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Patrick Balkany relaxé pour corruption mais condamné pour blanchiment


Paris, France | AFP | vendredi 18/10/2019 - Un "indéniable enracinement dans la délinquance" mais pas de "pacte de corruption" : déjà condamné pour fraude fiscale, le maire de Levallois-Perret Patrick Balkany s'est vu infliger vendredi à Paris cinq ans de prison pour blanchiment, assortis d'un nouveau mandat de dépôt, mais a été relaxé du délit de corruption.

Le baron des Hauts-de-Seine, âgé de 71 ans, n'était pas présent au tribunal correctionnel de Paris, ayant refusé dans la matinée d'être extrait de sa cellule de la prison de la Santé, où il est incarcéré depuis sa condamnation à quatre ans de prison le 13 septembre.
Son épouse et première adjointe Isabelle, 71 ans également, absente au procès après une tentative de suicide début mai, était bien présente sur le banc des prévenus vendredi : après sa condamnation en septembre à 3 ans de prison, elle s'est vue infliger une peine de quatre ans de prison, mais sans incarcération immédiate, eu égard à sa santé fragile.
Tous deux ont en outre été condamnés une nouvelle fois à dix ans d'inéligibilité. Et le tribunal a ordonné la saisie de biens et avoirs du couple, notamment leur moulin à Giverny (Eure).
"Comme nous l'avons toujours dit, il n'y a pas un centime d'argent public, c'est uniquement notre patrimoine familial, il n'y a pas de corruption", a déclaré Isabelle Balkany à la sortie de l'audience. Elle a fait appel de cette nouvelle condamnation.
Isabelle Balkany, qui règne avec son mari depuis 36 ans presque sans discontinuer sur la commune cossue de l'ouest parisien, avait immédiatement contesté sa première condamnation et repris dans la foulée les rênes de la mairie de Levallois pour assurer l'intérim.
Les avocats de Patrick Balkany n'ont pas encore dit s'ils comptaient faire appel de cette seconde condamnation, une démarche qui permettrait au maire, en dépit d'une nouvelle condamnation à dix ans d'inéligibilité, de briguer un nouveau mandat aux municipales du printemps. Sa demande de mise en liberté dans le premier dossier sera examinée mardi.
 

- Millions africains -

 
Épilogue d'un procès marqué par la gouaille d'un infatigable ferrailleur qui a défendu une "vie à servir les autres" et regretté sa "manie de vouloir toujours faire plaisir", ce second jugement sanctionne avec sévérité des manquements de deux élus de la République.
Le tribunal condamne le couple pour avoir caché 13 millions d'euros d'avoirs au fisc entre 2007 et 2014, notamment deux somptueuses villas, Pamplemousse aux Antilles et Dar Guycy à Marrakech.
S'ils ont concédé quelques "fautes" - Isabelle Balkany avait, pendant l'instruction, admis avoir acquis grâce à un héritage familial la villa antillaise en 1997, via une société constituée au Liechtenstein par une fiduciaire suisse - ils ont persisté à nier détenir le riad. Et ce, en dépit des peignoirs brodés aux initiales "PB", des livres dédicacés, des meubles payés par Isabelle Balkany.
Le tribunal considère qu'ils auraient dû déclarer les deux villas et relève la complexité du montage entourant l'acquisition du riad marocain, acheté en janvier 2010 par une SCI marocaine, elle-même détenue par une société-écran panaméenne aux titres au porteur.
Il a suivi la piste de l'argent et établi que 5 millions de dollars, versés par un magnat belge du cuivre installé au Congo-Kinshasa sur le compte suisse d'une société offshore panaméenne avait en partie servi à payer le riad, au profit des Balkany.
En revanche, le jugement a écarté tout "pacte de corruption". Alors que l'accusation affirmait que Patrick Balkany s'était fait offrir cette villa par le milliardaire saoudien Mohamed Al Jaber en échange de délais de paiements dans un juteux projet immobilier à Levallois, le tribunal estime qu'"il n'a pu exister" de pacte entre les deux hommes au regard de la chronologie des faits et des procédures liées à ce contrat.
Le tribunal n'a pas non plus pu établir que le milliardaire avait effectivement payé le riad de Marrakech, et l'a donc totalement relaxé.
Les juges ont sanctionné tous les auteurs de "blanchiment aggravé" dans ce jeu de piste offshore, des tropiques aux coffres-forts helvètes : l'avocat Arnaud Claude, présenté comme le pilote de la transaction marocaine, à trois ans de prison avec sursis et 50.000 euros d'amende et Jean-Pierre Aubry, alors fidèle bras droit de Patrick Balkany, à trois ans avec sursis et 100.000 euros d'amende.
Six mois de prison avec sursis ont été infligés à Alexandre Balkany, pour avoir "couvert" ses parents en souscrivant des baux de location fictifs.
Enfin, l'Etat a obtenu de tous les condamnés un total d'un million d'euros de dommages et intérêts.

le Vendredi 18 Octobre 2019 à 05:11 | Lu 307 fois