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"Nous revenons très optimistes de New-York" (Oscar Temaru)


"Nous revenons très optimistes de New-York" (Oscar Temaru)
FAA'A, le 13/10/2017 - Une délégation du Tāvini Huira'atira s'est rendue début octobre à New-York pour participer à la 4ème commission des Nations Unies. Une commission qui se charge des questions politiques spéciales et de la décolonisation. Pour Oscar Temaru, ce déplacement en valait la peine.

Ils étaient plus d'une quinzaine à avoir pris la direction de New-York début octobre, pour participer à la 4ème commission des Nations Unies. Dans la délégation, on retrouve les leaders indépendantistes polynésiens, et leur combat reste le même : "donner au pays l'autonomie qu'il n'a pas", souligne Antony Géros, vice-président du Tāvini Huira'atira.

Lors de cette 4ème commission, les membres ont étudié la résolution qui "rappelle le droit à l'autodétermination du peuple de Polynésie, donc le droit de choisir son statut. Deuxièmement, la résolution reconnait que le pays ne dispose pas d'un statut d'autonomie interne au sens de la définition de l'ONU. Troisièmement, cette résolution rappelle à la France à prendre ses responsabilités vis-à-vis des essais nucléaires, et à respecter le patrimoine souverain du peuple polynésien. Enfin, cette résolution rappelle aussi à la France de mettre en place les éléments de décolonisation", précise Antony Géros.

Pour parler de la Polynésie, 14 intervenants du Tāvini Huira'atira ont pris la parole, et "leurs interventions ont porté sur trois points particuliers. Le premier point est la nécessité d'expliquer à la communauté internationale qu'effectivement l'autonomie dont se prévaut le président du pays ne répond pas à la définition de la charte des Nations Unies, et qu'à ce titre, nous ne sommes pas un pays autonome. Le deuxième point a porté sur la nécessité de reconnaitre qu'en Polynésie, le traitement des victimes polynésiennes par rapport aux conséquences liées aux essais nucléaires, n'est pas à la hauteur de ce qu'on est en droit humainement d'attendre. Donc, ça continue à constituer un contentieux avec L’État français. Ensuite, le troisième point a porté sur la nécessité d'obliger la France à reconnaitre notre pleine souveraineté sur nos ressources naturelles", décrit le vice-président du Tāvini Huira'atira.

Présent également à New-York, le président Edouard Fritch a tenu des propos qui n'ont pas laissé de marbre l'assemblée, en remettant en cause le travail de Carlyle Corbin, un expert indépendant de l'ONU. "La fin de son intervention a été reprise par le président de la 4ème commission qui a quand même rappelé aux membres présents d'avoir les retenus qu'il faut lors de leurs interventions, surtout pas d'attaques personnelles comme il a fait à propos d'ailleurs de Monsieur Corbin par rapport à son travail à l'ONU pour le compte de l'UPLD", souligne Antony Géros. "Je pense que Monsieur Fritch s'est trompé d'endroit, il se croyait peut-être à Nahoata à Pirae ou au marché de Papeete. Il oublie que la plupart de ces pays sont des anciennes colonies, ce n'est pas à eux qu'il faut aller raconter des histoires. C'est ce qu'ils nous ont fait comprendre quand nous les avons rencontré le lendemain jusqu'à la fin de notre séjour à New-York. Ils ne sont pas dupes", lâche Oscar Temaru.

Et le message des indépendantistes a bien été entendu puisque mardi dernier la 4ème commission a voté "en l'état cette résolution. Maintenant, il reste une dernière étape, c'est l'assemblée générale des Nations Unies qui doit se réunir en décembre, je pense le 6 décembre pour entériner cette résolution", explique Antony Géros.


Antony Geros
Vice-président du Tāvini Huira'atira


Vous estimez qu'Edouard Fritch parle au nom de la France quand il s'exprime à l'ONU ?
"Tout à fait parce que dans son discours, il loue les bienfaits de la colonisation et que c'est de mauvaise augure de s'en délester, et qu'il faut continuer à accentuer la dépendance que nous avons vis-à-vis de la France, et à ce titre d'ailleurs, il assimile les 18 milliards de compensation qui nous a été donnée à travers la Dotation globale d'autonomie (DGA) et le 3ème instrument financier (3IF) par le fait que c'est la compensation que l'Etat doit à la Polynésie pour le nucléaire, et pour solde de tout compte, nous n'avons plus rien à demander à la France. Là, j'ai bien vu le comportement des ambassadeurs qui étaient présents qui étaient surpris parce que ce sont des pays ou des Etats qui sont souverains aujourd'hui, et qui ont traversé en leur temps une époque coloniale. Et peut-être même dans ces pays, il y a eu des révolutions… et ils ne peuvent pas accepter ce genre de chose. Donc, c'est le président de la 4ème commission qui a rappelé à tous les pétitionnaires et au président du pays, tout de suite après son intervention, qu'il faut apporter le temps qu'il faut."

Est-ce que vous avez noté une différence de posture depuis qu'Emmanuel Macron a été élu, sur les questions de la décolonisation ?

"Absolument pas en ce qui me concerne. Au-delà des annonces et de propagandes présidentielles, absolument pas. Pour moi, on se retrouve avec la même attitude de la France, qui lorsque le dossier de la Polynésie est appelé, ils sortent de la salle pour aller fumer et une fois qu'on appelle le deuxième dossier, ils reviennent en salle. On ne comprend pas ce genre d'attitude."

Que retenez-vous de ce déplacement à l'ONU ?

"Qu'on arrête de tergiverser avec un statut d'autonomie qui est mal rédigé et qu'il faut revoir. On a l'impression que l'on va se revoir pour partager encore le magot… Non, le principe qui a été donné par l'ONU, c'est la reconnaissance pour chaque peuple de sa souveraineté vis-à-vis de ses ressources naturelles. Après, il appartient à ce peuple de prendre la décision de céder ou non des parties de leur patrimoine, ou de les associer à la gestion de ce patrimoine."



le Vendredi 13 Octobre 2017 à 15:47 | Lu 3639 fois