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Sports de Glisse - Interview avec Teiva Joyeux, un ‘Pro Rider’ tahitien en Norvège

Le nom de Teiva Joyeux est intimement lié à celui du spot de Teahupo’o. Il y fut un des précurseurs du ‘tube riding’ avec son jeune frère Malik disparu tragiquement en 2005 lors d’un accident de surf à Pipeline, à Hawaii. Teiva fut également un des premiers à devenir ‘rider’ professionnel dès les années 90. Il a ‘pris le large’ et vit en Norvège depuis 2012.


Teiva Joyeux, un athlète touche à tout
Teiva Joyeux, un athlète touche à tout
Le 18 décembre 2014. Il y a des interviews qui font voyager, celle avec Teiva Joyeux en a été une. Depuis quelques années, il vit en Norvège avec Nina et leur fille. Comme son frère l’était à sa manière, Teiva est quelqu’un de vrai, de rare. Teiva est un précurseur, un amateur de la nature. Il est parti pour écrire un chapitre de sa vie mais son cœur reste tahitien. Il a la volonté de faire avancer le pays qui l’a vu grandir.
 
Agé de 38 ans, il est tout récemment devenu ambassadeur Air Tahiti Nui, il œuvre également pour créer sa marque ‘Brothers Tahiti’ imaginée avec Malik. Son lien avec la Polynésie est plus fort que jamais. La Norvège est peut-être une étape nécessaire et sa vie là-bas, pleine de projets, tourne autour de la Polynésie qu’il n’a quelque part jamais quittée. 

Teiva a été un des premiers windsurfeurs pro
Teiva a été un des premiers windsurfeurs pro
Quel est ton parcours ?
 
« J’ai fait mes études au collège de Pao pao à Moorea puis au lycée Gauguin. A 16 ans, je suis parti à Hawaii pour devenir windsurfeur professionnel. J’ai trouvé des sponsors et je suis devenu pro de 1994 à 2000. ‘Naish’ mon sponsor fabriquait alors du matos de kite, donc j’ai dérivé vers le kite. Après j’ai connu Nina qui était aussi à fond dans le wind’ puis le kite. Elle faisait ses études à Hawaii, elle voulait continuer sur Oahu, à Honolulu. J’ai donc bifurqué à nouveau vers le surf. On habitait sur le North Shore et puis j’avais toujours surfé. L’industrie du windsurf et du kite commençait à ‘plonger’. On y est resté jusqu’en 2005. Juste après l’accident de Malik, on est rentrés à Tahiti pour s’installer à Teahupo’o. J’ai fait pas mal de jobs avec Raimana (ndlr Van Bastolaer) en jet ski, j’ai été aussi ‘water patrol’ pendant la Billabong Pro. On a ensuite déménagé en 2012 vers la Norvège. »

Teiva et son frère Malik ont grandi à Moorea
Teiva et son frère Malik ont grandi à Moorea
Qu’est ce qui t’a poussé à partir ?
 
« J’avais de moins en moins de sponsors, je ne savais plus trop quoi faire sur Tahiti, Nina ne voulait pas trop rentrer. Je voulais venir en Europe pour être plus proche des connections que j’avais eu en tant qu’athlète sponsorisé par Quiksilver avec qui j’avais été sous contrat  pendant 18 ans. J’ai voulu leur proposer une collaboration pour promouvoir certaines marques de Norvège, mais en business ce n’est jamais facile, donc j’ai cherché à bosser avec une marque de stand up puis j’ai voulu créer ma propre marque de vêtements, ‘Brothers Tahiti’ : C’est un rêve que l’on avait depuis longtemps avec Malik. »
 
L’accident de Malik t’a également poussé à changer d’air ?
 
« Je pense aussi quelque part. Juste avant l’accident, on avait discuté pendant deux semaines, il en avait un peu marre du ‘surf system’, cela commençait à changer, de plus en plus de monde à Teahupo’o...Il s’éclatait, il aimait ce qu’il faisait mais en même temps il avait horreur de dealer avec les sponsors ou de commencer à se battre pour préserver le spot, à s’imposer pour montrer aux autres qu’il gagnait sa vie comme ça... Alors que j’habitais Teahupo’o, je repensais à ce qu’il me disait et je crois que j’en ai eu un peu marre aussi. Pourquoi rester là et faire du ‘buisness’ avec l’un, puis avec l’autre, pour voir des tensions se créer. J’avais l’impression qu’il fallait que je me déconnecte pour me refaire, pour repartir sur de nouvelles bases et retrouver mon ‘punch’. Je me sens plus utile à l’extérieur, plus productif. »

Teiva pratique le va'a en Norvège !
Teiva pratique le va'a en Norvège !
Tu as une philosophie très proche de la nature ?
 
« Quand tu as grandi près de la nature et que tu es à fond dans le sport, tu as deux solutions, soit tu essaies d’être sain pour réussir, soit tu essayes de réussir en t’en fichant . Alors tu te mets des bâtons dans les roues. On a aussi une certaine responsabilité qui nous pousse à nous questionner. Maintenant tout va tellement vite, souvent cela fait peur. Il y a certains athlètes comme Terje Haakonsen, Laird Hamilton ou Kelly Slater qui véhiculent un certain état d’esprit. Dans le milieu du surf en général certains font du jiu jitsu, essayent de bien manger... Comme à Hawaii contre Monsanto, des valeurs reviennent pour tenter de contrer le système de consommation. Après, on utilise tout, un ordinateur et tout ça, mais on essaie malgré tout de faire quelque chose de positif ou de passer des messages. »
 
Tu fais même du va’a en Norvège ?
 
« C’est parfois moins ‘fun’ que Tahiti mais tu peux quand même faire du surf, du kite, de l’escalade, du mountain bike … et même de la pirogue. Avec un copain qui importe ‘Starboards’ on s’est dit que cela aurait été pas mal de faire connaître le va’a aux Norvégiens, une semaine après la pirogue était commandée et début septembre on l’a reçue. Il y beaucoup de gens qui sont intéressés car il y a énormément de kayakistes en Norvège, en rivière, en haute mer ou dans les fjords. Même à l’étranger on peut faire des choses et mettre en valeur Tahiti. Par exemple en envoyant des gens en surf trip, des marques faire des ‘shootings’ photos. Je suis là aussi pour que ‘Brothers Tahiti’ soit une marque d’abord internationale car il est plus difficile de créer une marque locale puis de l’exporter que le contraire. Et puis ici il y a des similitudes avec Tahiti, il n’y a pas beaucoup de monde et beaucoup de nature, beaucoup de sports à pratiquer. Dans la vie tu dois passer par des chapitres. » SB

Sports de Glisse - Interview avec Teiva Joyeux, un ‘Pro Rider’ tahitien en Norvège

Rédigé par SB le Jeudi 18 Décembre 2014 à 12:34 | Lu 2282 fois