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Transport en commun : impossible de passer le permis


PAPEETE, le 23 août 2016 - Au fenua, une seule auto-école forme au permis de conduire transport en commun. Le véhicule dont elle dispose est en panne depuis plusieurs mois. Un handicap énorme pour les candidats, pour qui permis rime souvent avec emploi.

" Nous sommes pris en otage! Tout cela parce qu'une entreprise ne fait pas correctement son boulot…" Elise De Smet, gérante d'une société de transports à Bora Bora, ne peut contenir sa colère. Depuis deux ans, ses employés souhaitant passer le permis de la catégorie D, transport en commun, ne le peuvent pas. La seule école en mesure d’offrir les cours sur le fenua en est incapable. "Nous avons dû arrêter cette catégorie depuis quelques temps, remarque le gérant de l'auto-école. Le véhicule qui sert pour la formation et l'examen est en panne. Il manque une pièce au camion. Malheureusement, nous ne sommes pas en mesure de faire la dépense pour le moment."

La gérante de la société Otemanu Tours a formé des employés au métier de conducteur de transport en commun, dans la théorie. Pour obtenir leur permis, il manque la pratique. "Nous étions prêts à les envoyer à Tahiti, à nos frais. Mais on nous apprend que le véhicule est en panne! J'ai appelé l'auto-école, la direction des transports, on m'a dit qu'il fallait faire un courrier, écrire des mails… et toujours rien ! Résultat : j'ai des personnes qui attendent d'évoluer dans l'entreprise et moi, je n'ai pas assez de conducteurs !"

Compte tenu de la situation, Elise, qui travaille dans les transports depuis de nombreuses années, est nostalgique. Selon elle, la règlementation était plus simple avant. "Il y a 20 ans, les gens pouvaient passer leur permis ici, à Bora Bora, avec nos bus. Un contrôleur venait de Tahiti et faisait passer la pratique ! En 20 ans, ils n'ont tué personne sur la route !"

Dans cette entreprise, six personnes sont dans l'attente de passer leur permis de conduire transport en commun. Ils ne sont les seuls. A Bora Bora ou Tahiti, d'autres potentiels conducteurs attendent d'avoir leur examen pratique.

REPRISE DE L'EXAMEN AVANT LA FIN DE L'ANNÉE

Selon l'auto-école, une dizaine de personnes, originaires de Tahiti, se présente à l'examen chaque année. Comparé au nombre de candidats dans les autres catégories, cela ne représente qu'un petit nombre de dossiers pour l'auto-école. "Si cela avait été pour une autre catégorie, nous nous serions bougés plus rapidement, c'est certain. Mais il faut comprendre qu'une auto-école est une entreprise privée. Nous n'avons aucune aide de personne, aucune défiscalisation. Il y a des investissements qui sont plus importants à faire que d'autres…"

Pour autant, le gérant de l'auto-école a bien conscience de l'importance de cette formation. Il assure que dès qu'il le pourra, le véhicule utilisable pour les examens sera réparé. "Je sais que ces personnes ont besoin du permis transport en commun. Nous allons faire en sorte de le remettre bientôt en place. Nous allons réparer le véhicule très bientôt et redemander l'agrément pour le faire passer. J'espère que, avant la fin de l'année, nous pourrons à nouveau offrir aux personnes qui le souhaitent, le permis transport en commun."

Trois questions à Patrice Perrin, conseiller technique au ministère de l'Équipement et des Transports.

"Nous ne pouvons rien faire!"

Avez-vous connaissance de la situation?
Oui, nous le savons. Mais nous ne pouvons rien faire. Il s'agit d'un véhicule à double commande, ce qui est très rare sur le territoire.

Pourquoi ne pouvez-vous rien faire?
Si quelqu'un nous demande de l'aide, nous étudierons la situation. Mais il s'agit d'un problème d'une entreprise privée qui ne peut pas assurer ce service. La solution doit venir d'elle, ce n'est pas notre rôle de régler ce problème. Nous distribuons simplement les agréments : les auto-écoles n'ont pas de mission de service publique.

Mais c'est un problème qui pénalise du monde…

J'en suis conscient. Nous aussi, nous aimerions qu'il y ait plus de conducteurs de transports en commun. Il faut que l'auto-école répare son véhicule.

Gaston Tong Sang : "Il faut donner le change à ceux qui cherchent du travail !"

"J'ai pris connaissance de ce problème de permis lors de la tournée des élus de l'assemblée de la Polynésie française aux Raromatai. Comme pour le permis B, il n'est plus possible de passer l'examen ici.
Cette problématique pénalise énormément les archipels. En tant que maire de Bora Bora, je peux dire que nous manquons beaucoup de services de transport en commun, que ce soit au niveau scolaire, associatif ou touristique.
Je compte voir avec le Pays prochainement quelles solutions peuvent être mises en place. Il faut donner le change à ceux qui cherchent du travail ! Je pense qu'il y a au moins plus d'une dizaine de conducteurs qui sont dans l'attente.
Nous souhaitons développer le tourisme de croisière mais nous n'avons que 10 trucks pour faire le tour de l'île ! Il faut accompagner l'évolution de ce tourisme, sinon ils vont choisir d'autres îles…"

Rédigé par Amelie David le Mardi 23 Août 2016 à 15:58 | Lu 6054 fois