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PPN, billets d'avion, filières porcines… : les premiers dossiers de l'Autorité de la concurrence


PAPEETE, le 10 mars 2016. L'Autorité polynésienne de la concurrence, opérationnelle depuis le 1er février, s'est déjà saisie de plusieurs dossiers. Elle va passer à la moulinette les PNN, les mécanismes d'importation et de distribution en Polynésie française, les prix des médicaments et des transports aériens et la filière porcine.

L'Autorité polynésienne de la concurrence est au travail depuis le 1er février. Celle-ci a pour mission de rechercher, constater et sanctionner les comportements et les mécanismes qui viennent pervertir le fonctionnement vertueux de la concurrence. Pour mener à bien son travail, elle peut s'autosaisir de thématiques qui lui semblent incontournables. Elle a ainsi décidé de prendre à bras-le-corps cinq dossiers : les PNN, les mécanismes d'importation et de distribution en Polynésie française, les prix des médicaments et des transports aériens et la filière porcine. Ces saisines d'office ont été publiées au Journal officiel mardi.
Le système des produits de première nécessité est un des premiers gros dossiers. Le gouvernement qui prévoit de réviser son fonctionnement devrait être attentif à ce rapport.

LES "EFFETS NEFASTES" DES PPN
Sans donner le contenu de l'avis qu'elle rendra, l'Autorité de la concurrence rappelle que le système des PPN a déjà été pointé du doigt par l'Autorité de la concurrence métropolitaine lorsque celle-ci avait étudié les mécanismes d'importation et de distribution des produits de grande consommation en Nouvelle-Calédonie. Un certain nombre "d'effets néfastes" avaient ainsi été mis en lumière. Les effets peuvent ainsi être pervers et avoir au final un impact négatif pour le consommateur.
"Si le prix (ou la marge) fixé est insuffisant pour rémunérer les acteurs de la chaine de distribution, la réglementation des prix peut avoir pour conséquence une faible disponibilité de ces produits et/ ou une augmentation du prix des autres produits de la gamme du fournisseur concerné afin de compenser l'absence de rentabilité des produits réglementés", peut-on ainsi lire. A contrario, "si le prix est fixé à un niveau trop élevé par rapport à un niveau habituel de marge, le producteur ou l'importateur peut profiter de ce système aux dépens du consommateur".
Aujourd'hui, le système des PPN prévoit un prix de vente maximum. Au final, dans les étalages, le client ne trouve généralement que ce prix maximum. Les magasins ne sont, en effet, pas "incités à pratiquer de prix inférieurs à ce prix, surtout dans une structure de marché peu concurrentielle", résume l'Autorité polynésienne de la concurrence. Le prix maximum devient alors en quelque sorte "le prix unique".
Les petits commerces pourraient également être désavantagés par le système des PPN. En effet, les grandes enseignes peuvent reporter des marges. C'est à dire qu'elles peuvent compenser les faibles marges sur les produits réglementés par une hausse des marges sur les autres références non règlementées. Or, "cette compensation s'avère difficile à mettre en œuvre pour les petites surfaces, les commerces de proximité, pour lesquels la part de produits réglementés est importante", souligne l'Autorité polynésienne de la concurrence.

QUEL IMPACT A L’INSULARITÉ ?
L'Autorité prévoit aussi de réaliser un état des lieux des mécanismes d'importation et de distribution des produits en Polynésie. L'objectif est de "cerner les problématiques principales qui contribuent à la faible concurrence et la vie chère en Polynésie française" et de savoir enfin "quelle est l'importance réelle des facteurs liés à l'insularité, à l'éloignement et à l'étroitesse du marché". Ce rapport permettra enfin de savoir si la cherté de la vie au fenua est une fatalité ou au contraire peut être combattue.
Nous reviendrons plus en détail dans notre prochaine édition sur les différentes saisines de l'Autorité polynésienne de la concurrence.



Peut-on faire baisser le prix des médicaments ?

Selon l'Autorité polynésienne de la concurrence, les remboursements de médicaments effectués par la CPS représente 14% du total des dépenses de santé. La charge financière s'est élevée à près de 7 milliards de Fcfp en 2014. L'Autorité de la concurrence a donc décidé de se saisir de ce dossier pour "identifier les obstacles éventuels à une baisse du prix du médicament". L'autorité va dans un premier temps examiner les conditions réglementaires d'implantation des offices : méritent-elles ou non d'être revues ? "Les relations entre grossistes-répartiteurs et officines sont-elles suffisamment transparentes?", s'interroge également l'Autorité. Le secteur comporte trois société de grossistes-répartiteurs, qui sont "majoritairement détenues par des 'collectifs' de pharmaciens qui ont donc une maîtrise en amont et en aval dans la distribution du médicament".
L'Autorité s'intéressera aussi à la possibilité pour les consommateurs polynésiens d'acheter en ligne leurs médicaments.



Qui peut saisir l'Autorité de la concurrence ?

Ce ne sont pas les consommateurs individuellement qui peuvent saisir l'Autorité de la concurrence et signaler des dysfonctionnements. Cette dernière répond aux demandes d'intervention du président du Pays ou du président de l'assemblée polynésienne pour des avis sur des textes, aux entreprises elles-mêmes signalant des problèmes de concurrence déloyale ou par le biais de la CCISM, des associations de consommateurs, d'organisations représentatives (syndicats).
En revanche, l'autorité peut s'autosaisir de thématiques qui lui semblent utiles ou rendues incontournables par la rumeur publique.

Les missions

• La lutte contre les pratiques anticoncurrentielles (ententes, abus de position dominante, abus de dépendance économique)
• Le contrôle a priori des concentrations, il s'agit d'une action préventive. L'autorité pourra autoriser ou refuser, ou encore autoriser moyennant des engagements de la part de l'entreprise pour que la concurrence ne soit pas faussée dans un secteur donné.
• Les avis au gouvernement sur tout ce qui touche à la concurrence (Ex : l'examen d'un tarif d'interconnection en matière d'industrie de réseau) et sur la fixation des prix qui ne sont pas pratiqués librement.

Rédigé par Mélanie Thomas le Jeudi 10 Mars 2016 à 18:15 | Lu 4440 fois