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Voile – Interview exclusive avec le champion du monde Billy Besson

Nous avons pu rencontrer Billy Besson avec sa coéquipière Bretonne Marie Riou. Il a grandi à Tahiti où il s’est passionné pour la voile avant de devenir champion du monde de Nacra 17. Il prépare désormais les prochains Jeux Olympiques, sa discipline sera y représentée pour la première fois. Il court pour la France mais son cœur est Tahitien. L’occasion justement de parler, avec le sourire, du parcours du combattant du sportif de haut niveau.


Billy Besson (et son frère à gauche) et Marie Riou avec Torea Colas, directeur marketing d'ATN
Billy Besson (et son frère à gauche) et Marie Riou avec Torea Colas, directeur marketing d'ATN
PAPEETE, le 2 novembre. Le champion du monde Billy Besson est apparu tout sourire au siège de la compagnie Air Tahiti Nui, avec son frère et sa coéquipière Marie Riou. Il est né et a grandi à Tahiti. Il a forgé sa passion pour la voile au Yacht Club de Arue pour atteindre finalement le haut niveau mondial.
 
Dans une discipline naissante, le Nacra 17, qui sera présente aux prochains Jeux Olympiques de Rio en 2016, il a obtenu 3 titres de champion du monde, avec sa coéquipière Marie Riou, une Bretonne de talent qu’il a connue dans le milieu de la compétition et avec qui une véritable complicité est née.
 
Lors d’une discussion à bâtons rompus qui a précédé l’interview, en présence de Torea Colas le directeur marketing de la compagnie, Billy a pu faire part de son expérience du haut niveau, de son quotidien d’athlète, de sa passion pour la Polynésie et des Polynésiens, navigateurs dans l’âme.
 
La Polynésie ne possède pas encore de grand bateau de course, la voile c’est pourtant un travail d’équipe, on imagine un capitaine avec son équipage et pas un homme seul sur son embarcation. Le Pacifique immense nous entoure, et la navigation ancestrale est dans les gênes de la Polynésie. Les difficultés pour devenir un sportif de haut niveau ont également été évoquées, le manque de reconnaissance, de statut social.
 
Les athlètes sont là, les évènements sont là mais le 3e partenaire indispensable, le Pays, avec un investissement trop souvent lié aux soubresauts de la politique, empêche le sport polynésien de réellement décoller, au point où certains rêveraient d’un organisme indépendant, privé, qui permettrait aux athlètes d’exister, d’atteindre le haut niveau, d’exprimer le fort potentiel du Polynésien dans le sport, dans l’intérêt de tous.
 

Billy et marie tenteront leur chance aux prochains JO  à Rio en 2016
Billy et marie tenteront leur chance aux prochains JO à Rio en 2016
Billy Besson, au micro de Tahiti Infos :
 
Peux-tu te présenter au public polynésien, pour ceux qui ne te connaitraient pas encore ?
 
« Je m’appelle Billy Besson, je suis né à Tahiti d’une maman tahitienne et d’un papa français. Je suis un pur produit d’Arue, j’ai vécu de 0 à 18 ans là-bas. Comme Obélix, je suis ‘tombé dans la marmite.’ J’ai commencé la voile à 4 ans et au fur et à mesure je suis devenu champion de Polynésie en optimiste, ensuite en catamaran et ainsi de suite. »
 
« C’est allé assez vite, je suis allé en France parce qu’un Français de passage m’a dit ‘ce serait intéressant que tu viennent au pôle France de Bretagne’, c’est comme ça que j’ai atterri en France pour faire du haut niveau. J’ai pu apprendre cet esprit sportif ‘français’ qui est différent de celui qu’on apprend à Tahiti. Ici j’ai appris plus le ‘feeling’, la sensation, en France on apprend plus de façon cartésienne. Du coup j’ai appris les deux méthodes. »
 
Cela t’a permis d’obtenir d’excellents résultats ?
 
