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Richard Didier : « Nous sommes dans l’attente d’instructions de Paris »


Richard Didier, Haut-Commissaire de la République en Polynésie française
Richard Didier, Haut-Commissaire de la République en Polynésie française
Après une période de réserve et de silence de plusieurs semaines, Tahiti infos a interrogé Richard Didier, le Haut-commissaire de la Polynésie française, au sujet de diverses questions d’actualité, à la lueur des changements politiques qui s’opèrent en métropole et sur le territoire.]i

Tahiti infos : Un certain nombre de changements se sont produits dans le paysage politique en métropole et sur le territoire, ces derniers jours. Quelles sont vos relations avec le nouveau ministre de l’Outre-Mer, Victorin Lurel ?

Richard Didier : C’est mon ministre. Je suis son subordonné. J’ai rencontré son cabinet la semaine dernière. Je suis invité avec les autres collègues préfets d’Outre-Mer et de métropole à une réunion de préfets, début juillet, et on aura une réunion spécifique de travail avec M. Victorin Lurel.

Tahiti infos : Aujourd’hui, quelles sont les priorités de votre mission en Polynésie ?

Richard Didier :On attend la nomination du nouveau gouvernement qui n’aura lieu que jeudi prochain (21 juin 2012, ndlr). Ensuite on aura cette réunion avec le ministre. Il nous y donnera ses instructions et notre feuille de route.

Tahiti infos : Après le clash du comité de suivi du plan de redressement de la Polynésie française, en mars dernier, et le fait que le Pays avait laissé entendre que les discussions ne reprendraient qu’après les présidentielles, où en êtes-vous dans ce dossier là ?

Richard Didier : Nous sommes dans l’attente d’instructions de Paris. Le président Temaru est parti hier (lundi 18 juin, ndlr) sur Paris, avec un certain nombre de ministres. Ils vont rencontrer divers responsables métropolitains, une fois que le nouveau gouvernement sera mis en place. J’aurai ensuite cette réunion au ministère de l’Outre-mer. On verra ensuite comment remettre en place tout cela.

Tahiti infos : Concernant le Contrat de projet Etat-Pays, il y a un certain nombre de personnes qui prétendent que l’argent non engagé sera perdu. Est-ce une manière correcte de considérer les choses ?

Richard Didier : Le contrat dure jusqu’à la fin 2013, l’argent n’est pas perdu tant qu’il n’est pas consommé. C’est vrai que l’on a un faible taux d’engagement, un faible taux de consommation, et cela nous laisse à croire que cela va être difficile jusqu’à fin 2013 de consommer tous les crédits. Mais il y a un certain nombre de solutions au plan technique. On a déjà modifié les orientations du Contrat de projet en y introduisant notamment les constructions scolaires, communales ; il y a toute une série de décisions localement qui nous permettent d’augmenter la consommation. On peut également allonger ou reconduire le Contrat. Tout cela sera négocié.
Ce qu'il est important de dire c’est que ce contrat est en délicatesse, puisque sur le volet Logement social, qui représente près de la moitié des crédits, nous n’avançons pas. Il est clair que nous aborderons ce sujet pour voir comment reprendre la tâche, et voir comment on souhaite aboutir et dans quelles conditions.
Ensuite pendant toute cette période les travaux ont continué, les comités opérationnels se sont réunis – les services de l’Etat et du Pays se réunissent toutes les semaines pour faire état de l’avancement de tous les projets. Même si au plus haut niveau, celui du Président du Pays, il y a eu le souhait de rompre le contact, les travaux ont continué pendant cette période. Une réunion du comité de suivi du Contrat de projet est prévue en juillet avec les autorités du Pays. D’ici là, nous aurons nos instructions.


Tahiti infos : Quelle est votre analyse politique, à la suite des élections qui viennent de se dérouler en Polynésie française ?

