dernière quinzaine du mois d’août prochain si le juge d’instruction Thierry Fragnoli suit le réquisitoire du procureur de la République.

« El Chapo »

Au mois de mai 2017, les enquêteurs de la Section de recherches interpellent un individu en possession de cinq grammes d’ice, de 0.95 gramme de cocaïne et de 442 000 francs en espèces. L’homme indique qu’il se fournit auprès d’un individu qui travaille pour le compte d’un certain Moerani Marlier. Les enquêteurs découvrent que ce dernier, surnommé le « boss » ou « el Chapo », apparaît comme étant à la tête d’un conséquent trafic d’ice à Tahiti et Moorea. A l’image de Kikilove, l’homme, grand consommateur de méthamphétamines, mène grand train dans des hôtels étoilés. Entouré d’une dizaine de personnes, il vit dans trois habitations dont deux à Tahiti et une à Moorea et roule en Porsche Cayenne. Si Moerani Marlier se chargeait d’écouler la drogue sur le fenua, il apparaît que Yannick Mai, guide touristique, s’occupait quant à lui de la partie importation. L’homme, surnommé « le parrain », profitait de voyages aux Etats-Unis dans le cadre de sa société de charter pour importer de la drogue.

Le 10 juin 2017, Yannick Mai, détenteur de la double nationalité franco-américaine, est arrêté à l’aéroport de Los Angeles en possession de 3,7 kilos d’ice, puis incarcéré. Sa fille et son assistante sont également appréhendées. Malgré ce coup d’arrêt, Moerani Marlier poursuit le trafic en utilisant des mules. L’une d’entre elles est interpellée le 4 septembre à son arrivée de Los Angeles en possession d’1,2 kilo d’ice. Celui que l’on surnomme « El Chapo » est arrêté dans la foulée alors qu’il se trouve dans un luxueux établissement de la côte ouest. Dans sa chambre, les enquêteurs découvrent une arme chargée. A son domicile sont découverts des produits, des gants et des masques de protection pouvant laisser à penser l’existence d’un laboratoire. Entendu, Moerani Marlier déclare qu’il a connu Yannick Mai à sa sortie de prison et que ce dernier lui a proposé de l’ice. Suite à cette première transaction, le guide touristique était devenu le fournisseur de Marlier qui employait lui-même plusieurs revendeurs. Il indiquait que le trafic lui avait rapporté 20 millions de francs. Après l’arrestation de Yannick Mai à Los Angeles, Marlier et ses hommes avaient rejoint le domicile du guide afin de procéder à un « nettoyage. »

Selon les déclarations de plusieurs mis en cause, Yannick Mai se fournissait aux Etats-Unis mais également au Mexique. Lors de l’achat de 400 grammes d’ice à Los Angeles, un proche du guide affirme que la drogue avait été livrée à l’hôtel dans une enveloppe déposée sur une « machine à limonade. »

Dans ce dossier, l’on retrouve également l’ex-huissier Patrick Rey qui a été condamné le 24 octobre dernier à trois ans de prison dont 18 mois avec sursis pour abus de confiance, ainsi que sa femme. L’homme aurait apporté son concours au trafic en achetant des billets d’avion, en accompagnant les mules et en assistant à plusieurs rendez-vous avec Moerani Marlier.

Yannick Mai, Moerani Marlier, Patrick Rey et sa femme ainsi que huit autres mis en cause – revendeurs, mules – comparaîtront donc devant le tribunal correctionnel durant la dernière quinzaine d’août si le juge d’instruction suit le réquisitoire du procureur de la République dans son ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel (ORTC). Les plus impliqués encourent jusqu’à dix ans de prison. Yannick Mai, dans la mesure où il est détenu aux Etats-Unis où il est poursuivi pour des faits similaires, ne sera certainement pas présent lors du procès.

Rappelons que toute personne est présumée innocente tant que sa culpabilité n'a pas été établie par un tribunal et que tous les recours devant les juridictions compétentes n'ont pas été épuisés.

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 3 Juillet 2018 à 17:39 | Lu 13280 fois