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"Sécurité globale": la majorité recule et va réécrire l'article controversé


Paris, France | AFP | lundi 30/11/2020 - Soucieuse d'éteindre l'incendie, la majorité a décidé lundi une "réécriture totale" de l'article 24 de la proposition de loi sur la "sécurité globale" afin de "lever les doutes" qui n'ont cessé de s'intensifier ces derniers jours jusqu'à provoquer une crise politique majeure.

Dans la soirée, le  ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, entendu pendant plus de deux heures par la commission des Lois de l'Assemblée nationale, a lui reconnu qu'il existait "peut-être" des "problèmes structurels" au sein de la police et a listé les "sept péchés capitaux" de l'institution. Parmi ces péchés, la question du matériel, de l'encadrement, ou de l'IGPN "la police des polices".

Le ministre a ensuite participé à une réunion autour de Jean Castex à Matignon pour esquisser une méthode et un calendrier de travail qui donnera lieu, selon l'entourage du Premier ministre, "à toutes les concertations nécessaires, conduites sous l'égide de la commission des lois, en vue de finaliser une proposition remise avant les vacances de fin d'année".

Tout s'est dénoué à la mi-journée lors d'une réunion organisée à l'Elysée autour d'Emmanuel Macron. De source gouvernementale, le chef de l'Etat s'est exprimé avec "une grande clarté et fermeté" pour acter l'"incompréhension" autour d'un texte qui, en pleine crise sanitaire et économique, a plongé la majorité dans la tourmente.

Quelques heures plus tard, les présidents des groupes parlementaires LREM, MoDem et Agir ont annoncé, lors d'une conférence de presse à l'Assemblée nationale, "la nouvelle écriture complète" de l'article 24, qui prévoit de pénaliser la diffusion malveillante de l'image des forces de l'ordre, et qui cristallise les tensions.

"Nous savons que des doutes persistent encore" et "nous devons éteindre ces doutes", a expliqué Christophe Castaner, le patron des députés LREM, qui est resté très évasif sur la manière dont la majorité compte modifier la mesure controversée.

Olivier Becht, chef des députés Agir, a évoqué la possibilité de recycler l'article 24, déjà voté en première lecture par l'Assemblée nationale, dans le futur projet de loi contre les "séparatismes", dont l'article 25 reprend l'esprit de la mesure, selon des responsables de la majorité.

En attendant, la gauche, LFI et PCF en tête, continue à réclamer la suppression pure et simple de la loi Sécurité globale. Et à droite, le patron ses sénateurs LR Bruno Retailleau a estimé que "l'exécutif et sa majorité vont d'erreur en erreur", ajoutant que la réécriture de l'article "dépend désormais du Sénat" où le texte doit en principe être examiné en janvier.

"Réécrire un article déjà voté, c'est original comme méthode... nous sommes gouvernés par une bande de pieds nickelés", a ironisé le porte-parole du RN Sébastien Chenu.

La pression politique n'a cessé de monter après un week-end de manifestations fournies contre un texte conspué par la gauche, les journalistes et les défenseurs des libertés publiques.

Les tensions engendrées par la proposition de loi avaient auparavant explosé jeudi après la diffusion des images du passage à tabac du producteur Michel Zecler.

Face à ce trouble, certains députés de la majorité réclamaient la suppression pure et simple de l'article 24.

"Enorme conviction"

Pour tenter de sortir au plus vite de cette crise, Emmanuel Macron a réuni lundi en fin de matinée le Premier ministre Jean Castex, le ministre de l'Intérieur, celui de la Justice, Eric Dupond-Moretti, et les présidents des groupes.

Resté en retrait pendant l'examen à l'Assemblée nationale du texte "Sécurité globale" à l'article 24, M. Macron avait fustigé vendredi le tabassage à Paris d'un producteur noir par des policiers. "Des images qui nous font honte", avait-il dit.

Devant la Commission des Lois de l'Assemblée, Gérald Darmanin a lui expliqué son attachement à certains aspects de l'article visé.

"Je souhaite que nous gardions et je le souhaite intensément, profondément, avec une énorme conviction, la protection comprise dans l'article 24 pour les policiers", a-t-il dit.

Le ministre, qui a réitéré sa "confiance" a préfet de police de Paris Didier Lallement, a également estimé qu'il n'y avait "pas de divorce entre la police et sa population" et listé les problèmes qui pèsent sur la police, parmi lesquels la formation, l'encadrement, l'équipement ou la prise d'images via les caméras piéton.

Cette audition est intervenue alors que quatre policiers ont été mis en examen dans l'affaire Michel Zecler, dont trois pour "violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique (PDAP)", avec des circonstances aggravantes dont "des propos à caractère raciste". Deux ont été écroués et deux placés sous contrôle judiciaire.

Ils ont aussi été mis en examen pour "faux en écriture publique par personne dépositaire de l'autorité publique", un crime passible des assises.

Alors que certains à gauche, dont le leader de LFI Jean-Luc Mélenchon, ont réclamé la démission de M. Darmanin, la majorité lui a réitéré son soutien.

le Lundi 30 Novembre 2020 à 13:16 | Lu 141 fois