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Une petite commune bretonne s'apprête à céder des terres pour se soustraire à la loi Littoral


Une petite commune bretonne s'apprête à céder des terres pour se soustraire à la loi Littoral
PLOUVIEN (France / FINISTERE), 19 jan 2013 (AFP) - Des vaches, des vallons, des chapelles et un clocher: Plouvien est une petite commune rurale de Bretagne comme bien d'autres... si ce n'est qu'elle est soumise à la loi Littoral. Une loi dont les contraintes sont telles, pour une commune sans le moindre embrun ni grain de sable, qu'elle est prête à s'amputer de terres pour s'y soustraire.

"On est à la loi Littoral ce que Lyon est au Crédit Lyonnais ou ce que Nice est à la salade niçoise", s'insurge le maire de la commune finistérienne, Christian Calvez, cravate bleue marine sur chemise rayée.

La petite ville de 3.800 habitants, qui met en avant ses chapelles classées et ses chemins de randonnée serpentant entre de jolis vallons, se trouve à une dizaine de kilomètres des côtes de la Manche.

Mais un décret de 1852 classe l'aber Benoît, sorte de fjord long de huit kilomètres, serpentant au milieu des champs et de paysages boisés, parmi les mers et océans. Son extrémité, là où la marée s'arrête, se situe sur la commune de Plouvien.

"L'ensemble des contraintes qui en découlent pour nous sont sans commune mesure avec les avantages dont on pourrait bénéficier en tant que commune littorale, n'ayant ni plage, ni résidences secondaires", regrette l'édile, sans étiquette, petites lunettes rectangulaires sur le nez.

Le premier magistrat de Plouvien fait référence à un arrêt du Conseil d'Etat rendu mi-novembre et annulant définitivement le permis de construire du parc de huit éoliennes situé sur la commune et dont les pales tournent à plein régime depuis juin 2007.

"Se couper un doigt"

Comme la cour administrative d'appel de Nantes deux ans plus tôt -- saisie à la suite d'un recours d'une association de protection de l'environnement ayant invoqué la loi Littoral --, le Conseil d'Etat rappelle que Plouvien est "une commune riveraine des mers et des océans" et qu'à ce titre toute nouvelle construction ne peut l'être que dans la continuité du bourg.

Or, une loi de juillet 2010 interdit la construction d'éoliennes à moins de 500 mètres d'une habitation. "Avec cet arrêt, plus aucun parc éolien n'est possible dans les communes littorales là où, justement, il y a du vent !" se désole Christian Calvez, maire depuis 1995.

L'homme fait aussi référence à la demande d'annulation de permis de construire en référé déposée auprès du tribunal administratif de Rennes par un riverain de l'usine agroalimentaire de la commune, la Siil (société industrielle laitière du Léon), qui souhaite se doter d'une chaufferie biomasse et d'une tour de séchage. L'opposant a également invoqué la loi Littoral du 3 janvier 1986.

"Ca nous pose un vrai problème, je ne sais pas trop comment on va faire", se désole Gilles Falc'hun, patron de l'entreprise, qui emploie quelque 260 salariés et qui pourrait en créer une cinquantaine de plus en se développant.

Du coup, Christian Calvez est prêt à priver sa commune de 30 hectares, le long de l'aber Benoît, afin de la libérer de sa "frange maritime". "Ca me fait mal au coeur, mais parfois, quand il y a gangrène, il faut se résoudre à couper le doigt".

Le conseil municipal de Plouvien votera le 23 janvier sur une modification de ses limites territoriales au profit de Tréglonou, qui fera de même à la fin du mois "par solidarité" avec sa voisine, selon son maire Guy Taloc.

Il restera au préfet du Finistère, Jean-Jacques Brot, à lancer une enquête et à instituer une commission consultative chargée d'émettre un avis sur le projet, avant un décret du Conseil d'Etat, requis lorsque les limites cantonales sont modifiées.

"C'est une procédure lourde", juge M. Brot, interrogé par l'AFP, se disant cependant "plutôt favorable" à cette démarche "très originale".

Rédigé par Par Sandra FERRER le Samedi 19 Janvier 2013 à 06:41 | Lu 1667 fois