Tahiti Infos

Une bande-dessinée pédagogique traduite en 6 langues polynésiennes


Tahiti, le 14 février 2022 - Une bande-dessinée montrant un ourson, Bilou, confronté à divers dangers, a été traduite en six langues polynésiennes pour servir à la fois à la prévention contre les accidents de la vie quotidienne et à la transmission des langues polynésiennes.
 
Sensibiliser les plus jeunes et leurs parents aux accidents de la vie courante via les langues polynésiennes, c'est l'objectif de Bilou i Porinetia, une bande dessinée mettant en scène les mésaventures d'un nounours casse-cou. Initialement paru en français, l'album est désormais disponible en reo tahiti, èo ènana, èo ènata, reo ma’areva, reko pa’umotu et reo rurutu.
 
Imaginé par Olivier Jamann en "customisant le doudou de sa fille", l'ourson Bilou est devenu le symbole de la sensibilisation aux risques d'accidents domestiques proposée par la Fédération française de prévention des risques domestiques (FFPRD) à destination des enfants. Ces accidents qui ont lieu au sein du foyer ou pendant les loisirs provoquent environ 21 000 morts par an et sont les premières causes de décès infantiles en France et dans les outre-mer.
 
C'est en Polynésie française, après une première campagne de formation et de sensibilisation, que la FFPRD, associé à la DGEE, a publié en 2019 son premier album à vocation pédagogique qui met en scène la mascotte Bilou confrontée à trois dangers : l'exposition au soleil, la baignade et la pollution marine. Cette bande-dessinée, accompagnée de vidéos, complète une "mallette pédagogique" de sensibilisation qui a été distribuée à l'ensemble des écoles primaire et des CJA de Polynésie française.
 
Cependant, le projet a pris une ampleur plus importante encore en étant traduit en six langues polynésiennes, grâce au concours du Fare Vana'a et d'enseignants de langues et cultures polynésiennes. La présentation officielle de l'album s'est tenue à la Mairie de Punaauia ce lundi 14 février en présence notamment de la ministre de l'Education, Christelle Lehartel, de l'académicienne Flora Devatine par visio-conférence et d'une chorale d'élève des écoles de Punaauia.

Une BD, deux objectifs

L'objectif de ces traductions est clairement double : tout d'abord, il s'agit d'assurer une implication plus grande des parents dans la sensibilisation aux risques domestiques et les impliquer dans la prévention auprès de leurs enfants au moyen d'un outil ludique et accessible dans leur langue maternelle. Mais, pour la DGEE et l'inspecteur Ernest Marchal, en charge de la promotion du plurilinguisme dans les écoles primaires, ces bandes-dessinées sont autant de supports pédagogiques précieux pour la transmission des langues polynésiennes que ce soit à l'école ou dans les foyers. En effet, pour chacune des langues de traduction, il existe au moins une école bilingue. De plus, ces albums peuvent être utilisés à la maison où les échanges parents-enfants en langue polynésienne sont parfois en perte de vitesse.
 
Les aventures de Bilou ne sont pas forcément terminées pour autant ; il est envisagé d'étendre la traduction aux langues de Polynésie qui ne sont pas encore représentées, et, un peu plus loin, aux langues mélanésiennes et polynésiennes de Nouvelle-Calédonie. On pourrait aussi souhaiter l'enrichissement de la sensibilisation à des situations de la vie quotidienne dangereuse plus spécifique à la Polynésie telles les meutes de chiens errants, les dangers de la pêche ou de la route…
 

À télécharger gratuitement

Les aventures de Bilou, l'ourson casse-cou, en langues polynésiennes (et en français) sont disponibles et mises à disposition de tous gratuitement via la bibliothèque numérique de l’éducation https://www.ebooks.education.pf/
 

Ernest Marchal, inspecteur de l'Éducation nationale : "Faire d'une pierre, plusieurs coups"

Pourquoi vous semble-t-il si important de traduire ces bandes-dessinées en six langues polynésiennes ?
 
