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"Que le souffle perdure à jamais", 
grâce à O Tahiti E


PAPEETE, le 13 juillet 2019 - Le président de l’association O Tahiti E, Teva Jamet, nous résume le thème de son spectacle 
par ces mots : "Que le souffle perdure à jamais." Te Aho Nūnui relate demain soir l’histoire de trois générations.

>> Lire :  Le passage de O Tahiti E reporté à lundi 15

La première est représentée par Moeho, celle "qui fait le souffle", une dame âgée et souffrante qui s’apprête à partir. La seconde est représentée par Terita, celle à qui est "transmis le souffle", une jeune fille du même village que Moeho. La troisième est représentée par le nouveau-né de Terita, celui par qui le souffle "perdure". Le souffle est ici la représentation du "savoir", du "savoir-faire", des "coutumes", des "valeurs" ou encore du reo (la langue).

Dans son spectacle, le groupe retrace les pas de ce souffle. En effet, la représentation s’ouvre sur Moheo. Celle-ci a connu Tahiti d’antan, l’époque avant les missionnaires, avant qu’il n’y ait les pāni (casserole, marmite), avant qu’on ne parle le français. Elle choisit une héritière à qui transmettre ce souffle, Terita. Cette jeune fille connaît un Tahiti changé, après les missionnaires, avec ces nouvelles règles, ces tenues couvertes et le besoin de se cacher pour danser.
La troupe a préparé quatre tableaux. "Le premier tableau parle de la transmission par Moeho à Terita. Dans le deuxième tableau, il y a la quête de soi. Dans le troisième, nous aborderons le retour de Terita dans son village et, enfin, dans le dernier tableau, on traitera la naissance d’un enfant, celui qui recevra, à son tour, le don de Terita", explique Teva Jamet, président de l’association O Tahiti E.

Pour son grand costume, O Tahiti E a misé sur un more rouge, couleur fétiche du groupe et symbole de la transmission, par le sang et par notre héritage ancestral. Cette année, la troupe est composée de plus de 200 éléments.

Thème

Au crépuscule de sa vie, Moeho Vahine savait qu’elle risquait de rejoindre Puoro’o-i-te-ao en emportant avec elle tout son savoir, transmis de génération en génération depuis la nuit des temps.

Elle avait reçu ce savoir de son père. Celui-ci le tenait de son père, selon une suite généalogique à rebours qui commence au premier ancêtre situé sur la lignée. Si elle ne le transmettait pas à son tour, ce savoir serait perdu pour les générations futures.

En effet, les changements intervenus depuis sa tendre enfance l’inquiètent profondément. Elle a vu des gens débarquer de toutes parts pour imposer leur religion et leurs coutumes. La société de ses parents est en train de mourir. Elle a pensé à sa petite fille Terita pour sauvegarder l’héritage des 
ancêtres.

Car parmi les générations issues d’elle, elle est la seule à prendre conscience de la gravité de la situation.

Le savoir de Moeho Vahine lui a été légué par le souffle au terme du rite du ‘aepau, la transmission de l’ultime souffle au moment de la mort de son père. Elle avait de ce fait préparé Terita pour prendre la suite. Elle devait poser ses lèvres sur les siennes pour capter son "ha", la dernière expiration. Le savoir transmis grâce au ‘aepau vient ainsi enrichir le aho ora, l’essence de la vie insufflée dans les narines par le père à la naissance. Le aho nūnui, le grand souffle de la vie légué par l’ancêtre, transmis sans interruption, est ainsi enrichi à chaque génération.
Les expériences de la vie ont fait prendre conscience à Terita qu’il lui revenait de prendre la suite. Elle était tellement fière de ses ancêtres, de leurs exploits, en particuliers de ceux de Raea, le héros guerrier. Elle admirait tant sa culture, qu’elle s’était adonnée en secret pendant sa jeunesse au 'ūtē, au pāta’uta’u et au 'upa’upa, dans les coins reculés du pays. Elle détestait en revanche leurs versions "occidentalisées" dépourvues d’authenticité. Elle en avait assez de ces choses imposées, habits, maisons, chants, langue…devenues aujourd’hui la tradition.

Elle a donc accepté d’absorber le ‘aepau de sa grand-mère, dans le but de le transmettre à son enfant et que celui le transmette à son tour au sien, pour continuer le cycle sans fin de la transmission du souffle éternel d
e la vie.
 


Rédigé par Rebecca Moux le Samedi 13 Juillet 2019 à 12:30 | Lu 1359 fois