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Rurutu, “bon élève” de la transition énergétique


RURUTU, le 20 juillet 2025- Dans le cadre de sa visite ministérielle en Polynésie, le ministre de l’Outre-mer Manuel Valls a fait escale à Rurutu ce dimanche. Première venue d’un ministre d’État depuis plusieurs années, cette étape a été l’occasion pour la commune de se positionner en “bon élève” de la transition énergétique. Le maire Frédéric Riveta a mis en avant plusieurs projets phares, entre photovoltaïque, traitement des déchets verts et assainissement. Objectif : montrer que même les îles les plus éloignées peuvent être à l’avant-garde de l’écologie.
 
La journée a été rythmée par deux séquences phares. D’abord, la visite de la salle omnisports de Auti, support d’une installation photovoltaïque en toiture, portée par la société publique locale (SPL) Te Uira Api no te Mau Motu. Antony Morin, directeur des exploitations de la SPL, a présenté le calendrier du projet. “Les panneaux ont été posés il y a une semaine. La batterie sera installée d’ici septembre et nous prévoyons une mise en service complète entre octobre et novembre”, précise-t-il. Ce dispositif permettra une réduction significative de la consommation de gasoil, grâce à l’arrêt de l’un des deux groupes électrogènes, alimentés au diesel, qui fonctionnent aujourd’hui en continu. “Avec l’apport du solaire et le stockage, nous pourrons enfin faire des économies de carburant, réduire la maintenance et soulager la centrale.” D’ici quelques années, la commune prévoit d’atteindre un taux de pénétration des énergies renouvelables de 52% dans son réseau électrique, grâce à un vaste plan d’hybridation de la centrale thermique de l’île et aux projets tiers. 


Un projet d’assainissement inédit 
 
Lors de la présentation de l’unité de traitement des déchets verts, en voie d’achèvement, dont la livraison est prévue en septembre, le ministre a pris connaissance d’un autre dossier majeur pour la commune : celui de l’assainissement non collectif, cofinancé à 50% par l’Office français de la biodiversité (soit 94 millions de francs). Ce projet vise à pallier les défauts de conformité des fosses septiques, aujourd’hui très répandues en Polynésie, et qui présentent un risque de pollution du milieu naturel. Le futur dispositif prévoit la mise en place d’un service public de collecte, suivi d’un traitement par lits de séchage plantés de roseaux (Phragmites australis), une espèce locale connue pour son pouvoir phytoépurateur. 
 
Les eaux usées traverseront plusieurs substrats naturels avant d’être reversées dans l’environnement sans danger. Selon les estimations, environ 15 tonnes de boues seront générées chaque année par le processus, lesquelles seront valorisées sur la future plateforme de compostage. Cette solution, fondée sur la nature, déjà utilisée dans certains hôtels est encore inédite à l’échelle communale en Polynésie. Le projet est inscrit au Contrat de développement et de transformation (CDT), en attente d’arbitrages prévus pour fin août. Les travaux devraient durer six mois, pour une livraison de l’ensemble de l’opération d’ici février 2027.


Ces actions viennent renforcer l’image de Rurutu comme commune pionnière en matière de transition écologique. Dans son discours, le maire Riveta a également rappelé que 300 lampadaires LED ont été installés sur l’île grâce au Fonds vert (21 millions de francs). 
 
À Rurutu, la “transition énergétique” est une réalité qui se construit, projet après projet, en dépit de l’éloignement et des contraintes budgétaires. Un message que la commune aura su faire passer avec clarté au ministre de l’Outre-mer.

Les doléances de Rurutu : “Je demande l'équité des traitements”
 
À l’occasion de la visite du ministre de l’Outre-mer à Rurutu, le maire Frédéric Riveta a plaidé avec fermeté pour un accompagnement renforcé de l’État et du Pays envers les petites communes éloignées comme la sienne, “souvent perçues comme les parents pauvres de la République”.
 
Parmi les demandes formulées :
 
  • L'amélioration de la connectivité, avec notamment un appel à l’ouverture de lignes aériennes vers les îles Cook pour favoriser les échanges culturels. “D'ailleurs l'île de Rimatara est en phase de jumelage avec Atiu”, a-t-il rappelé ; 
  • L’extension des aides au transport aérien des habitants, afin d’en réduire le coût très élevé ;
  • Un label pour l’artisanat local, permettant de préserver l’authenticité des savoir-faire et de lutter contre les contrefaçons asiatiques ;
  • L’accompagnement du projet de réserve de biosphère Unesco, dans une optique de développement touristique durable ;
  • La révision de la législation sur les zones de pêche dans le cadre des AMP (Aires marines protégées), avec une demande d’équilibre entre préservation des ressources et développement économique. “Je ne suis pas contre une AMP. Je demande un débat sur ce sujet. Nous avons besoin de donner du travail à nos jeunes. La mer au large de nos côtes va leur permettre de travailler sur les palangriers”, a-t-il insisté. 
 
Enfin, Frédéric Rivet a également appelé à davantage d’équité dans l’accès aux subventions et dispositifs, souvent inadaptés aux réalités locales. Pour lui, “ces investissements ne sont pas des dépenses à fonds perdus, mais un pari sur l’avenir et une richesse pour les générations futures”. 

Rédigé par Darianna Myszka le Dimanche 20 Juillet 2025 à 20:56 | Lu 1880 fois