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Taxer le CO2: pourquoi, comment?


Taxer le CO2: pourquoi, comment?
PARIS, 23 août 2013 (AFP) - Qu'est-ce qu'une contribution climat énergie, souvent présentée sous le terme de "taxe carbone"? Qui va payer? Quelle différence avec le dispositif censuré en 2009? L'annonce encore peu détaillée d'une taxation du CO2 jeudi par le ministre de l'Ecologie, soulève de nombreuses questions.

- Qu'est-ce qu'une contribution climat-énergie?

L'annonce surprise par le ministre de l'Ecologie Philippe Martin de l'instauration d'une contribution climat énergie est vue par certains comme le retour de la "taxe carbone" plus de trois ans après la tentative avortée du gouvernement Fillon. Ses modalités, pour le moment non détaillées, seront présentées en septembre avec l'ensemble du projet de loi de finances, a annoncé le grouvernement.

Une contribution climat énergie est une taxe ajoutée au prix de vente des produits et services en fonction de la quantité de gaz à effet de serre, notamment de CO2, émis lors de leur utilisation.

Son montant est fixé sur la base d'un prix à la tonne de CO2 émise.

L'objectif premier est donc d'inciter financièrement les entreprise et les particuliers à "verdir" leurs comportements en s'orientant vers des énergies moins néfastes pour le climat. Ce "signal prix" vise notamment les automobilistes et les foyers se chauffant au gaz et au fioul.

- Pourquoi la taxe carbone a-t-elle été censurée en 2009?

Deux ans après le Grenelle de l'environnement, le gouvernement Fillon avait relancé le projet d'une taxe carbone en 2009. Après débats, elle avait été fixée à 17 euros la tonne et prévoyait des compensations pour les ménages (crédit d'impôt) et certains secteurs (transports maritimes, fluviaux, routiers et agriculteurs).

Cependant, deux jours seulement avant son entrée en vigueur prévue le 1er janvier 2010, le Conseil constitutionnel avait censuré le dispositif en estimant que la loi créait trop d'exemptions: "moins de la moitié des émissions de gaz à effet de serre aurait été soumise à la contribution carbone", avait souligné le Conseil en mentionnant notamment les exonérations des centrales thermiques produisant de l'électricité. Le PS, à l'origine de cette censure, avait alors salué cette annulation, jugeant inégalitaire le dispositif proposé. La taxe carbone avait finalement été reportée sine die en mars 2010.

- A quoi pourrait ressembler cette nouvelle mouture?

Elle devrait s'inspirer de la proposition faite par le président du comité pour la fiscalité écologique, Christian de Perthuis. L'économiste du climat a proposé en juin l'introduction d'une "assiette carbone" dans la fiscalité de l'énergie, qui consisterait à lier désormais une partie des taxes pesant sur les carburants, le fioul ou encore le gaz à leur "contenu" en CO2. Cette proposition n'a pas formellement été adoptée au sein du comité où siègent élus, associations, entreprises et syndicats, mais elle a été soumise au gouvernement.

La méthode proposée est utilisée dans certains pays (Suède, Irlande, Danemark) et est "la plus robuste juridiquement", selon M. de Perthuis.

L'économiste propose une contribution minimale de 7 euros la tonne de CO2 en 2014, en ligne avec les cours observés sur le marché européen du carbone en 2012, pour atteindre 20 euros en 2020. Il envisage en parallèle, pour 2014, une baisse des autres taxes de l'énergie pour permettre une première année indolore.

"Il ne s'agira pas d'une taxe nouvelle, supplémentaire", a promis vendredi le ministre de l'Ecologie face aux inquiétudes de ses collègues socialistes. "Ce n'est pas une fiscalité additionnelle mais une fiscalité de substitution", a-t-il ajouté, précisant être "en train de travailler un dispositif qui n'aura aucune incidence en termes de pression fiscale sur les Français en 2014".

- A quoi serviront les nouvelles recettes?

Une grande partie des recettes issues d'une telle taxe pourrait servir, comme le souhaite le gouvernement, à financer le crédit d'impôt compétitivité emploi (CICE) en faveur des entreprises. Christian de Perthuis préconise aussi des compensations pour les particuliers sous forme d'un crédit d'impôt en fonction des revenus et d'incitations au retrait des véhicules les plus anciens. Certaines professions vulnérables, comme les agriculteurs, les transporteurs routiers ou les taxis, pourraient aussi être aidées.

alu/pjl/DS

Rédigé par Par Anthony LUCAS le Samedi 24 Août 2013 à 06:13 | Lu 483 fois