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Variants, vaccins: la course d'obstacles se poursuit à l'approche des 100.000 morts


Paris, France | AFP | mercredi 14/04/2021 - Fortes craintes face au "variant brésilien" du Covid-19, lancement contrarié pour le vaccin de Johnson & Johnson: le gouvernement fait face mercredi à de nouveaux contre-temps pour sa "sortie de crise", mais promet un hommage aux victimes du virus, à l'approche du cap des 100.000 morts.

"Toutes nos forces se sont jetées dans la bataille contre l'épidémie, avec encore une fois, la stratégie de freinage et le développement de la vaccination, mais viendra évidemment ce moment de l'hommage et du deuil pour la nation", a assuré le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal, à l'issue des Conseils de défense et des ministres.

Et si Emmanuel Macron réunit de nouveau une partie du gouvernement jeudi à 18H00 en vue de la réouverture progressive et sous contrôle des terrasses de cafés et restaurants, ainsi que de certains lieux culturels, la situation sanitaire menace l'objectif de la mi-mai qu'il s'était fixé. 

Le chef de l'Etat pourrait d'ailleurs s'adresser aux Français d'ici la fin du mois, selon une source gouvernementale. 

Pour l'heure, "le pic des hospitalisations n'a pas encore été atteint, cela signifie que nous avons encore devant nous des jours très difficiles", a prévenu M. Attal.

Le coronavirus a provoqué 99.508 décès en France, l'un des plus lourds bilans européens, et près de 6.000 malades du Covid-19 étaient en réanimation mardi, un chiffre jamais atteint depuis la mi-avril 2020.  

Dernier vol de Rio

Dans l'urgence, le Premier ministre Jean Castex a annoncé mardi la suspension des vols entre le Brésil et la France jusqu'au 19 avril en raison des inquiétudes autour d'un variant, considéré comme plus dangereux, mais encore très minoritaire en France.

Les deux derniers vols Air France en provenance de Sao Paulo et Rio de Janeiro ont atterri peu avant 07H00 à Roissy.

Selon le ministre de la Santé, Olivier Véran, les contaminations comptaient "80% de variant d'origine britannique" et "un peu moins de 4% des variants brésilien et sud-africain". 

Le gouvernement va présenter lundi de nouvelles restrictions pour les voyageurs des pays où, à l'instar du Brésil, "un variant particulièrement à risque est dominant" et qui sont confrontés à "une explosion ou une dynamique très forte de l'épidémie", selon M. Attal. Avec de possibles "restrictions supplémentaires pour les déplacements" et "des mesures plus contraignantes à l'isolement".

Pour la Guyane et les territoires concernés par des variants, le gouvernement n'exclut pas "des mesures supplémentaires". 

Pour sortir de "la troisième vague", le gouvernement compte plus que jamais sur la campagne de vaccination, qui doit s'accélérer semaine après semaine.

Malgré l'annonce de Johnson & Johnson de retarder le déploiement de son sérum unidose, le porte-parole du gouvernement a assuré que les 200.000 premières doses déjà arrivées en France seront "distribuées et administrées" comme prévu aux plus de 55 ans.

Macron face au mal-être

A propos des doses AstraZeneca, il a répété que les autorités françaises avaient "confiance dans ce vaccin", contrairement au Danemark qui renoncé définitivement au produit.

Dans le même temps, les laboratoires BioNTech et Pfizer vont augmenter de 50 millions de doses les livraisons de leur vaccin à l'UE au 2e trimestre, pour atteindre 250 millions sur la période, a annoncé la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

Jusqu'à présent, une personne majeure sur cinq (21%) a reçu une première dose et un peu plus de 7% deux doses. 

Le gouvernement table sur 20 millions de vaccinés au 15 mai.

Mais le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire, s'est refusé à confirmer ce calendrier, indiquant sur BFMTV que le 15 mai faisait "partie des hypothèses". 

L'impact psychologique de la crise et du confinement sur les enfants et les adolescents a été évoqué mercredi après-midi par Emmanuel Macron au service de pédopsychiatrie du CHU de Reims. 