« Cela m’a permis d’évoluer dans ma façon d’être en tant que sportif et au fur et à mesure j’ai commencé à faire de bons résultats. Sur le catamaran qui va aux Jeux olympiques, cela fait trois ans qu’on fait champion du monde. Cela s’appelle le Nacra 17, c’est mixte, un homme, une femme, un catamaran, c’est la première fois qu’il y aura un mixte aux prochains JO. »
 
« Cela a été une adaptation de naviguer avec une fille car on avait pas l’habitude mais cela s’est super bien passé avec mon équipière Marie qui est très talentueuse et qui avait été aux JO en 2012 à Londres. »
 
Comment vous êtes vous rencontrés ?
 
« Quand j’étais en optimiste, j’allais faire des compétitions en France. Elle était de Bretagne et faisait aussi de la compétition. On s’est revus comme ça, en évoluant chacun de notre côté, en Afrique du Sud, je venais courir pour Tahiti, elle pour la France, on avait fait champion du monde dans notre catégorie respective et de fil en aiguille, quand le catamaran mixte est arrivé, j’ai tout de suite pensé à elle. »

Billy et Marie en action
Billy et Marie en action
Tu es le parrain d’un projet polynésien ?
 
« C’est très simple, j’appuie toutes les initiatives qui permettent aux jeunes polynésiens de pouvoir évoluer pour appartenir au monde du haut niveau, pour se confronter à des bons. Teva Plichart a eu une super idée, ce tour de France à la voile prévu en 2016, je ne peux pas m’en occuper car je suis vraiment dans mon projet olympique, d’une part pour aller aux Jeux Olympiques et d’autre part pour décrocher une médaille, mais j’appuie totalement son projet. »
 
Partir pour se former ne veut pas dire oublier la Polynésie ?
 
« Bien sûr, c’est de toute façon impossible d’oublier ses origines. On peut demander à n’importe qui à Tahiti, s’il est en France il n’oubliera jamais son île. On se repose justement là dessus pour continuer à se battre. C’est très important. »
 
On peut dire qu’il y a un potentiel dans ce domaine chez le polynésien ?
 
« Tahiti est une île et depuis la nuit des temps les Polynésiens naviguent sur des multicoques. Ce ne sont pas les Européens qui les ont inventés, ce sont bien les Polynésiens. Dans le passé on a eu des champions du monde de hobbie cat 16 ou 14, cela a toujours fait partie de notre patrimoine. C’est pour ça que je suis sûr qu’il y aura toujours un potentiel à venir, car le Tahitien vit avec l’eau depuis des millénaires. »
 
Comment se passe la préparation pour les jeux olympiques ?
 
« Avec Marie on prépare ces jeux, on navigue à peu près 250 à 300 jours à l’année, entre 4 et 5 heures de navigation par jour. Ce n’est pas pesant car on fait ce qu’on aime, on se donne tous les moyens pour y arriver. C’est vrai que parfois c’est au détriment de la famille, des amis. On ne fait pas beaucoup de barbecues mais quand on voit les résultats, on est contents. »
 
La place du sportif dans la société est un sujet qui t’interpelle ?
 
« Le sportif de haut niveau, il est un peu en dehors des critères de la loi, il essaye de vivre de son sport sauf qu’il n’y arrive pas vraiment. Il essaye de fonctionner avec quelques partenaires ou même l’état, le Pays mais pour moi tout ça est trop dans le flou et cela manque d’encadrement. Les choses commencent à évoluer en France mais cela a mis énormément de temps. Le sportif commence à avoir un acquis social, ce qui n’était pas le cas avant. C’est un travail de longue haleine, on n’est pas protégés, on est en quelque sorte ‘en pleine mer’. »
 
Un dernier mot, un remerciement ?
 
« Je suis content d’être là, merci encore à Air Tahiti Nui de nous offrir tout ça et surtout d’offrir à Marie ce premier séjour à Tahiti mérité. »

Rédigé par SB le Mardi 3 Novembre 2015 à 12:02 | Lu 1358 fois