"Il s’agit pour nous, avant tout, de mener des actions de prévention telles que déclinées de la fédération française de prévention des risques domestiques. On peut toucher ainsi les enfants et les familles en langues polynésiennes par le biais d’un outil ludique, qui plaît aux enfants et qui reste accessible aux parents également. Au-delà de cela je suis personnellement en charge du développement d’un enseignement des langues et cultures polynésiennes. En fait, il s’agit de faire d’une pierre plusieurs coups, d'en faire un outil d’enseignement des langues de la culture polynésienne. C’est vraiment un support de choix, nous en avons profité pour le traduire dans les différentes langues polynésiennes."
 
Est-ce qu’une extension de cette bande dessinée est-elle envisagée, prévue ? Sur le premier rapport, en 2019, il était aussi question de parler des risques comme les morsures de chien, de la pêche…
 
"C’est une décision qui appartient à la fédération française et, moi, je pense que c’est une bonne idée. En tous les cas, nous concernant, nous, la partie langue polynésienne, nous serons également présents pour ce rendez-vous."
 
Est-ce qu’une extension à d’autres langues polynésiennes est envisagée, comme le raivavae ?
 
"Nous l’avons fait puisque nous venons d’ouvrir des écoles bilingues là-aussi, en Raivavae, sur Hao, […] donc ça reste tout à fait possible. Pour le moment, c’est en paumotu et sur Hao et Amanu, il s’agit du tapuhoe comme dialecte précis."


Olivier Jamann, créateur de Bilou et formateur de la FFDRP : "On est sur un vrai travail collaboratif"

Pourquoi avoir développé cette idée d’abord ici, en Polynésie, plutôt ?

"Tout simplement parce que la Polynésie a accueilli le projet à bras ouvert et on a vu le besoin, la nécessité, le potentiel de le traduire. C’est donc pour ça qu’on a mis principalement nos forces sur la Polynésie, parce qu’on est sur un vrai travail collaboratif. On a apporté une idée de projet et ensuite la Polynésie se l’est appropriée. On a juste été les facilitateurs pour que ce projet soit adapté à la Polynésie. Alors, c’est aussi beaucoup de bonne volonté des personnes, mais également un concours de circonstance. C’est Teheiura, notamment, qu’on a rencontré en métropole, qui s’est dit que ce projet pourrait intéresser la Polynésie et, au fur et à mesure des discussions et des rencontres, on en est arrivé là, à ce projet qui était contextualisé et traduit en polynésien."
 
Et, concernant les risques d'accidents du quotidien, est-ce qu’il y a des choses qui sont spécifiques, ici, en Polynésie ?
 
"Oui, quasiment tout et notamment une petite anecdote : nous, on est arrivé avec une maison très métropolitaine lors de la première intervention et les enfants nous ont posé deux questions : 'Pourquoi vous avez un chauffage et une cheminée' et, deuxième question, 'pourquoi est-ce que vous mettez des cactus dans votre salon, ça pique ?' Et c’est là qu’on s’est dit, bon, l’outil est bien, ça permet d’apporter une réflexion, d’apporter une philosophie d’action, mais si on veut vraiment que ça parle aux enfants directement, il faut qu’ils nous aident à créer quelque chose par rapport à eux, leur quotidien. Et, au fur et à mesure des rencontres, on a noté toutes les idées, tous les dangers, les sources, la musique, la pêche, voilà, la morsure de chien, la cuisson du 'uru avec le feu etc. On a juste mis en image les retours des enfants, des acteurs sociaux et des enseignants."
 
Qu’est-ce qui vous inspiré pour créer cet ourson un peu maladroit à qui il arrive plein de choses ?
 
"C’est, très simplement, le doudou de ma fille. J’avais besoin d’une peluche pour aller en intervention ; j’ai récupéré une peluche, on a pu la customiser nous-même, avec un petit pansement etc. Et puis, l’univers s’est créé. Puis un artiste a fait les dessins, avec un univers d’artiste. Voilà, on en est là."
 

Rédigé par Antoine Launey le Lundi 14 Février 2022 à 22:34 | Lu 897 fois