"Qu'est-ce que vous redoutez le plus ?" a demandé le chef de l'Etat. "Un nouveau confinement", lui a répondu une jeune fille hospitalisée pour dépression. 

Selon les enquêtes menées par Santé publique France, la proportion de Français rapportant des états anxieux ou dépressifs a fortement augmenté depuis le premier confinement et se maintient à un niveau élevé depuis, touchant près d'un tiers (31%) de la population.

100.000 morts: l'équivalent d'une ville comme Nancy

La population d'une ville comme Nancy ou le public d'un grand concert de rock : c'est ce que représente le bilan du Covid-19 en France, avec le passage imminent de la barre des 100.000 morts.

Ce seuil symbolique est sur le point d'être franchi sous l'effet de la 3e vague épidémique. Depuis un mois, le nombre de décès quotidiens dépasse les 250 en moyenne et tourne désormais autour de 300 (calculé sur une semaine "glissante"). Soit le nombre de passagers d'un avion long-courrier gros-porteur type Airbus 350 ou Boeing Dreamliner, selon les configurations.

Cent mille, c'est un peu plus que les 96.540 fans venus acclamer le groupe irlandais U2 en septembre 2010 au Stade de France, l'affluence record pour un concert dans l'écrin des Bleus, qui accueille au maximum 80.000 spectateurs en configuration sport.

Cent mille, c'est presque tous les habitants de Nancy, 42e ville de France (104.000 au dernier recensement) et un peu plus que ceux de Tourcoing (43e, 97.000). Plus que les 76.000 habitants de la Lozère, département le moins peuplé du pays, mais pas autant que ceux de la Creuse (116.000), avant-dernier pour le nombre d'habitants.

Ou encore l'équivalent des populations réunies d'Albert (Somme), Argelès-sur-Mer (Pyrénées-Orientales), Déville-lès-Rouen (Seine-Maritime), Loudéac (Côtes-d'Armor), Mazamet (Tarn), Neuville-en-Ferrain (Nord), Oignies (Pas-de-Calais), Rombas (Moselle), Soyaux (Charente) ou Vidauban (Var), communes qui comptent toutes 10.000 habitants.

Plus tragiquement, c'est le bilan de la guerre qui ensanglanta la Bosnie entre 1992 et 1995.

L'épidémie de Covid a entraîné une hausse de la mortalité française en 2020. Habituellement un peu au dessus de 600.000 décès par an --et tendanciellement en hausse en raison de l'augmentation et du vieillissement de la population--, le chiffre a atteint 667.400 l'an dernier.

Sur les 100.000 morts du Covid, près de 27.000 sont décédées en Ehpad, les établissements qui accueillent des personnes âgées, selon Santé publique France. 

Parmi les 73.000 patients décédés à l'hôpital, moins de 300 avaient moins de 40 ans et moins de 700 avaient entre 40 et 49 ans. 45.700 étaient âgées de 80 ans et plus, pour les seuls morts à l'hôpital.

Rapporté aux autres causes de mortalité, le Covid (sur un peu plus de 13 mois d'épidémie) suit les cancers (157.000 morts en 2018) et les maladies cardiovasculaires (140.000 décès).

La grippe, autre épidémie respiratoire virale, tue habituellement entre 10.000 et 15.000 personnes par an (mais elle n'a presque pas sévi cet hiver).

La canicule de l'été 2003 avait quant à elle causé près de 15.000 morts, dont 80% plus de 75 ans.

Et il y a un peu plus d'un siècle, la "grippe espagnole" (1918-1919) avait entraîné le décès de 400.000 personnes en France, 40 millions à l'échelle mondiale selon les estimations. Tous les groupes d'âge ont été frappés. 

En 1957-1958 et 1968-1970, la France et le monde avaient connu deux autres épisodes de grippes pandémiques, "asiatique" puis "de Hong Kong", mais de moindre importance.

le Mercredi 14 Avril 2021 à 06:35 | Lu 270 fois