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Plus d’un tiers de grévistes à l’OPT


PAPEETE, le 8 juillet 2019 – La grève a débuté lundi matin à l’OPT et dans ses deux filiales, Onati et Fare Rata, avec près de 35% des effectifs en débrayage et un peu moins de la moitié des bureaux de poste fermés, dont le centre de tri de Motu uta. Aucune rencontre n’a eu lieu lundi, mais la direction a annoncé de nouvelles négociations « dans les deux jours qui viennent ».
 
Après plusieurs réunions de négociations la semaine dernière avec la direction de l’OPT et de ses filiales Onati et Fare Rata, l’intersyndicale CSIP, CSTP-FO, O oe to oe rima et Sapot a finalement décidé de démarrer la grève lundi matin dans les trois entités. Des échanges de protocoles d’accord ont bien eu lieu par mail vendredi et samedi, mais aucun terrain d'entente n’a pu être trouvé.
 
Lundi matin, la direction de l’OPT a annoncé que 35% des effectifs étaient en grève. Selon le P-dg de l’OPT, 435 grévistes ont été dénombrés sur les 1 218 employés de la holding et des deux filiales. Un mouvement particulièrement suivi à Fare Rata -activités postales et services financiers- avec 43% de grévistes. Toujours selon la direction, seuls 49 des 87 bureaux de poste étaient ouverts lundi.
 
Un unique piquet de grève a été installé devant le siège de l’OPT à Fare ute lundi matin. Il a rassemblé près d’une centaine de personnes durant toute la journée. Sur place, les grévistes annonçaient des activités « au ralenti » dans les bureaux de poste restés ouverts. Une information que n’a pas voulu confirmer la direction.
 
Pas de négociations lundi
 
Le P-dg de l’OPT, Jean-François Martin, a expliqué lundi avoir trouvé un terrain d’entente sur une trentaine de points de revendications. Aucune réunion n’a été organisée dans la journée avec les représentants des grévistes, mais le P-dg assurait que des discussions devaient reprendre « dans les deux jours qui viennent ». Le temps de réaliser des « études financières » sur les points litigieux.
 
Si la direction n’a pas souhaité commenter dans le détail les points de blocage « pour en réserver la primeur aux syndicats », les grévistes ont affirmé que l’un des principaux points de crispation concernait la reprise de l’ancienneté des employés lors de mouvements inter-filiales. Le P-dg de l’OPT assure que l’ancienneté sera conservée, mais les syndicats veulent une trace écrite de cet engagement et affirment ne pas l’avoir retrouvée dans les protocoles du week-end.
 
Parmi les autres revendications bloquées, la question de la représentation des salariés au comité d’entreprise. L’OPT a récemment réduit cette représentation à un titulaire et un suppléant pour l’ensemble du groupe et ne compte pas revenir sur ce point. Enfin, la direction s’est engagée à présenter le projet Manatua aux comités d’entreprises d’Onati et de Fare Rata, tout en précisant aux grévistes que les décisions n’avaient pas encore toutes été arrêtées sur ce projet.
 

La déficit de Fare Rata inquiète

Derrière ces revendications, le principal souci des grévistes semble être l’avenir de Fare Rata. Avec ses activités postales et financières structurellement déficitaires, la filiale bénéficie désormais d’une subvention pour ses activités dans les îles à hauteur de 700 millions de Fcfp. Les syndicats doutent que cette seule subvention puisse maintenir les comptes à l’équilibre et demandent des garanties de pérennité de cette manne du Pays.
 
Côté direction, on assure « qu’aucun plan social » ou « aucun licenciement » ne sera décidé, mais qu’il convient de trouver des sources de financement, notamment fiscales, pour maintenir Fare Rata à flots. « A défaut, clairement il devra y avoir des subventions d’équilibre des acticités postales et services financiers », concède le P-dg, Jean-François Martin.
 
Les discussions doivent reprendre mardi ou mercredi sur ces sujets entre direction et grévistes. D’ici là, les services postaux pourront être perturbés, mais a priori pas les services télécom. « Tant que les équipements fonctionnent, il n’y a pas de problème pour Internet », rassure le P-dg. « Et s’il y a une panne, nous trouverons des agents d’astreinte non grévistes ».

​Jean-François Martin, P-dg de l’OPT : « Nous serons amenés à nous voir dans les deux jours »

Où en sont les discussions avec les syndicats ?

« Il y a eu des cahier de revendications déposés il y a plus d’un mois. On avait répondu en détail, envoyé un courrier en bonne et due forme en juin dernier. Les syndicats n’ont visiblement pas été convaincus puisqu’il y eu des préavis. Des négociations se sont ensuite tenues la semaine dernière. Il y a eu des allers et retours de protocoles avec les organisations syndicales vendredi et samedi. Et les syndicats ont certainement estimé que ce n’était pas suffisant, puisque la grève a effectivement été amorcée ce matin (hier, NDLR) à minuit. Nous serons amenés à nous voir dans les deux jours. On dialoguera et on négociera les points d’accroche. Sachant qu’on a déjà accepté pas mal de points, plus d’une trentaine. »
 
Les grévistes craignent un plan social, notamment à Fare Rata ?

« Lorsque le CA avait approuvé le plan Ambition 2020, il y avait plusieurs scénarios. Et le scénario qui avait été retenu, c’était pas de licenciements, pas de plan social, mais des recherches d’économies. Des recherches d’optimisations, des départs volontaires non remplacés… Nous menons également des réflexions avec le gouvernement sur différentes pistes, financières et fiscales. Grace à la nouvelle organisation, on a eu une nouvelle subvention pour les activités postales dans les iles éloignées. Ce sont 700 millions qui vont bientôt passer au conseil des ministres. Ce qui est sur la table, c’est la pérennité de cette subvention. Mais il faudra en plus mettre en place l’intégration fiscale. A défaut, clairement il devra y avoir des subventions d’équilibre des acticités postales et services financiers. »

Patrick Galenon, secrétaire général de la CSTP-FO : « Il y a un déficit patent chez Fare Rata »

Quels sont les points de blocage aujourd’hui ?

« Les propositions faites n’ont pas du tout convaincu les salariés. Parce qu’il ne veulent pas mettre en cause qu’au niveau du groupe les gens ne puissent pas bénéficier de leur ancienneté. Ils nous ont dit oui oralement, mais il faut l’écrire. Tant que ce n’est pas écrit, je n’y crois pas. Nous l’avions proposé et leur contre-proposition ne l’indiquait pas. C’est pour ça que nous sommes en grève. C’est un point essentiel. »
 
Sur le fond, qu’est-ce qui explique qu’on en arrive à cette grève ?

« La direction est aujourd’hui un peu embêtée. Parce que la problématique n’est pas que du coté de la holding. Il y a un déficit patent chez Fare Rata qui devrait être compensé par Onati. C’est normal, ce qui est produit postaux et bancaire c’est déficitaire mais ça a un rôle de service public. Et puis de son côté, Onati est aussi menacé par la concurrence. Si les bénéfices malgré tout ne sont pas suffisants, il faut que le territoire puisse subventionner à hauteur des déficits liés aux services publics. »

Rédigé par Antoine Samoyeau le Lundi 8 Juillet 2019 à 20:13 | Lu 2283 fois