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Un nouveau cap pour l’équité fiscale


Tahiti, le 15 septembre 2025 - Jeudi, l’assemblée de la Polynésie française, après une semaine marathon lors de la récente séance extraordinaire, retrouve son rythme normal avec l’ouverture solennelle de la session budgétaire qui conduira le Pays vers son budget 2026.
 
 
Jeudi, le président de la Polynésie française, Moetai Brotherson, dressera les premières lignes de la politique budgétaire du Pays pour 2026. Une session budgétaire qui marque aussi une étape à mi-parcours du mandat pour le président du Pays et qui, on l’espère, sera aussi bien l’occasion de dresser un bilan qu’un cap pour l’année à venir.
 
Après avoir vu le “bien mieux” début 2024, puis le “pas si mal” en fin 2024, Moetai Brotherson arrivera jeudi à la tribune avec une confiance frappée par plusieurs nouveaux faits. Oubliés les projets pharaoniques du gouvernement précédent (lycée de Moorea, Village tahitien), place aux projets colossaux du gouvernement actuel à 164 milliards de francs, reposant sur l'entretien et la réhabilitation des structures existantes, la décentralisation de l'administration, la redynamisation du centre-ville de Papeete, et le développement du Port autonome.
 
Des annonces accompagnées par une embellie sur le front de l’emploi avec des chiffres qui ne cessent de grimper et qui amortissent pour l’instant la hausse du coût de la vie – contre laquelle le gouvernement peine à agir – et les premiers textes concernant les modifications de la Protection sociale généralisée.
 
Moetai Brotherson pourra aussi prendre la parole avec la stature de celui qui est intervenu à la Conférence des nations unies sur l’océan (Unoc) en début d’année avec des prises d’actes et de décisions importantes sur l’environnement.

Les annonces et les faits

De nombreux dossiers ont été évoqués cette année pour une continuité de la réforme de l’action fiscale du Pays. Aussi, le gouvernement sera attendu sur nombre de ceux déjà évoqués comme la TVA à 1 %, qu’il reste à sécuriser juridiquement, afin de faire bénéficier de cette mesure les Tuamotu, les Gambier et les Australes.
 
Toujours au rayon fiscal, la réforme de la fiscalité hôtelière sera aussi à l’ordre du jour. Une réforme déjà évoquée en 2024 pour le projet de budget 2025 mais qui a finalement été reportée pour ne pas contraindre des communes qui dépendent largement de l’hôtellerie comme Bora Bora.
 
Enfin, la réforme de la Taxe de développement local (TDL) et celle des Produits de première nécessité (PPN) pourrait directement impacter les prix en magasin, pour peu que ces derniers n’en profitent pas pour doper leurs marges. Concernant la TDL, Moetai Brotherson annonçait les premières mesures dans ses observations du rapport de la Chambre territoriale des comptes sur le sujet en précisant que “le projet de loi du Pays proposera une réduction du nombre et du niveau des taux applicables avec suppression des taux de 9 % et application des taux de 20, 35, 50 et 65 % en lieu et place des taux actuels”. Récemment, enfin, le ministre de l’Économie, Warren Dexter, s’était aussi prononcé pour l’exclusion des produits alcoolisés de la liste des produits protégés par la TDL. Un taux de 80 % spécifiquement dédié aux filières particulières telles que l'artisanat local pourrait également être proposé.
 
Enfin, sur les PPN, le gouvernement travaille depuis plus d’un an aussi à la modification de la liste de ces produits. Une suite logique donnée au rapport de l’Autorité de la concurrence qui date déjà de cinq ans et qui préconisait l’arrêt des PPN ou une “profonde réforme” pour arrêter un système qui génère “des effets inflationnistes, lorsqu'il ne conduit pas à une dégradation de la qualité des produits”. Cette réforme est toujours attendue.

Projets passés et à venir

L’année passée, Moetai Brotherson avait martelé à la tribune, d’abord en reo tahiti : “Nous ne pouvons pas regarder différemment les hommes et les femmes de ce pays en fonction de leur couleur de peau, ou de leur nom de famille. Nous sommes un seul peuple, et nous servons celui-ci.” Des propos prolongés en français. “Si le statut vient opérer une division des compétences entre l’État, le Pays et les communes, il est impossible de découper en tranche nos concitoyens. […] Le bon sens n’a pas de couleur.”
 
Des mots qui se confrontent désormais aux velléités des Marquises et des Raromatai de devenir des collectivités territoriales à part entière, et celles des tāvana de prendre plus de compétence, traduites dans un texte étudié prochainement à l’Assemblée nationale pour modifier l’article 43.2 du statut.
 
Dans cette nouvelle session budgétaire, Moetai Brotherson devra aussi lancer les bases de ce qui pourrait rassurer le pays sur de nombreux points. Prix du caddy, avancée des chantiers pour les Jeux du Pacifique, pérennisation d’un système de santé chancelant et marqué par les fermetures récurrentes de dispensaires, l’absence de médecins dans les hôpitaux périphériques et la fragilité du CHPF où seule la situation financière a été assainie alors que la précarité de la situation humaine à récemment conduit l’hôpital au bord d’un déclenchement du plan blanc.
 
Dès 2023, Moetai Brotherson promettait aussi cette révision de la fiscalité afin qu’elle soit “plus juste et plus équitable” tout en “baissant la pression fiscale”. Deux ans après, la population attend ces nouveaux actes après la modification du régime d’affiliation au RNS et la fin de la primauté des régimes ou encore l’instauration du prêt à taux zéro, et surtout, elle attend les effets tangibles de tout cela.
 
Un indicateur devrait alerter le président par ailleurs. Selon le dernier rapport de l’Institut de la statistique, si le BTP embauche, les architectes débauchent, preuve qu’une branche travaille encore sur les projets passés quand l’autre souffre du manque de projets à venir.

Rédigé par Bertrand PREVOST le Lundi 15 Septembre 2025 à 17:03 | Lu 3006 fois