Richard Didier : D’une part que la démocratie fonctionne bien en Polynésie française. Les polynésiens ont pu s’exprimer, même si on peut regretter que le taux de participation n’a pas été extraordinaire. Je tiens aussi à remercier tous les volontaires qui ont organisé et pris part à ces élections, non seulement dans les services de l’Etat, mais aussi dans les communes : tous les scrutateurs, les assesseurs, les personnels techniques dans les communes, qui ont fait qu’il y a eu quatre élections d’organisées et qui se sont parfaitement déroulées, sur un territoire où l’organisation présente un certain nombre de difficultés. Je tiens vraiment à remercier tous ces gens, dans les communes, qui ont contribué à l’exercice de la démocratie.

Tahiti infos : Le président de la République François Hollande ainsi que Victorin Lurel ont chacun annoncé une possible visite en Polynésie française, avez-vous plus d’informations à ce sujet ?

Richard Didier : Non, pas pour l’instant. C’est sûr que le ministre de l’outre-mer m’a confirmé qu’il essaierait de venir avant la fin de l’année. Mais encore une fois à ce stade, on attend la nomination du nouveau gouvernement français.

Richard Didier : « Nous sommes dans l’attente d’instructions de Paris »
Un mot sur le conflit de l’aéroport, avec encore une fois un problème de pompiers, comme en 2010. Pourquoi les réquisitions ne fonctionnent pas à l’aéroport ?

Richard Didier : Déjà, je me permets de vous faire observer que nous ne sommes pas comme en 2010 : vous avez remarqué tout de même que l’aéroport n’est pas bloqué. A la fois parce que le syndicat, je crois, a été responsable et n’a pas cherché à bloquer définitivement la plateforme ; mais aussi parce que les services du Pays et de l’Etat se sont organisés pour maintenir, avec un système de priorités réglementaires, l’ensemble des vols, même si l’on observe des décalages d’horaires. Nous faisons une réunion chaque jour avec l’ensemble des services, depuis le démarrage du conflit, avec les compagnies aériennes, avec l’aéroport pour faire en sorte que la situation ne soit pas bloquée. Ensuite c’est vrai que les réquisitions n’ont pas été suivies des faits. En 2010, nous n’avions pas le pouvoir de réquisition, depuis nous l’avons acquis. Il nous faut encore dans ce domaine une loi de pays sur le service minimum, c’est un sujet dont nous serons amenés à reparler avec le Pays, pour voir s’il souhaite aller dans ce sens. Cela nous permettra ensuite de procéder à des réquisitions.

Cela veut-il dire que les pompiers qui ne se sont pas présentés à leur poste n’auront aucun problème ?

Richard Didier : Il y aura peut-être des poursuites. C’est au Parquet d’estimer cela. Mais c’est vrai qu’il existe un vide juridique, en particulier au sujet d’une loi sur le service minimum, qui existe en Métropole et qui, même imparfaite, offre une base juridique pour la réquisition.

Avez-vous eu un point de situation récemment ?

Richard Didier : Je suis tenu informé de ce qui se passe quasiment heure par heure. J’ai encore eu le concessionnaire ADT il y a une demi heure au téléphone (mardi 19 juin, 11 heures, ndlr), donc on suit cela d’un point de vu sécurité, pour que la plateforme soit sûre, mais également d’un point de vue économique, pour éviter que l’on se retrouve dans la même situation qu’en 2010.
Ce que je souhaite c’est que les négociations suivent leur cours, entre le concessionnaire et les syndicats. Le droit de grève est un droit constitutionnel, il faut le respecter. Mais je souhaite que ces négociations puissent aboutir le plus rapidement possible, pour éviter le risque de blocage.


On annonce un problème d’avitaillement pour la fin de semaine, vous avez une solution de secours ?

Richard Didier : Non, c’est vu avec la SOMSTAT, c’est vrai qu’il y a un certain nombre de solutions de secours qui sont mises en place pour les compagnies aériennes, en tout cas à l’international, qui rechargent leur kérozène d’une manière importante à Los Angeles ; mais là encore j’espère que les négociations vont rapidement aboutir.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 19 Juin 2012 à 17:27 | Lu 5708 fois