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L'égalité réelle passera par les Accords de Papeete


La ministre des Outre-mer George Pau-Langevin et Ericka Bareigts, secrétaire d’État chargée de l’Égalité réelle ont présenté mercredi le projet de loi sur l'égalité réelle outre-mer. Photo : AFP
La ministre des Outre-mer George Pau-Langevin et Ericka Bareigts, secrétaire d’État chargée de l’Égalité réelle ont présenté mercredi le projet de loi sur l'égalité réelle outre-mer. Photo : AFP
PAPEETE, le 3 août 2016. Le projet de loi sur l'égalité réelle outre-mer a été présenté mercredi en conseil des ministres. Il met en place de nouveaux dispositifs pour réduire, à un horizon de 10 ou 20 ans, les écarts de développement entre les populations d'outre-mer et de métropole. Pour la Polynésie, ce sont les accords de Papeete qui préciseront les mesures mises en place spécifiquement pour notre collectivité.

Le projet de loi de programmation, présenté par la ministre des Outre-mer George Pau-Langevin et Ericka Bareigts, secrétaire d’État chargée de l’Égalité réelle, affirme que la réduction des écarts de développement entre les populations d'outre-mer et de métropole, en matière économique ou sociale, est une "priorité de la Nation". Il devrait être présenté au Parlement début octobre.

Ce projet de loi fait suite au rapport présenté en mars par le député PS de Guadeloupe Victorin Lurel, qui préconisait "un big-bang économique" dans les Outre-mer pour réduire d'ici à 25 ans les inégalités avec l'Hexagone.

Le projet de loi s'appuie sur le constat d'un niveau de vie qui, en termes de richesse, se situe selon les territoires entre 30% et 80% du PIB par habitant hexagonal.

Il prévoit la création, dans chacune des onze collectivités d'outre-mer habitées, d'un "plan de convergence", un contrat entre Etat et collectivités pour parvenir à réduire cet écart à l'horizon de 10 à 20 ans et révisable régulièrement.

Ce plan comprend une "stratégie de développement" pour fixer un horizon commun aux politiques publiques et un "suivi rigoureux" qui mesurera la contribution de chaque intervention.

Il s'agira ainsi de faire d'abord un diagnostic, en définissant des indicateurs spécifiques à chaque territoire (décrochage scolaire, chômage, mortalité infantile, illettrisme, empreinte carbone, etc) puis en définissant localement les mesures à mettre en place et les réévaluant quand nécessaire.

LES ACCORDS DE PAPEETE
Pour la Polynésie, ce sont les accords de Papeete qui préciseront les dispositions pour le fenua. Ils devraient être signés avant la fin de l'année à Paris. Au vu de la situation en France, le Premier ministre ou le président de la République ne prendront pas le risque de s'éloigner de la métropole.

Les principaux éléments de ces accords avaient été présentés par le président de la République en février dernier. Concernant le nucléaire, c'est la sanctuarisation de la Dotation Globale d’Autonomie (DGA) à 90 millions d’euros qui est très attendue.

Du côté culturel, l'Etat apportera son appui à l’inscription du site de Taputapuatea au patrimoine mondial de l’Unesco, à la réalisation du centre culturel de Vaiami et à la mise en place d’un centre culturel à Taputapuatea. Dans le secteur de la communication et du désenclavement numérique : le second câble sous-marin international et le câble intérieur Tuamotu-Marquises figureront dans cette convention cadre de partenariat. Dans le secteur de l’aménagement et du développement urbain, c'est la mise à niveau de l’aéroport de Tahiti Faa’a qui est prévue.

Des discussions sont aussi en cours pour un partenariat autour de la lutte contre le réchauffement climatique.
Le 22 juillet dernier, les représentants à Tarahoi avaient demandé que le plan de convergence économique soit réalisé "en tenant compte des institutions, du régime législatif et de la répartition des compétences propres" de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie et puisse comporter "un volet relatif aux communes".

La Fédération des entreprises d'outre-mer (Fedom), tout en saluant "l'attention particulière" du gouvernement aux outre-mer, s'est déclarée ce mercredi "extrêmement déçue par le contenu du texte proposé" qui "ne répond pas aux attentes des milieux économiques".

Le Conseil Représentatif des Français d'outre-mer (CREFOM) relève des "éléments positifs mais aussi des carences, des incertitudes et des flous qui doivent être impérativement levés".



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George Pau-Langevin a lancé une consultation qui permettra - jusqu'au 9 septembre - à qui le désire des 2,7 millions d'ultra-marins, de définir et avancer des propositions sur l'égalité réelle permettant éventuellement, une fois que la synthèse en sera faite, d'enrichir le texte de loi.

C'est "la première fois que l'ensemble des concitoyens ultramarins seront consultés au même moment, autrement que pour une élection", a insisté le ministère. Elle est accessible sur https://egalite-reelle-outre-mer.fr.
Cette enquête, composée de 11 questions, est destinée à évaluer les attentes et visions personnelles des citoyens au sujet de l’Egalité Réelle Outre-mer.

La référence à Pouvana’a a Oopa

Dans le projet de loi de programmation, l'exposé des motifs rend hommage à certain nombre de personnalités ultramarines. Après Raymond Verges et Aimé Césaire, c'est Pouvana'a a Oopa qui est cité. "C’est aussi pour l’égalité entre tous les Français que s’est battu Pouvana’a a Oopa", peut-on lire.
Cet hommage s'inscrit dans la continuité de la reconnaissance de l'homme politique par l'Etat. En février dernier, François Hollande avait déposé une gerbe sur la tombe de Pouvana'a a Oopa au cimetière de l'Uranie.
En novembre dernier, George Pau-Langevin avait indiqué à Tahiti Infos que " ce que nous pourrions faire (au ministère), ce serait de rappeler aux jeunes qui était Pouvana'a a Oopa et quel était son combat. Je serais tout à fait prête à accueillir une session de formation à ce sujet parce que dans ce genre de dossier, c’est l’opinion qu’il faut d’abord essayer de faire évoluer". Près de neuf mois après, aucun colloque sur Pouvana'a a Oopa n'a encore été inscrit à l'agenda.

Pour rappel, l’homme politique polynésien avait été condamné à 8 ans de prison et 15 ans d’exil, accusé d’avoir voulu provoqué l’incendie de Papeete qui toucha la capitale polynésienne dans la nuit du 10 au 11 octobre 1958, sur fond de révolte et de volonté d’aller vers une indépendance du territoire.

Il a été déchu de son mandat de député en mai 1960. Il est rentré à Tahiti en novembre 1968, après avoir bénéficié de mesures de grâce, avant d'être amnistié un an plus tard et d'être élu sénateur en 1971. Il est décédé en 1977.
En juin 2014, le ministère de la Justice a annoncé le lancement du processus de révision du procès de Pouvana'a a Oopa.

Le président de la République a déposé une gerbe sur la tombe de Pouvana'a a Oopa au cimetière de l'Uranie le 22 février.

Rédigé par Avec AFP et Serge Massau, à Paris le Mercredi 3 Août 2016 à 13:13 | Lu 1747 fois